La France doit faire «un autre pas»

Le président Tebboune à «France 24» :

Dans une interview accordée à la chaîne de télévision française «France 24», le Président Abdelmadjid Tebboune a fait connaître la position de l’Algérie sur les questions d’actualité, notamment celles ayant trait aux relations avec la France. Il a rappelé qu’entre l’Algérie et la France, «les contacts n’ont jamais été rompus depuis 1962», relevant que «les deux pays sont passés quelque fois à des relations d’un niveau supérieur, alors que parfois il y a eu du froid dans des relations compliquées, passionnelles et passionnées».

«Avec le Président Emmanuel Macron, nous devons, sans aucune animosité, sans haine et dans le respect le plus total des deux Etats, affronter le problème de la Mémoire qui hypothèque beaucoup de choses dans les relations entre les deux pays», a indiqué le Président Tebboune. Il a souligné que «le Président Macron a eu le courage de dire que la colonisation était presque un crime contre l’humanité, ce que d’autres n’ont pas dit», estimant à ce propos que «l’Algérie a déjà reçu des demi-excuses» de la part d’Emmanuel Macron. Enchaînant sur le rapatriement des crânes des résistants algériens contre la France coloniale, le Président Tebboune a fait savoir que M. Macron a été «très réceptif et compréhensif à la demande algérienne», soulignant que «ce rapatriement était une nécessité pour l’Algérie qui accorde une grande importance à la question de la Mémoire». Pour le Président, il s’agit à présent de «faire un autre pas» dans le sens de l’apaisement, d’autant plus qu’en France «on parle de ‘’massacres’’ du 8 mai 1945 en Algérie, ce qui était prohibée auparavant». A une question de voir Emmanuel Macron et la France présenter des excuses au peuple algérien, M. Tebboune a rétorqué : «Nous le souhaitons, car cela va permettre d’apaiser le climat et le rendre plus serein pour des relations économiques, politiques, culturelles et de voisinage» plus sereines. «Avec le Président Macron, nous pouvons aller loin dans l’apaisement et le règlement du problème de la Mémoire. C’est un Président très honnête, sincère et très propre du point de vue historique. Il veut apaiser la situation et permettre à nos relations de retrouver leur niveau naturel», a-t-il souligné. Pour ce qui est d’une éventuelle visite à Paris ou celle du Président Macron à Alger, le président de la République a indiqué que cela n’est pas exclu, précisant qu’il en a déjà discuté avec son homologue français. Le Président Tebboune a abordé également la situation interne du pays. Concernant la révision constitutionnelle, il a annoncé un référendum à la rentrée sociale, soit vers septembre ou octobre «si la pandémie du coronavirus s’atténue». A une question sur le type de régime qui sera adopté, le Président de la République a indiqué que ce sera «un régime semi-présidentiel qui donnera énormément d’autorité aux élus». «On est aussi en train de mettre des verrous qui interdiront à l’avenir tout glissement vers le pouvoir personnel», a-t-il dit. Sur la question relative à la libération ou la grâce des «personnalités du Hirak», M. Tebboune a affirmé qu’il exercera «en tant que Président ses prérogatives constitutionnelles de grâce chaque fois que cela est nécessaire». A une question de voir l’ex-président de la République Abdelaziz Bouteflika jugé par la justice dans les procès actuels, le Président Tebboune a estimé que «la justice s’est prononcée» à ce sujet. S’agissant du 5e mandat avorté de l’ex-Président Bouteflika, il a également tenu à lever l’équivoque en affirmant : «Je n’ai jamais été favorable au 5e mandat». J’ai trouvé que le 5e mandat était aberrant car j’avais approché (l’ex-Président) quand j’étais Premier ministre et il n’avait plus la parole. Il n’a pas demandé mon avis (sur le 5e mandat), j’étais exclu», a-t-il commenté. Abordant le volet économique, le Président Tebboune a fait savoir que l’Algérie «préfère éviter le FMI» car c’est «un pays social où les transferts sociaux se font avec des sommes énormes». S’agissant de la crise libyenne, il a réaffirmé «la nécessité de parvenir à un cessez-le-feu qui permettra la reconstruction de l’Etat libyen sur des bases de légitimité populaire, au risque de voir transposer en Libye le schéma syrien». Sur les relations algéro-marocaines, «jusqu’à présent l’escalade a été verbale et j’espère qu’elle va s’arrêter», a-t-il déclaré. Enfin, le président de la République n’exclue pas un durcissement du confinement, si la Commission scientifique chargée du suivi de l’évolution du coronavirus le recommanderait.
Lakhdar A.