Une des sombres pages de la présence coloniale française

Le centre de torture de Touggourt

Le centre de détention et de torture de Touggourt, une des quelque 200 structures de ce type érigées par le colonialisme français pour étouffer la Guerre de libération nationale, constitue un témoin matériel de l’une des sombres pages de la présence coloniale française et de ses atrocités perpétrées contre un peuple en quête de recouvrer sa liberté et sa souveraineté.

Erigé en 1957 au cœur de la ville de Touggourt, ce camp de détention et de torture, dressé comme dispositif opérationnel de protection par le colonialisme français et doté de salles de détention et de tortures, d’un dépôt d’armement et de sept geôles individuelles, a été mis sous la supervision d’une brigade opérationnelle coloniale composée de parachutistes. Cette dernière a été créée après l’arrivée du général Charles de Gaulle dans la région pour intensifier la répression contre les révolutionnaires de l’Armée de libération nationale (ALN) et des Algériens en général, selon de nombreux témoignages. Ayant eu pour but de repérer les moudjahidine de l’organisation politique et administrative du Front de libération nationale et de l’isoler par la coupure des liaisons entre civils et militaires algériens, le centre de torture fut une autre forme de pratiques répressives coloniales usant, selon les priorités accordées, de toutes le méthodes d’exaction, plus atroces les unes que les autres, pour soustraire des informations des détenus sur l’organisation de la Guerre de libération nationale et les mouvements des moudjahidine, avant de procéder à leur exécution.
Selon des sources historiques, la bravoure indéniable dont ont fait preuve les Moudjahidine contre l’occupant français, a poussé ce dernier à perdre son contrôle et recourir à diverses méthodes de tortures inhumaines afin de semer la crainte parmi les Algériens, de les faire plier et les amener à renoncer aux actions révolutionnaires et militaires leur permettant d’arracher leur liberté et leur souveraineté. Cette structure coloniale à Touggourt accueillait des détenus, des citoyens suspectés de soutenir la Révolution, issus des différentes régions de Oued-Righ et de Taibet, dans le Grand Touggourt, pour leur faire subir d’abominables actes de torture par les forces coloniales.
Parmi les exactions, les tortionnaires recourraient à des méthodes inhumaines d’interrogatoire, dont la gégène dans des parties sensibles du corps, les supplices de l’eau sale, l’enfoncement de clous dans les mains et les pieds, et d’autres formules atroces employées de manière systématique sur la victime dévêtue, telle que l’attaque au chien, la suspension de la victime en l’air par les pieds, l’arrachage des ongles, outre d’autres méthodes touchant à la dignité humaine, d’après divers témoignages de Moudjahidine. Parmi ces rappels historiques, ceux du directeur du musée du Moudjahid de Touggourt inspirés de témoignages du défunt Moudjahid Mouldi Benhamida, un des détenus de ce centre de torture dont le premier Chahid fut Ahmed Tinamri Boulifa, exécuté le16 octobre 1957 après avoir enduré tortures et supplices.

Réhabilitation de la structure pour son aménagement en musée
Par souci de préservation de la mémoire nationale et la transmission du message des chouhada aux générations futures, les autorités locales ont procédé, depuis plusieurs années, à la récupération de ce site historique auprès de ses véritables propriétaires qui s’étaient réappropriés, à l’indépendance, le site. Les autorités locales ont ainsi procédé en 2005 et 2006, à la faveur d’un financement sur budget de la wilaya, à la restauration du site, notamment les geôles, les salles de torture et l’aménagement du préau, a expliqué le directeur du Musée du Moudjahid de Touggourt, Nabil Ramdane. Le secrétaire général de l’Assemblée populaire communale (APC) de Touggourt, Lamine Bertima, a indiqué que le site a bénéficié d’une étude technique visant sa restauration, l’aménagement de son accès principal donnant sur l’artère principale de la ville de Touggourt et la réalisation d’une stèle commémorative susceptible de conférer la dimension historique à ce centre et d’en faire un musée et un témoin historique sur les exactions et les actes abominables perpétrés par le colonialisme français à l’encontre du peuple algérien.
R. R.