«Les défis de l’Algérie de l’après-référendum : redonner confiance avec une nouvelle gouvernance et un nouveau personnel politique»

Référendum

Le résultat très modestement positif du vote au référendum sur la révision constitutionnelle a démontré une fois encore, le manque de confiance des citoyens, et donc la nécessité d’un aggiornamento politique d’envergure. Un impératif qui vaut aussi au plan économique, si l’on veut éviter à l’Algérie de retomber à court terme sous les Fourches Caudines du FMI.

Le référendum pour la révision de la Constitution du 1er novembre 2020 s’est tenu dans un contexte national et international défavorables : maladie du Président de la République, dossier de corruption des anciens responsables créant une névrose collective et une crise de confiance, épidémie du coronavirus, faiblesse du système de communication non adapté au nouveau monde, marasme économique et social – mais cela n’est d’ailleurs pas propre à l’Algérie. Il faut le reconnaître, le taux de participation a été mitigé avec 23,7% sur un nombre total d’inscrits de 24 475 310 (dont 907 298 résidents à l’étranger) et le nombre de votants de 5 636 172, dont 45 071 résidents à l’étranger. Le nombre de voix exprimées a été de 5 023 385, dont 3 355 518 OUI (soit 13,70% des inscrits) et 1 676 867 NON (soit 6,85% des inscrits) qui s’ajoutent aux 633 885 bulletins nuls (407 en litige), soit au total 9,44%.

I – Les enseignements du référendum constitutionnel du 1er novembre 2020

Nous pouvons tirer cinq enseignements de ces chiffres. Premièrement : pour la première fois depuis l’indépendance politique, il n’y a pas eu de bourrage des urnes, ce scrutin s’est déroulé dans une totale transparence. Deuxièmement : au cours de leurs tournées, la majorité des membres du gouvernement n’ont pas été à la hauteur de cet important évènement, sans compter que bon nombre de leurs secteurs sont en hibernation. Ainsi, du fait de leurs discours déconnectés des réalités ou provocateurs, certains se sont vus presque chassés de certaines wilayas.
Troisièmement Troisièmement : il en est de même des partis traditionnels rejetés par la population, ainsi que du responsable chargé de dynamiser la société civile et l’émigration (taux de participation inférieur à 5%) où, selon nos informations, ayant réuni en majorité les appendices des anciennes structures, vivant de la rente et non en phase avec la réelle société civile majoritaire, leurs actions ont été facteur de démobilisation et contre-productifs. Quatrièmement : ce qui a permis d’éviter le scénario catastrophe, il faut aussi le reconnaître et lui en rendre hommage, c’est la tournée du chef d’État-major de l’ANP, car cela a permis ce taux de 23% de participation qui, sans cela, aurait été sous la barre des 15%. Cinquièmement : il ne faut pas être démagogue et tirer les leçons, les résultats mitigés ayant (dé)montré, en ces moments de grands bouleversements géostratégiques à nos frontières, le manque de confiance des citoyens. Il faut en tirer les conséquences pour une mobilisation citoyenne, facteur essentiel de tout développement. Car en ce XXIe siècle marqué par l’innovation permanente, avec la transition numérique et énergétique, le grand défi à venir est le redressement de l’économie nationale en léthargie, car la puissance d’une nation et sa prospérité sociale se mesurent à celle de son économie.

II – L’économie algérienne très impactée

Par les cours très bas des hydrocarbures. Le Fonds monétaire international (FMI), dans son rapport sur les perspectives économiques mondiales publié le 13 octobre 2020, prévoit pour l’Algérie moins -5,5% en 2020, un taux de croissance de 3,2% en 2021, contre 6,2% dans son rapport d’avril 2020, soit la moitié de ce qui était prévu, et ce sous réserve de la maîtrise de l’épidémie du coronavirus. L’Algérie a besoin d’un baril de pétrole à plus de 135 dollars en 2021 et, selon le site spécialisé, Oil Price, 157,2 dollars pour équilibrer son budget. Le prix du baril fixé par la Loi de finances 2020 à 30 dollars (prix fiscal et 35 dollars prix marché, le PLF 2021 à 40 dollars), n’est qu’un artifice comptable et il est prévu un déficit budgétaire énorme de plus de 20 milliards de dollars en 2021. La crise mondiale avec l’épidémie du coronavirus touche tous les pays du monde et pas seulement l’Algérie mono-exportatrice. C’est que la demande d’hydrocarbures, dont est tributaire l’économie algérienne, dépend fortement du retour à la croissance de l’économie mondiale fortement impactée par la seconde vague de l’épidémie du coronavirus. Comme je l’ai démontré dans l’interview donnée à l’American Herald Tribune le 23 avril 2020 (cf. «Prof. Abderrahmane Mebtoul : We Have Witnessed a Veritable Planetary Hecatomb and the World Will Never be the Same Again»), l’impact de l’épidémie du coronavirus sur l’économie mondiale sera de longue durée. En plus du bas cours des hydrocarbures, représentant avec les dérivés 98% des recettes en devises, le 3 novembre 2020, 10h GMT, le cours du pétrole en bourse du Wit était coté à 36,61 dollars, le Brent à 38,86 – et le prix de cession du gaz sur le marché libre à 3,24 dollars le MBTU, en baisse de plus de 70% par rapport à 2008/2010. Et tout cela, sans compter les pertes de parts du marché notamment en Europe, principal client – et le fait que le retard dans les réformes internes –, tout cela impacte fortement l’économie algérienne.
A. M. A suivre