Quelques recommandations pour le plan de relance économique

Réformes structurelles

L’Algérie depuis des décennies est toujours en transition, faute d’une vision stratégique. La condition essentielle de réussite du plan de relance socio-économique est d’avoir une méthode cohérente pour mettre en place de profondes réformes structurelles avec un planning réaliste daté.

La société algérienne comme toutes les sociétés humaines est structurée en fonction de plusieurs paramètres sociologiques : catégories d’âge, profession, sexes, statut sociale, statut religieux, statut politique, anthropologie culturelle territoriale etc.

1- Le plan de relance doit tenir compte de la structuration de la société
Un système d’information fiable doit faire l’inventaire de ces catégories pour le ciblage médiatique et l’élaboration du programme des réformes structurelles selon un timing daté. Car tout projet étant porté forcément par des forces politiques, sociales et économiques, sa réalisation étant fonction des rapports de force au niveau de la société et non au sein de laboratoires de bureaucrates déconnectés de la société, doit d’abord être compris par tous ceux qui, à un niveau ou à un autre, interviennent dans la décision économique, d’où l’importance de savoir communiquer dans un langage accessible à toute population et pas seulement aux initiés.
C’est pourquoi, il faut insister sur l’effort d’une information de vérité, qui doit lui être associée, pour montrer l’opérationnalité du plan de relance au profit des générations présentes mais également futures, une nation ne pouvant distribuer plus que ce qu’elle produit quitte à aller vers le suicide collectif, l’objectif, éviter la marginalisation de pans de la société. Sans verser dans la démagogie et le populisme, les expériences historiques afin de favoriser la mobilisation et de la symbiose Etat–citoyens, c’est aux dirigeants de rassembler à leur peuple et non au peuple de ressembler à ses dirigeants devant tenir compte de notre riche anthropologie culturelle.
Le principe est de travailler pour consolider la diversité et la pluralité tout en cultivant l’unité de la nation et sa cohésion sociale pour un espace équilibré et solidaire. Ce sont les hommes avec leurs équipements anthropologiques (identitaires) qui ont façonné les espaces. Car, si l’organisation administrative de l’espace qui n’est pas celui de l’administration comme l’a démontré brillamment l’expert de renommée mondiale, Hernando DE Soto OTO sur Etat de Droit et sphère informelle (dans l’ouvrage du Pr Abderrahmane Mebtoul – l’Algérie – perspectives : bonne gouvernance, démocratie et économie de marché (édition Dar El Ghjarb 2004).

2- le plan de relance doit reposer sur une vision stratégique
Les actions sectorielle doivent se mouler au sein d’une d’une fonction objectif stratégique devant différencier pour paraphraser les militaires tactiques et stratégie devant tracer un registre d’engagements pour le court terme et le moyen terme. A court terme, cela doit toucher les situations pénibles vécues par les Algériens. A moyen terme, un système d’information en temps réel basé sur une communication transparente et de vérité dans la mesure où les réformes futures seront douloureuses mais déterminantes, dépassant de loin les enjeux internes de pouvoir pour s’inscrire de plain-pied dans le plan géostratégique des puissances de ce monde. Ainsi, le plan de relance doit définir clairement les objectifs stratégiques car un pays qui veut se développer doit préparer les choix qui permettent d’en saisir les conséquences basées sur des études précises qui doivent indiquer :
-comment se pose le problème,
-quelles sont les contraintes externes (engagements internationaux de l’Algérie)
-quels sont les contraintes socio-économiques, financières et techniques internes
-quels sont les choix techniquement possibles et les ensembles de choix cohérents et quelles sont les conséquences probables de ces choix,
-quelles méthodes de travail choisir qui permettent de déterminer les paramètres (moyen terme) et les variables (court terme) dont dépend un système complexe. Après avoir décomposé la difficulté en éléments simples, il convient de se poser des questions et apporter des réponses opérationnelles, loin des théories abstraites (réalisations physiques et plan de financement) sur chacun des éléments (faits ou relations entre les faits).
– Quoi ?
– Qui ?
– Où ?
– Quand ?
– Comment ?
– Combien ?
– Pourquoi ?
Dès lors, comment faire ?
La structure de l’action en faveur des réformes est globalement formée de cinq segments qui fondent le processus opérationnel de mise en œuvre :
– l’administration qui constitue la cheville ouvrière et qui par son importance stratégique,
– la société civile/syndicats,
– les citoyens dans leur diversité,
– les partis politiques,
– les opérateurs publics et privés.
En résumé, en ce mois d’août 2020, 98% des recettes en devises proviennent des hydrocarbures avec les dérivées influant sur le taux de croissance, de l’emploi, la sphère informelle représentant environ 50% de l’activité, le niveau des réserves de change en nette diminution (environ 40 milliards de dollars fin 2020) et la cotation officielle du dinar qui se cote à plus de 151 dinars un dollar avec un écart de 40/50% sur le marché parallèle, la cotation actuelle n’étant pas significative du fait de la fermeture des frontières. Le blocage essentiel en Algérie est la bureaucratie centrale et locale qui paralyse toute initiative créatrice. Comme note avec pertinence, un philosophe du XIXe siècle à propos de ce fléau local et central qui ronge la société algérienne : le bureaucrate amène avec lui, le carcan, les lenteurs, les petitesses en oubliant la conscience et l’efficacité.
Le but du bureaucrate est de donner l’illusion d’un gouvernement même si l’administration fonctionne à vide, en fait de gouverner une population infime en ignorant la société majoritaire. Nous aurons ainsi une triple conséquence : 1re conséquence : une centralisation pour régenter la vie politique, sociale et économique du pays ; 2e conséquence : l’élimination de tout pouvoir rival au nom du pouvoir bureaucratique ; 3e conséquence : la bureaucratie bâtit au nom de l’Etat des plans dont l’efficacité sinon l’imagination se révèle bien faible. Aussi le programme de relance, partant d’un bilan objectif pour se projeter sur l’avenir, doit s’attaquer aux fondamentaux du blocage et trouver des réponses réelles sur tout le territoire national qui répondent en priorités aux aspirations de la population algérienne en redonnant un espoir, ce qui renvoie à la confiance Etat-citoyens afin qu’ils s’impliquent dans les réalisations présentes et futures. Cela renvoie à la responsabilité citoyenne et à la démocratie participative.
Professeur des universités, expert international Dr Abderrahmane Mebtoul