Pensée d’un homme qui a «vietnamisé» les grands idéaux du monde

Guerre de décolonisation

Il y a 130 ans naissait Hô Chi Minh (1890-1969), le patriote ardent, qui a su conjuguer les grands idéaux du monde avec l’identité vietnamienne et su mettre à profit tous les moyens d’alors pour la liberté de son peuple et celle de tous les peuples colonisés. Le 130e anniversaire de la naissance de celui qui avait «vietnamisé» les grands idéaux du monde, sera commémoré mardi 19 mai, jour de sa naissance, par le peuple vietnamien, les militants des causes justes ainsi que les peuples ayant subi les affres du colonialisme.

En décembre 1999, la revue américaine Time a publié le résultat d’un vote pour déterminer les personnalités les plus représentatives du XXe siècle. Parmi les 100 élus, Hô Chi Minh figure dans le groupe des 20 leaders politiques les plus prestigieux. De par le monde, historiens, hommes politiques, politologues, s’accordent à reconnaître que Hô est «l’incarnation de l’aspiration à l’indépendance et la liberté des peuples opprimés», mais ne sont pas arrivés à trouver des réponses communes à son identification politique. Etait-il nationaliste ou internationaliste? Marxiste ou confucianiste, communiste ou social-démocrate? Pour David Halberstam, journaliste américain, Hô Chi Minh est quelque peu Gandhi, quelque peu Lénine, mais entièrement vietnamien». Il est capable d’harmoniser, de combiner les éléments positifs, progressistes venus du dehors sans restriction ni ségrégation, pourvu qu’ils ne soient pas opposés à l’humanisme de la culture vietnamienne. Et d’après Pierre Brocheux, historien, Hô Chi Minh était «un confucéen». Selon lui, il aimait mieux la modération que les moyens extrémistes.
Il condamnait la violence et les tueries au cours de la Réforme agraire, disant que ce sont «des agissements criminels». Mais pour le professeur japonais Yoshiharu Tsuboi, expliquer Hô Chi Minh par l’idéologie marxiste léniniste est juste insuffisant, car on se limitera au dogme de la lutte des classes. Dans la lutte de libération nationale, pour bénéficier de l’aide du camp socialiste, Hô Chi Minh devait parler et agir comme un communiste sous la pression historique, il n’avait pas d’autre choix. En dehors des opinions étrangères, certains chercheurs vietnamiens ont récemment avancé des points de vue personnels sur Hô Chi Minh. Il y en a qui sont d’avis que sous l’ombrelle communiste, Hô était plutôt social-démocrate. Toutefois, pour trouver une réponse claire, il faut situer chaque élément dans l’ensemble de la vie de Hô Chi Minh, de sa personnalité, de son fonds culturel, de son comportement.

Un touche-à-tout
A l’étranger, Hô Chi Minh a pu enrichir son savoir, pratiquer plusieurs métiers, contacter nombre de grands hommes, faire connaissance avec de nombreuses cultures, et participer à de nombreuses organisations. Il a exploré de nombreuses méthodes d’organisation, différents régimes socio-politiques, en vue de sélectionner ce qu’il y a de meilleur, d’approprié à la lutte de libération de son pays et à la construction du futur Vietnam indépendant. Il n’est guère étonnant qu’on le considère comme un symbole de «l’acculturation Orient-Occident», ce qui signifie la préservation de son identité propre tout en l’enrichissant par des valeurs universelles. En somme, tous les choix de Hô Chi Minh : le marxisme-léninisme, comme toute autre doctrine politique ou religieuse étrangère, sont toujours «vietnamisés» par Hô Chi Minh sur la base de ses traditions culturelles, idéologiques et morales, et selon le style de vie du peuple vietnamien. Le fonds culturel de Hô Chi Minh englobe la démocratie et les droits de l’homme américains, la dialectique marxiste, le léninisme révolutionnaire, la doctrine tripartie du peuple de Sun Yatsen. Partant de la Déclaration d’indépendance américaine, Hô Chi Minh a élargi le concept : «Tous les peuples du monde sont nés égaux, chaque peuple a droit à la vie, au bonheur et à la liberté».
R. I.