Quel avenir pour l’organisation Opep et la stratégie de Sonatrach face aux nouvelles mutations énergétiques mondiales ?

Cours mondial du pétrole

L’Opep a été créée le 14 septembre 1960 et fête son 60e anniversaire avec une part déclinante tant dans la décision énergétique que dans la commercialisation mondiale. Avec l’épidémie du coronavirus, malgré une baisse substantielle, les cours peinent à se rétablir au niveau de 2019. Avec une crise sans pareille, depuis la crise 1928/1929, au moment où l’interdépendance des économies était faible, n’étant pas assimilable à la crise de 2008, aucun expert, pouvant seulement élaborer des scénarios, ne peut prédire si les activités de consommation et d’investissement vont pouvoir rebondir, tout dépendant de la maîtrise de l’épidémie.

L’exploration des eaux libanaises et grecques est moins avancée. Athènes ayant déjà attribué des parcelles à ExxonMobil, à l’espagnol Repsol ou à Total. Rappelons que le 19 février 2018, un contrat de 15 milliards de dollars, jugé historique, entre l’Égypte et Israël prévoit la fourniture de gaz naturel des réservoirs offshore de Tamar et de Léviathan vers l’Égypte, selon un rapport de la Fondation méditerranéenne d’études stratégiques (FMEN). Pour apaiser les tensions, bien que les pays de la Méditerranée sont tous confrontés au problème de la sécurité énergétique, il s’agit avant tout de renforcer la coopération notamment dans le domaine énergétique, pouvant représenter un lien très fort entre le nord et le sud de la Méditerranée. Quel impact sur l’économie algérienne tributaire à 98% avec les dérivées de ses recettes en devises des hydrocarbures ?

Le cadrage macro-économique de la loi de Finances complémentaire 2020 a été établi sur la base d’un baril fiscal à 30 dollars et un prix de marché à 35 dollars. Cela a un impact négatif sur le taux de croissance qui sera négatif en 2020 et par conséquent sur le taux de chômage avec une population de 44 millions d’habitants au 1er janvier 2020, une population active d’environ 12,5 millions. Les prévisions de recettes de Sonatrach sont estimées entre 22/24 milliards de dollars pour 2020 et le montant des réserves de change à environ 44 milliards de dollars selon le gouvernement, le FMI l’estimant fin 2020 à 35 milliards de dollars. L’avenir de l’équilibre de la balance des paiements sera de la relance de la machine économique tributaire à 85% des matières premières et équipements importés, le taux d’intégration des entreprises publiques et privées ne dépassant pas 15%, la paralysie relative de l’économie, à l’instar des autres pays, expliquant la baisse des biens importations de biens et services qui ont représenté entre 10/11 milliards de dollars par an entre 2010/2019.

Encore que le gouvernement mise sur une meilleure gestion et la lutte contre les surfacturations du passé, en fait la corruption, pour atténuer les tensions financières ; mais tout cela est tributaire d’une stratégie clairement définie conciliant des objectifs réalistes et les moyens humains et financiers donc dépendant toujours de la rente, devant tenir compte du manque à gagner de la baisse de 200 000 barils/jour, qui s’ajoute à l’importante baisse en volume physique de la production de Sonatrach depuis 2008, en n’oubliant pas que le gaz représente 33% des recettes de Sonatrach entre le GNL (26%) et le GN (74%) via Medgaz (Espagne) et Transmped (via Italie) qui connaît une chute de plus de 50%, serait en moyenne annuelle de 3/4 milliards de dollars. A 30 dollars le baril, le chiffre d’affaire, (pas le profit net auquel il faut retirer 20/25% des coûts) serait de 15,5 milliards de dollars, restant après la réduction 11,5 milliards 60/ 70% des gisements n’étant plus rentables, surtout les nouveaux puits non encore amortis, et idem pour 1,5-2 dollars le MBTU, concernant les canalisation de gaz naturel et à ¾ dollars pour le GNL. En cette période de crise, s’impose la solidarité nationale, passant par une moralité sans faille des dirigeants et une nouvelle gestion du management politique et économique.

L’Algérie étant indissociable de l’évolution du monde, le XXIe siècle doit relever de nombreux défis : la guerre de l’eau liée à la guerre alimentaire, la guerre biologique, la guerre numérique et la guerre écologique, avec d’importants flux migratoires dus au réchauffement climatique (sécheresse, inondation, vents violents, cyclones) avec des recompositions territoriales, ces quatre guerres, ayant des incidences sanitaires, économiques et sécuritaires. L’on devra repenser la gouvernance et notre modèle de développement, évitant des calculs micro-économiques étroits de l’entreprise, appliqués sans tenir compte du contexte social aux services collectifs et donc réhabiliter la fonction de bien-être collectif.

Il faut un discours de vérité, loin de la démagogie, car pour pouvoir exporter, il faut d’abord avoir des entreprises publiques et privées concurrentielles sur le marché mondial en termes de coût, qualité, prix, un taux d’intégration minimum de 40/50% alors que 97% des entreprises algériennes selon les données du registre du commerce en 2019 sont des petites Sarl à organisations familiales peu innovantes. Or, en septembre 2020, plus 98% des entrées en devises avec les dérivées proviennent toujours des hydrocarbures, ne créant pas des entreprises par décrets, et si les réformes sont mises en place fin 2020, il faudra quatre à cinq années pour voir surgir des entreprises performantes. Les défis qui attendent l’Algérie sont une entreprise d’envergure, exigeant une véritable stratégie nationale d’adaptation face tant aux nouvelles mutations.

Le XXIe siècle sera dominé par les réseaux de la société civile en symbiose avec de nouvelles fonctions des Etats, des entreprises et des institutions internationales de régulation, avec les défis de la transition numérique, énergétique avec le primat de l’hydrogène combiné aux énergies renouvelables entre 2020/2030/2040 et la culture à travers les médias, qui imposeront un changement profond dans les deux prochaines décennies dans les modes d’organisation institutionnelle, d’entreprises, de consommation et nos comportements. L’Algérie acteur stratégique au niveau de la région, a besoin d’un développement loin des mentalités rentières, car toute déstabilisation aurait une répercussion régionale sur l’espace méditerranéen et africain – Interview A. Mebtoul American Herald Tribune USA, août 2018 – mars 2019 – AFP mai 2020, France 24 et Mena Foruml1 Londres 2021. Mais les réformes garantissant la sécurité et le développement ne peuvent provenir que des Algériens eux-mêmes.
(Suite et fin) A. M.