«Que tous les clubs-pro soient sur le même pied d’égalité»

Ali Fergani :

Dettes, reprise du championnat, professionnalisme… sont tant de sujets évoqués par l’ancien capitaine des Verts et président de l’Amicale des anciens internationaux de football, Ali Fergani. Fidèle à ses principes, il ne va pas par 36 chemins pour donner son avis…

La Nouvelle République : dix ans après l’avènement du professionnalisme, le ministre de la Jeunesse et des Sports, Sid Ali Khaldi, décide de dépoussiérer ce dossier. Quelle est votre première réaction, vous qui êtes parmi ceux qui militent pour l’application du professionnalisme ?  Ali Fergani : ma première réaction, concernant l’intervention du MJS, est qu’elle est logique, et je dirais même, indispensable, car il est anormal que 10 ans après l’instauration d’un soit disant «professionnalisme», nous soyons encore en deçà de l’amateurisme. Ceci dit, la tâche n’est pas du tout aisée, que ce soit pour la FAF ou le MJS, car il faudra prendre des décisions courageuses, qui peuvent aller jusqu’à la rétrogradation des clubs qui ne veulent pas ou ne peuvent pas se mettre en conformité avec les futures lois. Est-ce que la FAF en sera capable, ce n’est pas si sûr.   La FAF annonce que 23 clubs professionnels (sur 32) sont concernés par les dettes : 7 de Ligue 1 (soit 44%) et 16 de Ligue 2 (soit 100%). Quatorze clubs professionnels, dont trois issus de la Ligue 1, sont interdits de recrutement en vue de la saison 2020-2021, cela vous étonne ou pas ? Cela ne m’étonne pas du tout car nous savons tous que la majorité des clubs sont très mal gérés depuis longtemps déjà et qu’ils ont pris l’habitude de persévérer dans la médiocrité, sachant qu’ils ne risquent rien.
La DNCG vient d’être crée (alors qu’elle aurait dû être mise en place depuis 10 ans) et le constat fait est édifiant, car la grande majorité des clubs sont déficitaires. Depuis longtemps les présidents de clubs se sont sentis intouchables, et certains d’entre eux ont été installés pour faire des affaires au détriment de construire un club avec sa base d’entraînement qui est un outil indispensable pour la formation de joueurs locaux à chaque club. Mais cet éventuel projet, c’est le dernier de leur souci. Normalement après 10 ans de professionnalismes, tous les clubs devraient avoir leur base d’entraînement. A part le Paradou AC, aucun club ne l’a, c’est incroyable. Dans ce domaine, nous sommes les derniers de la classe, au niveau maghrébin, loin derrière l’ES Tunis, le WA Casablanca, le Ahly du Caire et même du Ahly de Tripoli. Ces clubs sont aussi nantis que des clubs européens, c’est peu dire, alors que le Doyen des clubs algériens, le MC Alger, si ce n’était l’ESHRA de Aïn Benian (locataire), il n’aurait même pas où s’entraîner.  Pessimiste ou optimiste pour le professionnalisme ? C’était du vent car 8 ans plus tard, où en sommes-nous.
Nous n’avons pas avancé d’un mètre, bien au contraire nous avons reculé. Il n’y a qu’à voir la composante de notre Equipe nationale qui était et qui est toujours composée en grande majorité d’Algériens formés en très grande partie, en France, et heureusement qu’ils sont là, sinon, nous aurions une très faible sélection. Il faut revenir à la formation, mais pour cela, il faut une infrastructure qui est pourtant à la portée de tous les clubs, pour peu que les présidents s’y attèlent. Le vivier de jeunes talents existe en Algérie, et les années 1980 l’ont prouvé, quand tous les clubs ont pris en charge leurs pépites qui existent toujours. Pessimiste car tant que les clubs n’auront pas une base d’entraînement digne de ce nom, la formation sera bâclée. Autre chose, pourquoi certains clubs sont privilégiés par rapport à d’autres. Certains clubs sont parrainés par des entreprises publiques et d’autres non, ce qui n’est pas normal. Que tous les clubs-pro soient sur le même pied d’égalité.   Dernière question. Faut-il, selon vous, une AGEx pour décider de la reprise ou pas du championnat ? Chez nous, les données concernant la pandémie ne permettent pas à la FAF de prendre une décision claire et je pense que cette décision revient à l’assemblée générale extraordinaire. Il ne faut pas oublier qu’il y a des matches retard qui compliquent le calcul éventuel d’une reprise et qu’il reste aussi 8 matches, donc 24 points en jeu. Mais la décision doit être prise le plus tôt possible. Propos recueillis par
H. Hichem