Une jungle de népotisme et de corruption

Avant le monopole de l’ANEP sur la publicité :

Certaines voix, certainement mues par les perspectives qu’ouvrirait pour elle la fin de la gestion, par l’ANEP, de la publicité institutionnelle, appellent à lever le monopole de cette entreprise sur le média planning des annonces publiques.

Quoi de plus normal que de vouloir une levée de monopole quand on est sûr de pouvoir en profiter pleinement aux niveaux national et local ? Cela surtout quand on sait que cette levée de monopole laisserait inévitablement toute latitude aux annonceurs publics pour choisir eux-mêmes les journaux dans lesquels ils inséreraient leurs annonces. C’est cela même qui nous amène à rappeler que la principale raison qui a poussé les pouvoirs publics à centraliser la distribution de la publicité institutionnelle et à en confier la gestion à une entreprise telle que l’ANEP, c’est le fait que le flou qui entourait le choix des annonceurs permettait à des élus locaux de se sucrer avec la complicité d’intermédiaires ; il en était de même de nombreux entreprises publiques dont les dirigeants, par affinité ou par sympathie, ne choisissaient que quelques journaux pour leurs insertions publicitaires et leurs annonces institutionnelles.
Le souci de préserver un certain pluralisme médiatique et une diversité des expressions éditoriales sur la place algérienne était la principale motivation qui avait présidé à la décision de concéder le monopole à l’ANEP d’un portefeuille dont il faut rappeler qu’il appartient au ministère de l’Intérieur. L’application de cette mesure et les perversions qui ont suivi étaient surtout le fait de mauvaises décisions et/ou d’une volonté de mener la presse au pas au lieu d’instaurer un modèle de régulation définitivement axé sur des normes universelles lisibles pour tous. Echec, certes, mais il ne s’agit pas de jeter le bébé avec l’eau du bain, devenue trouble. Il s’agit de reconduire le seul modèle valable, en l’absence d’un modèle économique qui viabilise l’activité de presse, en le débarrassant des manipulateurs qui entendent faire de l’argent de la publicité publique, au lieu que ce soit un levier de développement et de performance médiatiques, un instrument de pression ou un chantage à la publicité publique.
Certains titres qui appelaient, il n’y a pas si longtemps, à la levée du monopole sur la publicité publique parce qu’ils préjugeaient du sort favorable que leur ferait un contexte de gestion plus libéral, entendent aujourd’hui faire partie des bénéficiaires tout en s’attendant à avoir les plus grands quotas sur la base d’un critère dépassé : le tirage. Tout cela semble encore complexe et accuse des divergences que seul un débat ouvert et inclusif est à même de réduire, en espérant que les pouvoirs publics, qui semblent s’approcher de plus en plus de la plus précise des perceptions, puissent associer toute la presse afin d’arriver à prendre les décisions les mieux argumentées et les plus équitables. Une solution consensuelle et de long terme est à ce prix.
A. R.