La CAN, la CAF et son image

La prochaine Coupe d’Afrique des nations est déjà sur rails. Destination le Cameroun 2022. Une CAN qui «devait être l’Olympe d’Issa Hayatou, président de la Confédération africaine de football de 1988 à 2017». L’histoire commença en septembre 2014.

«La CAF décide alors d’attribuer la CAN-2019 au Cameroun, plutôt qu’à l’Algérie ou à la Côte d’Ivoire (qui se voit confier la CAN-2021). Le pays du Camerounais Hayatou n’a plus organisé de phase finale depuis 1972 alors qu’il détenait le meilleur dossier, rappelait un confrère. Le Cameroun disposait de 4 ans et demi pour se préparer à un tournoi à 16 équipes en janvier-février 2019. 2017, au terme d’un important séminaire, la CAF change de route et décide que cette compétition se jouera avec 24 équipes, et de préférence juin-juillet. On demande aux Camerounais, aux Ivoiriens et aux Guinéens (censés, eux, abriter la CAN-2023), s’ils sont prêts à organiser cette compétition élargie. Le gouvernement de Paul Biya décide de relever le défi. «Troisième et même quatrième coup de théâtre puisque, dans la foulée, la Confédération africaine de football offre la CAN-2021 en guise de consolation». Les Ivoiriens et les Guinéens accepteront également un «glissement» de deux ans. La compétition phare du moment tangue. Très attendue par des milliards de supporters, la «marque» la plus vendue à travers le monde, un peu comme la Coupe du monde produit FIFA. La CAN renfloue ses caisses et bénéficie de centaines de millions de dollars. Les observateurs réagissent, s’interrogent et s’installent dans une méfiance quant à la gestion de cette institution du fait des d’exemples enregistrés par le passé.

Le retrait de la CAN-2019 au Cameroun
Vécu comme une humiliation par le peuple camerounais, avec des répercussions énormes sur le plan économique, politique et même diplomatique. «Le gouvernement camerounais avait engagé dans le dossier de la Coupe d’Afrique plus de 2 milliards d’euros (1 500 milliards de francs CFA). A titre de comparaison, cela représente environ un tiers du budget de la nation pour 2019, qui s’élève à 7,4 milliards d’euros (4850, 5 milliards de francs CFA). Une enveloppe empruntée auprès des banques internationales, d’Etats ou des opérateurs locaux, se sont embarqués dans d’immenses investissements». Pour justifier l’affront infligé à la population camerounaise, la CAF a pointé du doigt, à travers des rapports d’inspection, des retards au niveau des infrastructures et de la sécurité, faisait remarquer RFI. Il est vrai que la question de la sûreté se posait, mais la CAF a aussi, dit-on, sa part de responsabilité dans cet échec. «Les nations et les instances africaines s’étaient engagées en 2014 pour une CAN à 16 équipes, mais on a changé les règles du jeu en 2017 en poussant la compétition à 24 nations, augmentant de fait le nombre de rencontres, de supporters, etc. Ce n’est plus la même chose», nuance pour sa part Carole Gomez, chercheuse à l’Institut de relations internationales et stratégiques.

CAN-2019 : Un bénéfice de 83 millions de dollars
Le président de la CAF, Ahmad Ahmad, annonçait dans des médias marocains que le budget de la Coupe d’Afrique des nations 2019, qui avait eu lieu en Egypte, était d’environ 30 millions de dollars (plus de 17 milliards 260 millions de francs) CFA. Il faut savoir que cette 32e CAN a, selon l’APS, «généré un bénéfice de 83 millions de dollars à la CAF, selon le président de l’instance, Ahmad Ahmad». Cette somme est qualifiée d’«astronomique», puisqu’elle équivaut à presque le double du montant généré par l’édition 2015 qui avait eu lieu en Guinée équatoriale, selon la presse. A l’époque, la compétition suprême du football africain avait rapporté 28 milliards de Francs CFA (49 millions de dollars) à la CAF. Un regard sur le rétroviseur permet aussi de savoir qu’en 2017, lors de l’édition gabonaise, la CAN avait rapporté quelque 39 milliards de francs CFA (67 millions de dollars) à l’instance continentale. Enfin, dans une interview accordée déjà en janvier 2017 à RFI, le responsable de l’Observatoire du football au Centre international d’étude du sport estime que la CAN est un évènement qui n’est peut-être pas totalement global mais qui suscite quand même beaucoup d’intérêt, en dehors de l’Afrique.
H. Hichem
A lire dans notre édition de demain une interview de Ali Fergani