L’Etat tente de riposter à une «situation d’imprévisibilité» !

Manque et cherté des tests PCR compromettent-ils le bilan officiel ?

La gestion de la crise sanitaire liée au Coronavirus en Algérie révèle une réalité plus embarrassante et plus compliquée. L’explosion des chiffres de contaminations à ce virus et de celui des décès, ces dernières semaines, inquiètent de plus en plus et créent un vent de panique à tous les niveaux.

La stratégie adoptée par les gestionnaires de cette situation s’avère surréelle en raison de l’absence d’une vision raisonnable de la conception des risques et des objectifs, mais surtout d’un plan de dépistage accessible à tous les Algériens. Le manque de tests PCR au niveau des établissements publics et leur commercialisation à des coûts excessifs par les cliniques privées relancent le débat sur les intentions du gouvernement concernant la privatisation progressive des soins. Depuis plusieurs semaines, les tests PCR sont commercialisés à 15.000 dinars par certaines cliniques, alors que ce test devait être accessible à tous les citoyens à des prix abordables, si ce n’est pas gratuit. Ce qui n’est déraisonnable en rien vue les proportions que prend aujourd’hui la progression du Covid-19 sur le territoire national.
Se faire dépister est devenu un privilège pour les personnes vulnérables et démunies. En effet, les personnes suspectées de Coronavirus n’ont pas d’autres alternatives que le test PCR qui est plus pertinent et performant comparé au scanner dont les résultats ne sont pas fiables, selon les récentes déclarations du directeur général de l’Institut Pasteur, Fawzi Derrar. Se faire dépister dans de telles conditions est devenu une mission impossible pour de nombreuses personnes, malgré leur crainte. Elles préfèrent se confiner et recourir à l’automédication pour se rassurer et par précaution, ce qui rend difficile le recensement du nombre réel de personnes atteintes du Covid-19. Par conséquent, nombreux sont ceux qui pensent que la Covid-19 a contaminé un très grand nombre d’individus à différents degrés dans la société. Une autre réalité qui explique le cafouillage autour du bilan quotidien des contaminations au Coronavirus et des décès.
Cet effet de causalité est évoqué par plusieurs spécialistes de la santé qui appellent les citoyens à se conformer strictement aux mesures barrières, étant l’unique solution possible et accessible à tous. Ces dernières semaines, des profes- sionnels de la santé prennent la parole et dénoncent sur les réseaux sociaux ou différents supports d’information la situation «catastrophique des établissements publics, surchargés», mais aussi interpellent les autorités pour aider les citoyens à se faire dépister. Même les sociologues tirent la sonnette d’alarme sur les conditions de vie de plusieurs citoyens qui baignent dans la précarité et qui sont exposés au risque de contamination au Covid-19. Dénonçant ainsi le prix exorbitant des tests PCR (entre 15.000 et 18.000 dinars), ce qui est inconcevable dans cette conjoncture.
Devenue la plate-forme d’information et de communication par excellence, plusieurs personnes, n’hésitent par à exposer leur expérience sur les réseaux sociaux et pointer le coût des tests PCR au niveau des cliniques privées. «Les offres de services au niveau de certaines cliniques diffèrent selon la prestation», a noté une internaute qui a lancé un message d’alerte sur «la souffrance qu’endurent les personnes suspectes du Covid-19». Dr Derrar a reconnu lui-même que «les prix des tests PCR appliqués par les laboratoires privés sont excessifs», sans évoquer, toutefois, la possibilité du plafonnement des prix, actuellement.
Rappelons qu’au début de l’épidémie le Pr Bekkat Berkani avait appelé à autoriser les laboratoires privés à effectuer les tests PCR afin de réduire la pression sur l’Institut Pasteur et amplifier les opérations de dépistage. Ce qui n’est pas le cas en raison de l’inaccessibilité de ce test à une large partie de la société. Faire face à la marée montante du Covid-19 est «très difficile» et la situation sanitaire actuelle augure un avenir incertain et inquiétant.
Samira Takharboucht