L’Etat refuse catégoriquement le recours à l’endettement extérieur et à la planche à billets

Lancement des réformes globales des finances publiques

La question relative à l’éventualité du recours de l’Etat à l’endettement extérieur pour financer certains projets stratégiques suscite le débat parmi les experts et les spécialistes financiers, qui craignent, en raison des derniers chocs violents traversés par l’Algérie tant sur le plan politico-économique qu’au niveau des déficits cumulés, la sollicitation à nouveau par les autorités les services des Institutions de Bretton woods.

Une option ou alternative financière que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a, d’emblée, écartée de ses choix politiques, en plaidant pour une économie nationale indépendante et diversifiée. Même position exprimée concernant l’éventuel retour à l’actionnement de la planche à billets pour couvrir le déficit du Trésor public et celui des entreprises publiques. L’Etat campe toujours sur sa position et tente de trouver une nouvelle trajectoire économique afin de contenir l’effondrement accéléré de tous les indices de la gouvernance économique causé par la crise sanitaire et pétrolière inédites. En réponse à certaines déclarations d’experts et politiques sur le recours, inéluctable, de l’Etat au financement international et aux services du Fonds monétaire international pour traverser cette crise, le ministre des Finances, M. Aymane Benabderrahmane, fraîchement installé à la tête de ce département a réitéré la position de l’Etat à l’égard de ces deux questions.
Il a réaffirmé, hier, en marge d’une Journée d’études portant sur «la mise en œuvre de la réforme budgétaire», «la volonté de l’Etat de ne recourir ni à l’endettement extérieur ni à la planche à billet. Le gouvernement possède des marges que nous allons exploiter sans lésiner sur aucun moyen pour faire face aux besoins budgétaires de l’Etat». Il a apporté certains éclaircissements sur certains points financiers relatifs à la nouvelle politique budgétaire de l’Etat. Pourtant, la situation financière du pays est «inconfortable» et les déficits cumulés en témoignent de la vulnérabilité économique du pays qui fait face à une crise économique virulente, plombée par la double crise sanitaire et pétrolière. Le déclin économique inquiète de plus en plus, et risque de s’aggraver d’ici la fin de l’année 2020 avec des prévisions d’un recul important du PIB, selon la Banque mondiale qui s’attend à un recul de la croissance et à une inflation galopante.
Cela a un coût en termes de la dette intérieure qui ne cesse d’augmenter à cause de la création monétaire qui a atteint plus de 65.000 milliards de dinars en deux ans et la baisse de la fiscalité pétrolière budgétisée estimée à 2.200,3 milliards de dinars par rapport à ce qui a été planifié dans la loi de Finance 2020. Quant au déficit commercial et budgétaire qui ne cessent de s’amenuiser en raison de la hausse des dépenses publiques injectées dans la prise en charge de la crise sanitaire et sociale des Algériens. Il y a, par conséquent, une pression réelle sur le Budget de l’Etat qui supporte toutes les retombées de la situation économique du pays, malgré ce constat, les pouvoirs publics insistent sur la mobilisation des ressources internes et l’accélération de la mise en œuvre de la nouvelle politique économique et financière pour surmonter cette épreuve.
A commencer par se libérer de la rente pétrolière et soutenir les énergies renouvelables, mais surtout assainir le secteur économique des pratiques malsaines, sombres et infructueuses à l’intérêt public. Encourageant la dilapidation des deniers publics, la gangrène de l’informelle et la monopolisation du marché économique par des les différents lobbyings. Redynamiser le secteur industriel et relancer les réformes socio-économiques pour instaurer un nouveau modèle économique. Pour rappel, l’Algérie a déjà vécu une expérience périlleuse durant les années 80 avec les Institutions de Bretton woods dont les séquelles sont encore visibles, aujourd’hui. La population n’a pas bénéficié, en effet, de l’expansion de l’activité économique internationale, bien au contraire, elle était la victime des mesures d’assainissement financier et d’une mauvaise gouvernance des anciens dirigeants.
Le pays a stagné et les autorités misent, à priori, sur la nouvelle politique économique optimale et sur les réformes de tous les secteurs stratégiques en comptant sur son capital humain et naturel pour briser les chaînes de la dépendance. C’est d’ailleurs l’objet de la journée d’études, à laquelle a pris part le ministre de la tutelle qui a évoqué «le début de réforme globale des finances publiques afin d’instaurer plus de transparence et donner plus de diligence aux responsables des différents responsables ministériels et des organismes publics à l’effet de préparer leurs budgets sur un objectif triennal», ajoutant que «cela permettra aux gestionnaires de maîtriser les flux budgétaires et à l’Etat de se projeter sur des espaces temporels plus conséquents, notamment pour éviter d’être pris au dépourvu, et éviter ainsi de dévier des objectifs initiaux ainsi que les réévaluations budgétaires qui ont impacté négativement le budget de l’Etat dans le passé».
Samira Takharboucht