Les souks anarchiques clochardisent les quartiers résidentiels

Les souks informels se multiplient à Annaba

Or, les charrettes des fruits et de légumes sont revenues à El Bouni, 11-Décembre 60, La cité des Allemands, Pont blanc et autres lieux résidentiels. Dans la cité 8-Mai 45, l’on recense plusieurs cas contaminés dont un marchand de pastèques qui est décédé de cette maladie. Les nouveaux espaces de commerce notamment les souks arabes et marchés populaires du chef-lieu de la wilaya sont actuellement en train de changer de look sous un autre aspect d’anarchie en défigurant le vrai visage de la ville qui était dans le passé la belle coquette de l’Est de l’Algérie.

La ligne tracée par l’Etat pour éradiquer définitivement les marchés informels a fait surgir des résultats non satisfaisants devant la grande pauvreté qui frappe la population algérienne. Or, la direction de la régulation et de l’organisation des activités commerciales auprès du ministère du Commerce indique 1 050 marchés informels éradiqués sur plus de 1 453 lieux enregistrés en 2012. On compte soit 216 marchés qui ont fait leur réapparition juste après leur déracinement et plus de 403 endroits restent d’ores et déjà en attente d’éradication. Une enveloppe de 12 milliards de DA a été réservée pour la réalisation de 784 marchés de proximité relevant du ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales. Il a été réceptionné 670 marchés de proximité sur 784 lieux prévus dans le programme tracé du ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales.

Beaucoup reste à faire pour rendre le paysage commercial plus moderne, satisfaisant et adéquat à l’intérieur de nos villes et régions. A ce sujet, il est indispensable de signaler que la grande distribution dans le pays compte 12 hypermarchés et 244 supermarchés seulement, un nombre généralement trop insuffisant pour une population qui dépasse les 40 millions d’habitants, informe-t-on. Selon toute vraisemblance, il faut réellement voir pour croire, au niveau de ces espaces perdus, là où une bonne partie de la population classée pauvre majoritairement arrive en tout état de cause à trouver ses comptes particulièrement à la recherche d’un exotisme local et à des prix cléments. Quoi qu’il en soit l’émergence de ces nouveaux espaces de commerce est en train, selon toute évidence, de s’élargir en prenant des proportions alarmantes et dénaturant ainsi le paysage de la ville. En effet, avant les souks Ed lala les plus fréquentés et les plus connus par la population annabie étaient ceux de la Place d’armes et d’El Hattab, connus sous l’appellation d’El Marssis, qui ouvrent quotidiennement à partir de 7 heures du matin pour fermer à 18 heures. Dans ce cadre, l’on constate que bon nombre de gens venant des quatre coins de la wilaya se réunissent dans ces endroits précis chaque jour pour faire le tour du souk sans se lasser dans le seul but de chercher une bonne affaire ou une bonne occasion, à moitié prix et moins chère qu’ailleurs. Or, ici tout se vend et cela oblige une certaine catégorie de personnes habituées à première vue à faire à chaque fois une tournée pour saisir une excellente affaire. Par ailleurs, sur un bout de toile de cirée ou carrément sur un morceau de journal, la marchandise est exposée. A titre d’exemple : de vieilles chaussures, des postes radios d’un autre âge, de vieux lustres, des pièces de rechange indescriptibles et plusieurs autres objets sont étalés également sur le sol.

A ce sujet, il faut relever que la clientèle à première vue semble sûre de ce qu’elle cherche, ils farfouillent et auscultent de prés la marchandise existante. Une fois ce rituel achevé, ils demandent alors le prix de telle ou telle autre chose : «Ya khouya, lance-t-on des fois, on veut surtout savoir l’origine de l’objet. Cet objet tu l’as acheté et d’où vient-il ?» Diverses questions qu’on se pose un peu partout dans ces souks où des personnes victimes de cambriolage entament leurs premières investigations pour se voir parfois leurs objets dérobés parmi la marchandise à vendre. Quelques revendeurs interrogés sur leur présence nous ont fait savoir qu’ils viennent particulièrement à ces endroits pour tomber sur des occasions moins coûteuses : «Nous, nous sommes spécialisés dans la vente des vieux meubles, il vaut mieux acheter ici une table d’occasion à 1 700 DA que d’aller la chercher ailleurs pour le triple de son prix !» Il faut ajouter à cela que le marché aux puces représente un vrai pôle d’affaires privilégié. Et les commerces d’objets d’utilité comme l’électroménager, les vieux ordinateurs, les machines à écrire ou à coudre. On peut facilement se procurer chez de jeunes gens une vieille chemise de marque pour moins de 300 DA, le tout est de savoir surtout choisir et marchander. Devant cet état de faits qui est plus critique puisque le maître mot c’est la crise et la misère dans lesquelles vit une bonne partie de la population bônoise, les nécessiteux sont poussés à s’habiller de vieux vêtements, les moins chers possibles. Il convient d’indiquer que ces lieux sont fréquentés par des pickpockets qui n’hésiteront pas à passer à l’action. A noter en définitif que les souks d’Ed lala sont formés majoritairement de jeunes et moins jeunes qui s’investissent dans ce commerce où chacun peut vendre ce qui lui tombe sous la main pour gagner quelques sous pour survivre.

Les deux tiers des consommateurs algériens achètent au niveau des marchés informels. Les bas prix des produits proposés constitués essentiellement de produits importés (autour de 80%), sont le véritable facteur de la réussite de ces espaces dont le nombre global a atteint 1 500 marchés à l’échelle nationale. Ce phénomène génère beaucoup de transactions au détriment du trésor public. D’après nos estimations, l’Etat a perdu en 2009, plus de 250 milliards de DA en matière de recouvrement d’impôts. Le ministère du Commerce évalue ce chiffre à 55 milliards de DA. La Direction régionale du commerce (DRC) qui couvre les wilayas de Khenchela, Souk Ahras, Oum El Bouaghi, Tébessa, Skikda, El Tarf, Guelma et Annaba avait enregistré sept milliards de dinars en ventes et achats de marchandises sans facture. Soulignons enfin qu’il faut éviter de provoquer ces jeunes qui sont dans l’informel. Il faut réfléchir plus à trouver des solutions qu’à les réprimer, il faut communiquer avec eux. Souvent lorsqu’on leur demande pourquoi ne pas créer une petite entreprise, ils ignorent comment ouvrir une activité commerciale, en raison d’un manque de communication. Les pouvoirs publics dépensent certes beaucoup d’argent, mais ils communiquent très mal avec la société civile. A noter enfin que de l’autre côté d’El Hattab, il existe le marché de la friperie qui est pris par une autre catégorie d’individus qui se sont spécialisés dans la vente de vêtements d’occasion, ce marché comme celui de la cité plaine ouest notamment le deuxième lieu de la friperie à Annaba étant inondé de fringues de toutes sortes : jeans, pantalons, vestes, robes, chaussures et autres articles proposés à une certaine catégorie de clients.
Oki Faouzi