La face cachée du trafic de pièces d’automobile en Algérie

Les Tunisiens s’emparent des pièces d’origine pour les revendre

A El Hadjar, commune de Annaba, beaucoup de commerçants dans la filière de la pièce détachée avouent que nos voisins tunisiens ont raflé presque une grande partie des pièces d’origine pour la revendre en Tunisie à des prix très élevés, ce qui cause une vraie rupture dans le marché national pour les acheteurs algériens.

Le marché de la pièce détachée est secoué ces derniers temps par une certaine polémique au sujet des moyens qu’il faut mettre en œuvre pour stopper l’invasion des pièces de rechange contrefaites sur le marché national. Selon certains spécialistes dans la vente des pièces d’automobiles, ce phénomène connaît d’ores et déjà une montée inquiétante dans le pays, soit 40% des pièces de rechange en circulation sont trafiquées, cette contrefaçon touche malheureusement l’ensemble des pièces de véhicule à savoir, freins, feux, roues, essuie-glaces et autres. Chez des concessionnaires, il y a aujourd’hui, un grand manque de pièces de rechange originaires telles que les plaquettes de freins ou les filtres à air qui se vendent à un prix très élevé, voire le double dans la région de l’Est. Diverses types de pièces détachées ne sont pas soumises au contrôle préalable du constructeur automobile et ne portent pas son nom, ni sa marque, aucune de ses garanties. Le marché de pièces détachées de véhicules dans de nombreuses régions du pays et particulièrement dans la région Est fonctionne réellement au ralenti depuis plusieurs jours à cause semble-t-il d’indisponibilité de nombreuses pièces de rechanges comme nous précisent beaucoup de commerçants, des pièces d’usure à savoir des plaquettes de freins, des disques d’embrayage, des pièces de rotules.
Les détaillants imputent cette situation sur le dos des gros importateurs nationaux qui ont importé des pièces parfois de qualité et autres contrefaites. Ces nouveaux importateurs se rabattent sur des pays comme ceux du sud-est asiatique ou dés fois la pièce contrefaite est importée des pays européens. C’est en effet depuis l’année 2000 que la contrefaçon des pièces de rechange des véhicules légers et lourds avait commencé son apparition sur le marché national algérien, le fléau fut constaté par des spécialistes de l’importation que les produits commercialisés sont typiquement identiques mais qu’ils coûtent moins que ceux d’origine. A l’époque du monopole exercé durant le règne du défunt Houari Boumediene, c’était l’entreprise Sonacom qui importait la pièce détachée suivant les normes requises en la matière, des produits d’une qualité irréprochable et d’origine. La pièce de rechange automobile, c’est comme un produit alimentaire, elle peut mettre en danger de mort son consommateur si elle est contrefaite. Les pièces telles que les freins et les amortisseurs peuvent notamment provoquer des accidents mortels, indique-t-on.
Le danger est inévitable pour le client qui achète des produits contrefaits et beaucoup d’importateurs malhonnêtes préfèrent ignorer la réalité pour justifier leur acte en parlant seulement de pièces copiées, plusieurs marques de produits algériens estiment certains opérateurs sont contrefaits à l’étranger puis introduits de nouveau en Algérie pour être commercialisés à des prix à trop bas. Malheureusement tous les moyens sont bons pour les affaires douteuses des trabendistes. Certainement la démarche est très simple, il suffit qu’un opérateur prenne avec lui un échantillon d’une pièce de rechange à destination de l’Asie pour faire fabriquer une copie à un prix bas. Les constructeurs d’automobiles français à savoir des marques Peugeot et Renault sont ciblés par la contrefaçon des pièces de rechanges, souligne-t-on. Prés de 60% des pièces détachées sont importées dans un cadre non professionnel alors que le reste représente des produits de fabrication originale. L’économie de la pièce de rechange parallèle s’est réellement développée à une grande vitesse beaucoup de concessionnaires pensent qu’il faut vraiment lutter contre les revendeurs véreux de la pièce détachée par le renforcement des services des douanes avec des moyens modernes permettant la détection des produits contrefaits et le contrôle de l’état dans le marché national et assainir la vente en général.
Pas mal de clients se penchent sur l’achat des pièces de rechanges Taiwan à cause de son prix qui est très bas par rapport à la vraie pièce d’origine. D’après le ministère du Commerce, 80% des pièces de rechange des véhicules sont importées de la Chine, France, Italie et de la Corée du sud. Dans ce sens, il est à souligner que les importations de pièces de véhicules ont atteint en 2008 un volume estimé à 44 256 tonnes d’une valeur de 291millions de dollars. Soit 1 316 tonnes de pièces contrefaites pour une valeur de 5,7 millions de dollars qui avaient des motifs d’absence de marque et de défaut d’étiquetage. Selon ce ministère, c’est prés de 2 500 tonnes de pièces de rechange d’un montant de 10 millions de dollars qui avaient été interdites d’accès aux frontières nationale en 2009 pour non-conformité, celles-ci présentait une absence d’attestation de la firme mère autorisant la fabrication de la pièce de rechange exigée aux importateurs.
Plus de 38 800 commerçants exercent dans ce créneau dont seulement 3% sont inscrits au registre de commerce. Un vrai créneau juteux en Algérie pour des milliers de commerçants détaillants et importateurs qui continuent en usant de la tromperie pour tricher avec l’Etat et le consommateur algérien. Quelques chauffeurs de taxi que nous avons questionnés sur ce sujet nous ont révélé qu’ils préfèrent acheter des pièces usées sur le marché d’occasion : «Acheter une pièce de rechange usagée est plus fiable et sûre que d’avoir une pièce neuve contrefaite qui ne dure que deux mois sans aucune garantie de sécurité», nous dit-on. Inévitablement le gouvernement algérien a mis tous les dispositifs nécessaires dans le but d’endiguer ce fléau grandissant et menaçant les vies humaines. Malgré l’interdiction de circulation des véhicules de plus de 30 ans.
Ici à Annaba, des vieilles voitures de marque Peugeot très usées continuent étrangement de circuler en tant que taxis dans la plaine ouest, Pont blanc, El Bouni, Seybouse, Sidi Amar, El Hadjar et autres. La direction du transport de la wilaya estime qu’il n’est pas de son ressort la vérification des voitures en activité. Des véhicules à haut risque, il faut le dire, qui font encore du transport public, a-t-on constaté de visu. A ce sujet, il est impératif de relever que l’assainissement du secteur en question est plus que souhaité et le phénomène des registres du commerce loués chez des personnes faisant de la contrefaçon doit absolument être éradiqué. Il faut savoir que le marché national de la pièce de rechange continue, jusqu’à aujourd’hui, à être alimenté par deux canaux différents : les distributeurs agréés et le marché informel ou anarchique de la pièce détachée qui n’obéit à aucune règle, ni loi, ni norme et s’approvisionne de la contrefaçon et des pièces détachées provenant du désossement des véhicules volés».

Comment ces marchandises se trouvent sur le marché algérien ?
On ignore l’origine des pièces détachées contrefaites même si on sait que la Chine est placée en tête de liste, elles sont toujours écoulées par l’entremise de quelques pays comme la Turquie, Dubaï, l’Italie et même la France. Le continent africain est considéré comme le plus important récepteur de ce type de marchandises ayant une très mauvaise qualité dont l’utilisation présente vraisemblablement de réels dangers routiers. Le phénomène se développe à une grande échelle à tel point que le consommateur n’hésite pas en achetant des pièces truquées à bas prix pour mettre sa vie en danger de mort, certes il achète parce qu ’il a besoin tout en étant convaincu qu’il s’agit d’un simple bricolage ignorant totalement les conséquences et les risques. En guise de conclusion, il faut noter que la sensibilisation par la presse et les médias lourds restent l’une des principales solutions préconisées dans la lutte de ce redoutable fléau.
Oki Faouzi