Ne m’en voulez pas, le rêve est gratuit

Culture

Préambule
Peut-on dire que ce que j’écris dans ce texte est une véritable pièce de théâtre, classique, selon les normes requises dans ce genre de littérature ? Le lecteur sera seul juge. En tout cas, si elle n’en est pas une, j’aurai le mérite d’avoir essayé. Mon intention est de présenter quelque chose qui se tient, sur le plan du contenu, c’est-à-dire du message que je veux transmettre. Mon autre intention est de présenter quelque chose qui arrive à ce même lecteur dans un style accessible, facile à parcourir, afin qu’il ne puisse s’embarrasser de trop d’élocutions pour lesquelles il lui faudrait trimballer une encyclopédie de langue et de grammaire, pour en comprendre le sens et la dimension de cette tragédie qui se joue, hélas, sous nos yeux. Ce serait, de ma part, une marque d’égoïsme et une manifestation de pédanterie, que je ne devrais jamais afficher, eu égard à ce que je souhaite léguer à la jeunesse, surtout.

Un autre jeune se lève et, d’une voix fluette, déplore lui aussi la situation difficile. Il parle longuement, comme ceux qui l’ont précédé, des effets et des conséquences sur l’avenir si on ne change pas notre mode de vie par des comportements de «civilisés». Et, résolu, il propose que l’on crée notre union, que l’on ranime notre compréhension, que l’on aille vers des discours mobilisateurs, en un mot vers du palpable, vers le manifestement positif. – Les politiques lancent beaucoup de propositions redondantes – il y a même une overdose de textes et de programmes – alors que tout le système est ébranlé. Il y a même des responsables, par trop méprisants, qui font des déclarations absurdes, débiles, choquantes, qui leur valent un lynchage des médias et de l’opinion. Personne ne les croit. En fait, personne ne croit ce qui se dit, car personne ne croit notre pouvoir et ceux qui l’incarnent. Une crise de confiance qui accentue les frustrations qui elles-mêmes sont le produit de la culture du mensonge et de la dissimulation. C’est pour cela que je dis qu’avec la compréhension et l’union, nous pourrons trouver la bonne voie et le meilleur moyen pour redevenir nous-mêmes, ces Algériens d’avant, simples, honnêtes, travailleurs, aimant profondément ce que nous faisons…, pour le bien de tous. N’est-ce pas la seule solution qui nous reste pour sauver notre pays des drames qu’il vit quotidiennement ? N’est-ce pas la meilleure solution pour redonner le sourire aux petits enfants, ces innocents qui, à cet âge-là, ont perdu le goût de la vie ? Ensuite, il s’adresse à l’artiste, tout particulièrement, comme s’il lui demande d’évoquer, devant l’assistance, les moments heureux où il vivait sa pleine innocence, avec les jeunes de son époque. Il veut l’entendre décrire sa joie et son bonheur avec un sentiment plus que nostalgique… – Je veux, à tout prix, vous entendre dire, qu’avant, la vie était simple, belle, prometteuse…
Je veux faire cette comparaison pour me situer dans mon temps et dans mon espace où je ne rencontre que des obstacles, des malheurs et des déceptions, et où les termes : sous-développement, chômage, corruption, régionalisme, et grands besoins, reviennent constamment dans les discours. Je veux m’entendre dire, par exemple, en parlant d’hier, que les jeunes de la génération qui a précédé celle-ci, la mienne, étaient plus heureux, peut-être plus…chanceux. Je veux m’entendre dire que ceux-là abhorraient la laideur, mais cultivaient le goût de la beauté. Je veux écouter le récit de ces jeunes quand, les jours de repos, ils se préparaient à aller au cinéma, avec leurs petites amies. Oui, je veux tout savoir de mes aînés qui ont eu ce privilège de connaître la vie, ses meilleurs moments, ses passions, ses réussites, ses ferveurs et ses amours. Je veux tout savoir de cette époque où ils ajoutaient du vert à leur printemps, du parfum à leur automne et du pourpre à leurs jeunes lèvres. Là, l’artiste, avec une pointe de mélancolie, répond au désir du jeune. Il se fait l’écho d’un bon rédacteur, qui écrivait de belles phrases pensant à hier, quand il était jeune et quand il rêvait, comme tous les jeunes de son âge, de tant de belles choses qui agrémentaient son quotidien.
D’un geste sûr, il tire de sa poche un morceau de papier qu’il a dû découper à la hâte, le déplie machinalement et, mettant l’intonation exigée dans ce genre de récit, lit à haute voix ces moments de plaisir quand l’innocence le faisait voyager dans les beaux décors de mirages féeriques : – «Ce moment important, entouré d’une magie particulière, fait de joie et d’enchantement, nous tenait en haleine pendant toute la semaine où nous comptions les heures et les jours qui nous séparaient de l’instant magique où nous mettrons les pieds sur la moquette de la salle obscure. Quant les lumières s’éteignaient, après l’entracte, succédant au hors-d’œuvre délicieux des aventures de Tom et Jerry, nous avions l’impression de quitter le monde qui nous entourait pour pénétrer celui du mystère et de la féerie. Nous entrions dans le royaume de la légende, là où volent les tapis et ricanent les chevaux indomptés dans les canyons sauvages, là où les couleurs et les lumières des citadelles somptueuses et des jardins enchantés réinventaient sur un bout de pellicule les grands rêves de l’adolescence, là où nos rêves intrépides et vaillants bâtissaient des aventures bigarrées qui allaient peupler nos tristes nuits d’internes pour les vêtir des majuscules du plaisir…». L’homme sage l’interrompt et s’exprime. Le groupe de jeunes répète derrière lui : – Il faut que ça change…. Il faut que ça change… Il faut une révolution dans notre pays… Il faut retourner au concret et ne pas se gargariser de complaisance et d’obligeance… Il faut s’attacher au vrai, quant au reste, il est sans agrément ! Le même jeune reprend la parole et, d’une voix convaincante, s’adresse à l’assistance: – Le changement est nécessaire, voire indispensable, si l’on veut retrouver nos marques et nos couleurs et nous adapter aux exigences des temps modernes.
Les jeunes n’ont pas les mêmes réflexes que vous avez eus et vécus dans ce système rendu obsolète et inopérant par des pratiques surannées et par trop démagogiques… Les jeunes d’aujourd’hui ne connaissent pas la langue de bois et n’ont pas cette crainte – que vous aviez hélas – et qui vous enlevait le peu de courage qui vous restait depuis ces années de gloire où vous étiez véritablement des héros face à un colonialisme féroce. En effet, les jeunes d’aujourd’hui, n’ont pas cette crainte qui ne vous permettait pas de vous exprimer naturellement, comme les gens d’ailleurs, dans d’autres pays, ces gens qui ont réglé depuis longtemps leur problème de gouvernance et plus particulièrement celui de la liberté d’expression. Les jeunes, aujourd’hui, racontent le système qu’ils vivent avec autant de franchise que de dérision, parce qu’ils n’ont pas peur et parce qu’ils ne comprennent pas pourquoi l’on s’obstine à dire que tout va pour le mieux alors que tout nécessite de grandes corrections, de grands changements… Oui, ils le racontent avec dérision, se moquant royalement des adultes que sont leurs parents et les responsables, parce qu’ils sont «câblés» ailleurs et constatent quotidiennement, à travers les médias, autrement plus consistants et mieux élaborés, des scènes où se déploie cette différence dans le discours, dans la vie de tous les jours, dans l’application de la justice, dans le choix des hommes à des postes de responsabilité, dans la gestion des affaires publiques.
Ils comparent entre ces systèmes conséquents, ordonnés et harmonieux et le nôtre, inconséquent, désordonné et, de plus…, inconsidéré par le peuple qui subit, sceptiquement et douloureusement, une vie sans saveur. A un moment donné, ce même jeune fait comme l’artiste. Il sort de sa poche un autre bout de papier et, en un réquisitoire implacable, clame à tue-tête, ses impressions contre ce qu’on appelle communément un «Chef». On dirait qu’il avait tout préparé à l’avance. En tout cas ce papier, reflète très bien cette réalité amère que nous vivons au quotidien. Il le lit avec emphase : – Dans un système donné par exemple, un peu trop controversé, comme le nôtre : «il y a lui et il y a le peuple. Le problème est donc qu’il n’arrive pas à accéder au peuple sans se retrouver face à la population. A chaque fois qu’il se déplace, le même univers se déplace autour de lui comme un camp de cinéma. Là où il met les pieds, l’avion ou le micro, il a droit à un wali, une petite fillette avec une gerbe de fleurs, les mêmes élus avec les mêmes visages photocopiés, les mêmes représentants de la représentation collective, les mêmes banderoles d’antan, la même zorna impayée et les mêmes acclamations diffusées en boucle autour de lui. A force, l’Algérie est une même wilaya dupliquée en 48 exemplaires qui se déplace autour du même bonhomme à chaque déplacement du bonhomme dans le pays.

Le bonhomme élève alors le ton lors des discours et essaye de parler plus fort pour atteindre les oreilles du peuple au-delà des illustrations qui illustrent le peuple en son absence. Peine perdue car justement le peuple n’est ni dans la salle, ni près de la salle, ni à l’extérieur de la salle, ni dans les rues du bain de foule à foule conditionnée. Le peuple n’est jamais à portée de voix comme il est à portée de la matraque, les jours de contacts physiques entre l’Etat et son peuple d’exercice. Alors le bonhomme reprend son avion, ses gardes du corps, ses conseillers, ses protocoles et va encore plus loin à la recherche de son peuple derrière sa propre popularité peuplée de représentants du peuple…» Si je donne lecture de ce papier, et je suis entièrement d’accord avec son rédacteur, c’est parce que je sais que les jeunes attendent du changement… Ils ne sont plus convaincus de la pertinence de notre système – si au moins, il l’a été un jour –, ils ne croient plus en rien, même si on leur présente les meilleures conditions qui leur permettent d’évoluer. Un problème de crédibilité et de confiance. Et les adultes sont responsables, dans cette spirale infernale d’atermoiements, de mensonges et de cupidité, de retards, de remises en cause et de renvois des échéances à plus tard. En effet, ils sont responsables de par le manque de consistance et souvent de sérieux qu’ils n’ont pu présenter devant des situations, somme toutes naturelles. Nos responsables ne sont plus ce qu’ils étaient avant. D’abord, ceux d’aujourd’hui, par rapport à ceux d’hier, sont recrutés dans le moule des «petits» et quelquefois des «larbins». Ensuite, ils ne font rien pour se faire aimer de la part des jeunes à cause de leurs comportements et de leurs pratiques qui sont loin d’être des modèles de références. Les jeunes gens, comme disait Henry de Montherlant, n’ont pas besoin de maîtres à penser, mais de maîtres à se conduire.
Là, dans cet acte qui se joue uniquement avec les jeunes et où se déploie la contestation, les autres…, les bouseux et les mafieux assistent, éberlués, médusés et comme surpris par la force de cette jeune génération qui a le verbe clair et qui a l’audace pour le développer. Quelqu’un parmi ceux-là, trouve soudainement un brin de courage pour intervenir. Il voulait se mettre du côté des jeunes qui, pendant un bon moment, ont démontré leur talent devant une assistance qui n’espérait jamais assister à un tel procès. Il va directement vers celui où tous les jeux machiavéliques s’exécutent en son nom. Il pointe ce doigt accusateur vers l’État, le souffre-douleur de tout le monde. – Que fait l’État, dans des situations pareilles, dit-il avec l’assurance de cet homme gavé et insolent ? N’est-ce pas lui le responsable de tous nos malheurs ? N’est-ce pas lui qui nous a habitué à ne pas travailler, en nous gavant de «social» et d’«attention» et de «sollicitude» complaisante et démagogique ? L’artiste ne s’embarrassant d’aucun complexe, regarde fixement l’intervenant, même tristement, et, dans une mécanique d’acteur éprouvé, lui assène des propos qu’il ne pensait jamais entendre. Remarquez l’artiste a été, depuis le début de ce rêve, quelque peu allergique à ceux qui pointent le doigt accusateur sur l’État. Il a raison, puisque l’État est la grande institution qui subit, elle aussi, le diktat de ces hommes fourbes, incompétents et souvent indélicats qui sont appelés par euphémisme politico-administratif «Dirigeants ou Responsables». – Eh bien, l’État a bon dos, mon cher. Il accepte tout au nom des nervis qui le martyrisent. Mais malgré cela, cet État, comme le proclamait un grand chef, avant de vous demander quoi que ce soit dans le cadre de vos devoirs envers le pays, «vous assure que sa priorité est orientée vers l’option de la réalisation de la paix civile et la réconciliation nationale en tant que base fondamentale de l’édification d’une société stable, réconciliée avec elle-même». En lui lançant ces propos, l’artiste voulait en découdre avec les critiques et les analyses des actes précédents.
Il voulait en finir une fois pour toute et plonger les spectateurs, surtout les jeunes, dans une ambiance d’espoir et de confiance en un avenir qui ne sera que radieux, prospère et tout en constance et dévouement. De toute façon, la pièce doit prendre fin, le rêve aussi. Et il serait incomplet – le rêve, bien sûr – s’il se termine sur une note pessimiste. D’ailleurs sans cela, qui parmi nous, même s’il n’est pas dans un rêve, ne souhaite voir constamment ses projets se terminer dans l’aisance et la bonne réussite ? Mais ce rêve est un peu particulier. Il charrie tout, du bon et du mauvais, pour arriver enfin à nous éclairer sur ce que nous sommes et ce que nous devons être. C’est alors qu’avant tout cela, il est indispensable d’arrêter certaines critiques malintentionnées de gens venimeux qui trouvent constamment du plaisir pour « enfoncer » le clou et porter préjudice au pays. Et l’artiste continue : – Il faut revenir un peu à l’évidence, pour dire clairement que l’État a beaucoup fait pour vous, pour ce pays qui ne trouve pas aujourd’hui beaucoup d’avocats pour le défendre. En un mot, il faut être convaincu que notre État a été l’un des rares, dans la région et même au-delà, qui s’est le plus sacrifié pour la prospérité de son peuple, pour son évolution et son émancipation. « L’âge d’or » de notre pays n’est pas une vue de l’esprit, mais une réalité qui a produit ses effets sur le terrain. Nous n’en voulons pour preuves que des millions d’élèves bénéficiant de l’instruction dans des milliers d’établissements scolaires ainsi que de nombreuses et gigantesques réalisations démontrant toute la sollicitude d’un pouvoir qui se voulait tout près de son peuple. C’est vrai que nous avons fait le procès de quelques responsables, que nous avons critiqué des situations déplorables, que nous avons condamné des positions pénibles et regrettables, tout cela, dans un langage des plus acerbes ; mais nous n’avons, cependant, jamais montré cette haine contre notre pays et encore moins contre ses dirigeants.

Le rêve exige de nous de dire la vérité et d’aller même au-delà de la vérité. Nous l’avons fait dans les limites de la correction et de la fidélité aux principes de Novembre. Continuons-le dans les mêmes dispositions et avec les mêmes sentiments… Eh bien, les jeunes, l’État, c’est quoi ? C’est une multitude de structures, d’institutions et de programmes. Quant aux hommes qui le composent, ils sont ce que nous sommes, ils peuvent se tromper comme tous les autres hommes, disait le poète. Ainsi, malgré toutes les contraintes, cet État que nous critiquons et défendons, à la fois, parce qu’il nous appartient et parce que c’est à nous de rectifier sa gouvernance, est en train, disait un chef, et nous sommes obligés de le croire, «de nous créer les conditions de performance en matière de développement économique et social, d’améliorer les conditions de notre vie et de parachever les projets qu’il a entamés et qui ont certes réalisé un certain essor dont il est assurément fier». «Aussi, continuait-il, devons-nous être conscients que la bataille de l’avenir, l’entrée dans le marché mondial, la réalisation de la prospérité sociale et la protection de l’économie nationale, ne se réalisent qu’avec une mentalité nouvelle et des idées modernes, adaptées à l’ère d’aujourd’hui… L’enjeu est grand pour nous, notamment pour les jeunes à qui incombe la responsabilité de mener le pays à la stabilité.» Là, un jeune, élégant, d’allure sportive, lève la main comme dans un sénat. Il demande la parole d’une voix solennelle, il ne la prend pas comme certains qui l’ont pratiquement ravie à l’artiste. Et il soumet à l’assistance, dans un langage simple, clair, quelques propositions qu’il pense utiles.
C’est ainsi qu’il voit sa participation à ce spectacle, très particulier. – J’ai suivi toutes les interventions, dit-il. Je les ai toutes appréciées pour ce qu’elles comportent comme richesses pour notre information. Ne dit-on pas que le théâtre est une grande école de formation des hommes ? Ainsi, mon intervention se situe dans ce cadre, précisément, dans le cadre d’une contribution à l’amélioration de notre situation économique, sociale et culturelle. Nous avons abordé des sujets brûlants de notre actualité, nous les avons passé en revue, nous les avons examinés, évalués, sans donner de solution. Est-ce possible de ne pas parler de remède lorsque nous connaissons notre maladie ? Ainsi, je me décide, puisque vous m’avez donné la parole, de faire quelques propositions dans les domaines qui nous tourmentent le plus. Tout cela, bien sûr, m’a été commandé par le fait que nous sommes une population jeune, riche de par ses potentialités, riche de par ses convictions et ses espoirs, riche enfin de par son passé, depuis les profondeurs de l’Histoire jusqu’à la glorieuse révolution de Novembre. Mon choix concernant cette tranche d’âges me renvoie à cette période où se négocie le passage de l’adolescence à l’âge adulte, des études et de l’apprentissage à la vie active, de la liberté de rêver à la confrontation avec le réel, autrement dit, la transition de tous les risques où tout se joue, tout se dessine et quasiment se décide. Ma première préoccupation est le monde de la culture, un monde aussi important qu’indispensable. Un vaste monde, sans conteste, qui nécessite d’énormes sacrifices pour sa diversité et sa sensibilité. Il faut que les mots d’ordre des gens de la culture, considéré longtemps comme le maillon faible de la chaîne de développement du pays soient, comme prévu par les responsables de ce même secteur : restructurer l’identité nationale, réanimer et redynamiser l’action culturelle…
Il faut que notre pays s’achemine légitimement vers une ère nouvelle marquée par des mutations sur différents plans où les notions telles que «développement durable» et «société du savoir et de la culture» prennent un sens particulier et déterminent les perspectives d’avenir. La culture est le garant de notre patrimoine et de notre mémoire. Il faut décider d’un programme salvateur pour ce secteur ! Il faut réactiver les chantiers à l’arrêt et les mener à terme, il faut redynamiser et parachever les programmes en cours, initier des actions nouvelles et développer des projets nouveaux afin de résorber les déséquilibres régionaux. Ce programme ne peut être appuyé que par la création d’édifices culturels, l’acquisition et le renouvellement des équipements, l’aménagement et la rénovation des infrastructures culturelles, l’étude de restauration et plans de protection des sites historiques et archéologiques, la création de musées pluridisciplinaires, de centres spécialisés dans la restauration du patrimoine et la photographie d’art ainsi que des théâtres de plein air. Tout un programme, vraiment ! Un programme qui permettrait au pays de changer radicalement en allant chercher sa transformation et son évolution dans les sphères de la modernisation et du progrès, par le travail assidu et concret, par l’engagement sans limite et par le sacrifice honnête et sincère. Pour cela, il faut des hommes, ceux qui répondent aux critères de probité et de compétence.

Le pays n’a plus besoin de médiocres, de charlatans, de saltimbanques, de danseurs de foires et de laudateurs invétérés qui ont contribué à sa dilapidation et à ternir son image de marque. Dans ce riche programme, il serait indispensable de veiller à la justice, pas en tant qu’institution, qui est en train de se réformer elle aussi, mais en tant que théorie dans son approche de l’équité, de la rectitude, de la droiture, de la loyauté, de la confiance, de l’exactitude et du respect de l’être humain… Les jeunes, vous qui m’écoutez, vous avez tellement besoin de cette justice qui vous ouvrira les portes de l’égalité des chances et, tout simplement, les portes de la compétition noble et honnête. Il ne sera plus question de favoritisme, il ne sera plus question de «hogra», il ne sera plus question de choix biscornus qui alimentent les rancœurs et poussent à la démobilisation. Ainsi, demain, le meilleur critère de sélection pour nos cadres et nos élites ne sera pas le lieu de naissance, la responsabilité du papa et/ou son influence ou l’appartenance à un groupe de pression, mais leur savoir et leur apport à la dynamique de développement national. Demain, l’intellectuel, ne sera pas remplacé par un minable « chiffonnier », et encore moins, il ne sera pas «appelé à d’autres fonctions», c’est-à-dire chassé, par un sinistre «obligé», structuré dans le cercle des corvéables et malléables à merci. Demain, on ne criera pas, profondément déçus : de «Charybde en Sylla !», lorsque les dirigeants nous annonceront des changements qu’ils considèrent «mûrement réfléchis».
Demain, notre pays retrouvera ses couleurs et ses enfants, les authentiques, ceux qui se mobiliseront dans un climat de justice, la vraie, et se sacrifieront pour relever tous les défis, pas pour profiter des largesses du système et se créer des situations de rente, comme l’a fait une certaine progéniture de responsables qui a généré des scandales et souillé l’atmosphère. Demain, Dieu nous comptera parmi ses meilleurs élus parce qu’au moins nous aurons appliqué ce qu’il nous a prescrit. Demain, enfin, nous serons ces civilisés qui n’auront rien à envier aux autres, de par le monde, ces autres qui travaillent pour des intérêts communs, en tout cas qui vivent en producteurs, rentables et bénéficiaires, et soucieux de l’évolution et de la prospérité de leur pays. Pour ce qui est de la lutte contre la corruption, la délinquance, le banditisme et autres fléaux – une lutte qui doit marcher de pair avec le développement – je dois vous dire ce qu’a dit l’un des grands chefs dans son discours. J’ai trouvé qu’il avait raison. L’État, vous a-t-il affirmé, insiste pour que tout doit être tranché en s’appuyant sur la justice pour faire respecter la loi par tous et en toutes circonstances, qu’il s’agisse du crime, de la contrebande, de la corruption, qu’il s’agisse de la violence et de l’anarchie, ou qu’il s’agisse de la prise en otage des droits de citoyens par l’usage abusif de la revendication.
L’enjeu est l’affirmation de la loi contre les pratiques mafieuses qui saignent l’économie nationale, contre les réseaux du crime qui déversent la drogue sur notre jeunesse et contre tous les maux sociaux et crimes qui agressent notre société et nos citoyens… L’État de droit se traduit, à la fois par du civisme cultivé par chacun et la revendication des droits mais aussi par la prise en charge des devoirs. «Ainsi, il faut consolider le front anticorruption dans notre pays. Ce front qui se traduit par la mise en place d’une loi, représente, à coup sûr, une étape décisive dans la mise à jour d’une législation en matière de lutte contre un délit qui a pris des proportions alarmantes dans le pays. Les dispositions répressives et dissuasives que contient cette loi indiquent que les législateurs qui l’ont rédigée ont tenu compte de la gravité de ce phénomène.
(A suivre) 
Par Kamel Bouchama (auteur)