Le «miracle» de la Mostra 2020

Cinéma

«Il miracolo», s’est enthousiasmée Cate Blanchett, une fois arrivée au Lido. Et le miracle a eu lieu.

La Mostra de Venise 2020 s’est tenue, avec de très bons films, de nombreux accrédités et sans aucun cas Covid-19 déclaré. Ainsi, le festival de Venise entre avec succès dans l’histoire en tant que premier grand festival international de cinéma recevant du public depuis le début de la pandémie du coronavirus. Ce samedi 12 septembre, le jury présidé par la star australienne Cate Blanchett a décerné les Lions d’or de l’édition 2020. Cette année, les organisateurs méritaient un prix spécial pour leur courage d’avoir cru à ce festival et d’avoir convaincu le monde du cinéma à réaliser ce rêve ensemble. Car chaque festivalier rencontré a entonné le même refrain : «La Mostra a redonné de l’espoir.» Il fallait être motivé pour se rendre à Venise : vaincre la peur ambiante planétaire, remplir les dossiers sanitaires, subir les contrôles à la frontière, puis franchir les checkpoints du campus de la Mostra, dotés de caméras thermiques pour la prise de température, les contrôles de sac. Sans omettre la surveillance accrue concernant le port de masque à l’intérieur des salles de cinéma où chacun avait dû réserver sa place numérotée en ligne pour une traçabilité maximale. Et sans oublier ceux arrivés d’un pays en dehors de l’espace Schengen, avec test Covid-19 obligé. Parmi les festivaliers issus de pays blacklistés, certains ont même fait le transit via un pays tiers pour regagner l’Italie.

«Pas de cas Covid-19»
«Jusqu’ici, nous n’avons pas enregistré de cas Covid-19», a annoncé, soulagé, dans la soirée du vendredi 11 septembre, le service de presse de la Biennale. Au lieu des 12 000 accrédités en temps normal, 5 000 professionnels du cinéma sont venus à Venise, malgré le coronavirus. 1 500 journalistes ont couvert le festival, dont 450 issus de pays étrangers et 200 équipes de télévision. Et à la moitié du festival, 20 000 tickets ont été vendus, au lieu de 42 000 l’année précédente. Grâce aux précautions drastiques, la Mostra a réussi à installer une ambiance très détendue, d’autant plus que, en dehors de la zone du festival, et contrairement au reste de Venise, dans les rues de la petite île du Lido, personne ne porte de masque. L’absence de foules, de fêtes et de points de rencontre a permis de respecter partout la distance sociale, mais empêché aussi les discussions spontanées, rencontres improbables ou polémiques, ce qui représente en temps normal le sel de chaque festival. L’expérience tellement attendue du grand écran était bel et bien présente, de très bons films aussi, et cela du monde entier. Le refus des studios américains et de Netflix d’envoyer des films à la Mostra a changé le caractère de l’événement. En revanche, chacun ayant vu tous les films de la compétition devrait arriver à la même conclusion : le festival a dû renoncer aux paillettes de Hollywood, aux acheteurs, producteurs et distributeurs survitaminés, mais pas à la qualité des œuvres présentées.

Une Mostra moins commerciale
À l’image d’un Venise vidé de ses paquebots et hordes de touristes, dégageant une poésie irrésistible, la Mostra s’est montrée moins commerciale, mais aussi exigeante que d’habitude. Coronavirus oblige, le défilé des stars sur le tapis rouge était séparé du public, réduit à son strict minimum : la prise d’images par les photographes accrédités. L’absence de blockbusters américains a changé la donne. Au lieu de se transformer en rampe de lancement pour les Oscars, la Mostra a ouvert les horizons cinématographiques.
S. F.