Lycée Chafaï Ahmed : une dégradation totale !

Bordj Menaïel

Voilà un établissement éducatif qui a perdu de sa verve, le lycée Chafaï Ahmed possède une grande histoire, un établissement secondaire qui a été construit sur une parcelle de terrain qui servait de rendez-vous pour les grands matchs de football, un terrain qui a vu d’excellents footballeurs formés dans le tas, à l’image des Tayeb Amrous, Sadek Amrous, Aidir Hamid, Matouk Abdelkader, Amar Bouchanane, et la liste est beaucoup trop longue pour les citer tous. Pour ceux qui ne le savent pas, le lycée Chafai Ahmed de Bordj Menaïel est une école d’excellence qui a de tout temps produit de brillants élèves qui sont devenus par la suite des médecins, des chirurgiens, à l’image de Tahar Naili, Hamid Achour, Sidi Rouhou Amar, du regretté Tafat Bouzid Abdelkrim, mais aussi des experts fonciers à l’image de Abdenour Mostefaoui, et des dizaines, si ce n’est des centaines d’avocats agréés près la Cour, auprès du ministère de la Justice.

Omar Fetmouche est un grand dramaturge, spécialiste de l’univers du théâtre et scénariste qui a été l’auteur du théâtre pour enfants Sindjab de Bordj Menaïel. Ils sont nombreux les cadres qui occupent diverses fonctions dans les ministères algériens en qualité de Drag, de Dal, de commissaire aux comptes, d’experts-comptables, de conseillers, de commissaires de police et autres métiers. La réalisation du projet de construction du lycée Chafaï de Bordj Menaïel dans les années 1970 a été l’œuvre d’un combat au quotidien d’un honnête homme, Amara Ahmed, en l’occurrence. Il était directeur de collège, et en même temps, le premier président élu de l’APC de Bordj Menaïel, dans les années 1968. En sa qualité de directeur d’établissement scolaire, il ne pouvait supporter la déperdition scolaire à cause de l’inexistence d’un lycée et le peu d’élèves qui avaient la chance de poursuivre leurs études secondaires et qui devaient ensuite rejoindre, soit le lycée Amirouche de Tizi-Ouzou, soit le lycée technique de Dellys, car territorialement, la localité de Bordj Menaïel faisait partie intégrante de la wilaya de Tizi-Ouzou.
M. Amara refusait de voir un élève jeté à la rue, il faisait tout ce qui était en ses moyens pour leur accorder des chances. Incontestablement, le lycée Chafaï, qui porte le nom d’un chahid de la région, est intimement lié au personnage qu’est Amara Ahmed, celui que l’on appelait M. le directeur, une fois au collège et M. le maire dans l’enceinte de l’APC. Il ressort des entretiens que nous avons eus que peu de jeunes connaissent l’homme qu’il était, mais d’autres se souviennent d’un homme doté d’une forte personnalité, d’une grande intelligence et d’une fermeté qui ne faisait pas de discrimination entre les riches et les pauvres. Son sens de l’équité était également apprécié, il ne pouvait en être autrement de la part d’un homme qui n’avait jamais renié ses origines rurales étant donné qu’il portait le fameux pantalon Kaâda (seroual el ma kaada). Amara Ahmed s’était juré que la construction d’un lycée à Bordj Menaïel serait une affaire personnelle qu’il mènerait dans le cadre d’un combat juste et légitime. D’ailleurs, il avait entièrement raison de s’en tenir à ses objectifs. Il n’échappe à personne aujourd’hui que le lycée Chafaï est considéré comme étant le doyen des établissements secondaires dans la wilaya de Boumerdès qui est devenue en quelque sorte la fierté de la ville de Bordj Menaïel. Réaliser un lycée dans les années 1970 relevait de l’utopie, c’était quelque chose d’inimaginable à l’époque, au-delà même du prestige et des résultats probants.
Eh oui, c’est toute la clairvoyance d’un homme qui a beaucoup donné au secteur éducatif. Ce qui n’est plus le cas actuellement, le lycée Chafaï Ahmed a perdu de sa notoriété, les conditions de scolarisation décriées, et le lycée se dégrade de plus en plus et cela depuis le séisme du 21 mai 2003 qui a endommagé la structure de l’établissement, les parents d’élèves sont en colère à cause de cette situation qui ne fait qu’empirer et des élèves qui ne cessent d’afficher leur inertie, et des responsables locaux APC/APW, des élus qui ont tourné le dos à cette institution vieille de 50 ans : il n’y a aucune amélioration des conditions de scolarisation des enfants. Le lycée Chafaï Ahmed a été frappé de plein fouet par le tremblement de terre du 21 mai 2003, chose qui a contraint les responsables du secteur à l’époque, par l’intermédiaire de Mme Saheb Tassadit, d’implanter des classes en préfabriqué pour permettre aux élèves de poursuivre leurs études, mais malheureusement contre toute attente, le provisoire qui devait laisser place à un nouveau projet d’infrastructure éducative n’a fait que durer et faire endurer au même moment un véritable calvaire aux élèves, et ce depuis dix- sept ans. Au jour d’aujourd’hui, les élèves poursuivent leurs études dans des conditions lamentables, dans des classes dépourvues de toutes commodités, les classes sont abîmées, laissant entrer l’eau de pluie en hiver et une chaleur suffocante en été.
Les fenêtres sont pratiquement cassées alors que les portières sont défoncées sans parler des chaises et des tables. Pour rappel, au lendemain du séisme du 21 mai 2003, l’établissement a été classé dans la catégorie 3 avec confortement des structures. Un rapport d’expertise du centre de contrôle technique (CTC) avait décidé de la démolition de la bâtisse, tout en affirmant qu’un nouveau projet d’étude était inscrit pour la recontruction de nouvelles classes. Depuis 2003, nous continuons à envoyer nos enfants dans ce lycée sans se soucier de leur sécurité, nous attendons aussi que la nouvelle bâtisse soit reconstruite et dont le projet mentionne la création de dix-neuf nouvelles classes, les services de la DLEP sont venus constater de visu afin d’entamer les travaux, malheureusement rien n’a été fait ! Où allons nous avec cette situation de pourrissement ? De quel droit s’est-on permis d’utiliser des dortoirs pour les réaménager en classes provisoires, des dortoirs qui ne sont pas aérés ? L’inspecteur de l’Education n’a pas accepté cette situation, aussi il est à noter qu’autrefois le lycée Chafaï disposait de deux véhicules, une Volkswagen fourgon et une Dacia utiltaire pour les besoins du lycée, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, ces deux véhicules ou plutôt les carcasses sont exposées au vu et au su des élèves et des enseignants dans la cour du lycée. Plusieurs pétitions ont été adressées aux autorités compétentes par le biais du président de l’Association des parents d’élèves, à l’époque M. Idir Hamid, ainsi que par des parents d’élèves qui ont écrits plusieurs missives aux autorités locales en attirant l’attention sur les mauvaises conditions de scolarisation des élèves mais cela n’a rien donné , précise notre interlocuteur.
Et d’énumérer les autres manques à combler : Absences de sanitaires dignes de ce nom, vespasiennes dégradées et insalubres à longueur d’année en raison notamment de l’absence d’eau, pas de cantine scolaire. Le site de l’emplacement du lycée Chafaï est situé dans un lieu très élevé qui domine toute la ville de Bordj Menaïel et dispose d’une grande parcelle de terrain inexploitée, autrefois le terrain de football jouxtant l’institution éducative appartenait au lycée, malheureusement ce n’est plus le cas aujourd’hui. Il faut rendre à César ce qui appartenait à César, le lycée Chafaï a de tout temps eu les meilleurs enseignants à l’image des coopérants Syriens, Palestiniens, Egyptiens, Européens. C’était un joyau architectural, ce qui n’est plus le cas actuellement, il a perdu de sa renommé. Il suffit de pénétrer l’enceinte de l’établissement pour voir de visu le désastre qui y règne à l’intérieur, il ne reste que le squelette de la construction. Que faut-il faire pour que le lycée redore son blason de jadis ? Tout d’abord, il faut doter les enseignants de moyens pédagogiques, de moyens matériels, mettre les élèves dans la confiance absolue afin qu’il puisse étudier le plus normalement du monde. Depuis combien de temps cet établissement n’a pas vu un haut responsable venir constater de visu la situation déplorable auquel le lycée Chafaï Ahmed est confronté ? Alors de grace M. Khensous Nadir, directeur de l’Éducation de la wilaya de Boumerdès, faites un tour et sauvez ce qui peut être encore sauvé. A bon entendeur, salut.
Kouider Djouab