Boubaghla et Fadhma N’soumer, symboles de bravoure

Résistance populaire au colonialisme en Kabylie

La résistance populaire à l’occupation française en Kabylie, a été marquée par la bravoure et l’ingéniosité de ses initiateurs, auxquels elle est souvent attribuée, à organiser les populations aux moyens rudimentaires contre une armée régulière, supérieure en nombre et en armes.

C’est le cas, entre autres, de Mohamed Lemdjad Ben Abdelmalek, communément appelé Cherif Boubaghla et de Lalla Fatma N’soumer qui organisèrent la résistance à l’armée d’occupation et porté des coups à l’armée d’occupation commandée par de sinistres officiers tels que le gouverneur-général Marshall Randon, Mac Mahon, le capitaine Pichot ou le général Pelissier. Boubaghla, venu du Sud-Ouest du pays, vers 1849, pour s’installer à Sor El Ghozlane dans l’actuelle wilaya de Bouira, qu’il ne tardera pas à quitter pour la Kabylie toute proche, connue pour l’attachement de ses populations à leur terre, pour poser pied à la Kalaâ des Beni Abbès puis à Beni Mlikech, dans l’actuelle wilaya de Béjaïa, dont il fera la base arrière de sa résistance. Assuré de la détermination des tribus locales à défendre leurs territoires contre l’occupant, Boubaghla entama des préparatifs en recrutant et structurant une armée et en identifiant les principaux objectifs à atteindre, pour ensuite lancer plusieurs attaques contre l’armée d’occupation et ses collaborateurs locaux. En mars 1851, il lança sa première attaque à l’Azib, dans la région d’Akbou, contre le bachagha Ben Ali Cherif, grand propriétaire terrien et collaborateur de la France et multiplia ses attaques contre plusieurs centres français à travers toute la région. Attaque après attaque, son armée acquiert une réputation et incite beaucoup de tribus à se joindre à elle, et envoya des messagers dans différentes régions du pays, pour étendre sa révolte. Les autorités françaises, inquiètes de l’ampleur prise par cette résistance, avaient alors concentré leurs forces à la décimer et recrutèrent des forces importantes sous les ordres d’officiers et de généraux tels que Dorel, Blange, Bobbrit, Busky Dubrotal et Camus. En 1853, il dû quitter Beni Mlikech et traverser le Djurdjura vers le Nord pour s’installer dans le versant Sud de l’actuelle wilaya de Tizi-Ouzou où il a établi son quartier général d’où il planifiât ses attaques contre l’armée d’occupation. Ayant fait jonction avec la résistante du Djurdjura, Lalla Fatma N’Soumeur, et profitant de l’engagement des troupes françaises dans la guerre de Crimée, Boubaghla intensifia ses attaques tout en incitant les tribus de la région à la révolte et à se joindre à sa cause à laquelle il réussit à rallier les Ath Djennad et Ath Idjeur. Face à cette montée de la résistance, le gouverneur de la région d’Azzaga, le général Randon avait monté une expédition à la mi-1854 pour châtier et mater ces tribus révoltées. Boubaghla est alors blessé lors d’un combat et retourne à Beni Mlikech d’où il relance son action de résistance. En décembre 1854, Mohamed Lemdjad Ben Abdelmalek meurt en martyr, décapité. Sa tête fut exposée par l’armée d’occupation en trophée sur un poteau en plein centre de la ville de Bordj-Bou-Arréridj pour ensuite atterrir au musée de l’Homme à Paris. Fatma N’Soumer, où la résistance au féminin Fille d’un chef d’école coranique de la zaouïa Rahmaniya dans l’actuelle commune d’Abi Youcef au Sud-est de Tizi-Ouzou, Fatma N’Soumer, forte de sa lignée et de l’influence qu’elle lui procurait, a réussi à s’imposer comme une figure de la résistance et rallier à sa cause hommes et femmes. Dès 1849, elle était entrée en résistance en ralliant Si Mohammed El-Hachemi et apporte son soutien au soulèvement de Boubaghla. En juin et juillet 1854, à la tête d’une armée d’homme et de femmes, elle remporte sa première bataille face aux forces françaises, estimées à quelque 13 000 hommes, à Tazrouts, près de Aïn El Hammam, les forçant à se retirer de la région. Après l’occupation des Aït Iraten en 1857, suite à la bataille d’Icheriden, elle forme un noyau de résistance dans le hameau Takhlijt Aït Aatsou à Illilten, mais fut arrêtée en juillet de la même année et demeura prisonnière jusqu’à sa mort en 1863.
R. C.