Une réécriture des contes

Littérature jeunesse

Ce que nous vous rapportons, c’est une version adaptée au monde moderne de chaque conte populaire, sous prétexte que le public enfant a changé d’hier à aujourd’hui.

Un travail de remise en forme des contes anciens, organisé par un groupe de professeurs universitaires pour leur donner un coup de jeune qui les rendront plus passionnants pour les enfants d’aujourd’hui. Ce travail de simplification s’est fait chez nous pour des romans de Mammeri, Dib, pour donner l’envie de lire à une jeunesse qui se trouve en net décalage avec les vétérans de la littérature algérienne. Vicenta Hernandez Avarez, faisant partie d’une équipe pédagogique chargée de la réécriture de ce genre narratif de type factif, nous fait part d’une expérience qui mérite d’être retenue.

A l’image de Vava Inouva, Le Petit Chaperon rouge…
La ressemblance est frappante, bien que la version chantée soit élaguée pour les besoins d’une voix d’un genre musical. On considère que le conte donne à voir des images d’une société à une époque donnée de son histoire, celle au cours de laquelle un producteur s’est mis à composer le conte en s’inspirant de son milieu socioculturel. Donner à lire un texte, c’est-à-dire une histoire fictive qui remonte au temps des grands-parents, ne serait peut- être pas convenable. Le Petit Chaperon rouge, traduit dans toutes les langues après avoir été soigneusement écrit par Ch. Perrault, focalise tous les regards sur un personnage féminin, une petite fille éponyme du conte qui va à l’aventure à travers un bois pour finir comme victime innocente d’un loup qu’elle avait eu l’imprudence de rencontrer sur son chemin pour avoir trop traîné. Sa mère lui avait pourtant donné la consigne d’aller tout droit chez sa grand-mère impotente pour lui porter un couffin renfermant des victuailles. Ce conte de Perrault, qui nous fait remonter loin dans le passé, nous permet de découvrir une société archaïque dont les personnages sont différents de ceux d’aujourd’hui.
La grand-mère ne vit pas de sa pension de vieillesse ou d’une retraite, elle est à la merci de sa fille mariée et de laquelle elle attend chaque jour un couffin. La maman est esclave des tâches ménagères et a des devoirs sacrés. Quant au père, il a toujours son statut de privilégié comme élément protecteur. «Les contes, témoignage d’une époque, des formes de vie de la collectivité, signalent aussi qu’elle est l’échelle des valeurs, quels sont les problèmes majeurs d’une société et son intérêt à les faire connaître et partager par les nouvelles générations. Les contes constituent une partie des contenus des savoirs, objet de l’enseignement. Leur utilisation pédagogique, avouée ou non, a été une constante tout au long de l’histoire», note Hernandez Alvarez dans son étude des contes et sa conception futuriste. Les femmes d’aujourd’hui en nette contradiction avec celles de l’ancien temps. Beaucoup de femmes châtiées ou tuées pour avoir osé parler ou connaître la vérité comme dans Barbe bleue ou Cendrillon ont été empêchées de s’épanouir. Au XXIe siècle, on trouve des grands-mères pharmaciennes, ingénieurs…
La femme est devenue professeur, quant à la jeune fille, elle ne rêve plus du prince charmant, mais d’études fructueuses qui la libèrent des contraintes infériorisantes ou avilissantes avant d’envisager le mariage. Etant donné les capacités qu’a un conte de transmettre des idéologies, une culture, des traditions, un état d’esprit, il y a intérêt à revoir son contenu pour ne pas continuer à véhiculer les archaïsmes, les mentalités rétrogrades des temps anciens. On travaille pour le renouveau du conte. Tel est l’objectif des Etudes réunies de Catherine d’Humières au sein d’une équipe universitaire. Dans les récits actuels, il y a des personnages choisis pour incarner le modernisme avec tout ce que cela implique comme corollaires. Les aînés transmettent des valeurs en rapport avec l’actualité, les nouveaux lieux communs et les stéréotypes. Les rôles attribués aux adultes ne sont plus les mêmes, ils sont détenteurs du pouvoir et non pas du savoir. Les stratégies changent également dans les contes modernes, particulièrement ceux des animaux.
Abed Boumediene