Le football hébergerait-il, voire chérit-il des truqueurs ?

ES Sétif

«Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous», disait joliment Paul Eluard, poète français (1895-1952).

L’actualité récente du football, marquée par ce scandaleux enregistrement, nous permet d’adhérer pleinement à cette citation. Intronisé voilà une année à la tête de la grande équipe sétifienne de football, Fahd Halfaïa est au cœur d’une affaire de «marchandage de match de Ligue 1» comme le révèle l’enregistrement téléphonique scandaleux. Son interlocuteur, un certain agent de joueur «connu pour être le bras droit du président de la Fédération algérienne de football, impliqué dans plusieurs opérations de transferts de joueurs locaux du Paradou AC». On sait très bien que derrière la faute de quelques individus, se cache la pire des stratégies. A la glorieuse incertitude du sport, succède la honteuse certitude de la triche.
Qui veut tricher dans ce dossier d’enregistrement et qui veut démontrer son contraire ? Les faits sont d’une gravité telle qu’ils confirment l’existence d’un réseau qui perturbe les rencontres de football. A cette allure, on serait tenté de dire, comme l’expliquait un technicien de la balle ronde, ce sont ces personnes qui cherchent à se faire un nom en utilisant ce canal incroyablement médiatique qu’est le football, avec l’annonce sensationnelle de «matches potentiellement truqués» avant de s’interroger «personne ne dit que le danger n’est pas réel ou difficile à détecter. Mais maintenant, le monde attend de voir combien de ces matches vont montrer des preuves de culpabilité, et combien de coupables effectifs seront trouvés».
Cet enregistrement mafieux montre comment étaient gérés les matches de football, un fait considéré comme une violation de l’éthique et de l’intégrité du sport, en ce sens que la main basse sur des matches truqués apparaît au grand jour. Un scandale «retransmis» en direct et dont le contenu est classé «indéfendable» puisqu’il porte atteinte, non seulement à l’image du football, mais également à la dignité de ses auteurs. Le football n’est jamais immunisé contre les matches truqués, partout dans cette sphère, des gestionnaires jouent à ce jeu, mais à quel prix ? Face à cet enregistrement qui se balade sur la toile, ses auteurs résistent et utiliseraient une stratégie qui ferait retarder les choses, le temps de désamorcer la tension au moment ou les professionnels y tiennent. Ils veulent tout connaître et exigent des sanctions exemplaires pour tenter de sauver le football des griffes de ces tricheurs. La procédure disciplinaire d’urgence lancée par la Ligue de football professionnel, alors qu’il revenait à la FAF de prendre en charge ce dossier, avance à petit pas. Le directeur général de l’ESS, Fahd Halfaïa, finira-t-il par s’expliquer et livrer sa version des faits ? Lui qui a brillé par son absence lors de la séance de la commission de discipline, programmée le lundi 18 mai 2020.
Ou était-il passé ? A qui profite cette situation ? Les jours passent, les retards s’accumulent sans qu’aucune info ne filtre, celle qui situerait les responsabilités de cet enregistrement qui frappe de plein fouet l’équipe sétifienne. Ce que l’on sait ne suffit pas pour convaincre l’opinion nationale, et ce n’est surement pas la sanction décidée par la LFP qui ferait taire ou emballer les différentes hypothèses. La suspension, à titre conservatoire, par la Ligue du football professionnel ne serait, selon quelques experts, pas suffisante si l’on veut tuer le virus qui peut paralyser le championnat national. Tout le monde sait que le directeur général de l’ES Sétif, Fahd Halfaïa, n’a pas répondu à la convocation de la commission de discipline. Le motif évoqué serait pour des raisons de santé. C’est ce qu’indique la LFP dans un communiqué de presse mis en ligne sur son site. «Absent à l’audition de ce lundi 18 mai 2020, Fahd Halfaïa, directeur général du club de l’ES Sétif, est de nouveau convoqué par la commission de discipline pour la séance du jeudi 21 mai 2020 à 11h au siège de la Ligue de football professionnel».
Et de préciser que «la commission indique que la prochaine convocation sera la dernière avant sanction». A ce sujet, l’article 10 stipule clairement que «dans les cas jugés graves, la commission de discipline peut prendre toute mesure conservatoire dictée par l’urgence, et ce, jusqu’à achèvement de l’enquête qui ne saurait excéder sept jours». Cependant, un confrère s’interroge pour sa part «sur les motivations réelles de cette absence inattendue.
Il faut savoir que le directeur général de l’ESS a déposé une plainte samedi au commissariat de Sétif contre X dans le dossier de l’enregistrement téléphonique qui a fuité dans les réseaux sociaux. Il a été entendu dimanche par la police ainsi que d’autres dirigeants de l’ESS», écrit-il, avant de s’interroger «pourquoi alors a-t-il argué subitement des raisons de santé pour échapper au réquisitoire de la commission de discipline qui a lancé une procédure d’urgence contre lui ?» Enfin, on croit savoir que la structure qui gère le championnat pro avec ses deux paliers n’a pas tardé à réagir en différant le rendez-vous pour aujourd’hui, jeudi, indiquant qu’il s’agit de la seconde et ultime convocation. C’est pour dire que le successeur de Hassan Hammar est dans l’obligation de se rendre dans la capitale.
H. Hichem