Face aux tensions géostratégiques et budgétaires, pour le redressement national, la nécessaire cohésion nationale et la construction d’un front intérieur en faveur des réformes

Stabilité méditerranéenne et africaine

Les impacts de l’épidémie du coronavirus, le réchauffement climatique et les enjeux aux frontières de l’Algérie préfigurent d’importantes reconfigurations géopolitique et géoéconomique mondiales et régionales. C’est que cette région connaît d’importants trafics qui alimentent le terrorisme risquant de déstabiliser toute la région.

2-Les différents trafics sont liés à l’importance de la sphère informelle, produit des dysfonctionnements des appareils de l’Etat, en fait de la gouvernance, du poids de la bureaucratie qui entretient des relations diffuses avec cette sphère et des distorsions des taux de change, représentant en Afrique sahélienne plus de 80% de l’emploi et plus de 50% du produit intérieur brut, (Etude sous la direction du professeur Abderrahmane Mebtoul parue en décembre 2013 à l’Institut français des Relations Internationales – IFRI – (3e think tank mondial) sur le thème «Le Maghreb face à la sphère informelle et les enjeux géostratégiques au Maghreb», réactualisée dans la revue stratégie IMDEP/MDN 2019 – Conférence à l’Ecole supérieure de guerre devant les officiers supérieurs le 19 mars 2019, 10-12h et devant l’ensemble des attachés économiques des ambassades accrédités à Alger au siège de l’ambassade US de 18-20h «Face à la baisse de la rente des hydrocarbures quelles perspectives géostratégiques pour l’Algérie»). Le terrorisme international profite des dysfonctionnements de régulation des Etats et a au moins cinq caractéristiques en commun. Premièrement, largement sur des réseaux souvent établis dans de vastes zones géographiques où les personnes, les biens et l’argent circulent. Deuxièmement, le contrôle par le commandement et la communication.
Troisièmement, leur besoin de traiter de grandes quantités d’argent, de les blanchir et de les transférer à travers les pays et les continents. Quatrièmement, les criminels et terroristes ont tendance à se doter d’armées privées, d’où un besoin de formation, des camps et du matériel militaire. Cinquièmement, les terroristes et criminels de la zone sahélienne partagent les caractéristiques communes : pratique fréquente d’opérations clandestines cherchant la légitimité dans le soutien des populations avec l’usage de guérillas durables pour pouvoir contrôler un territoire et des populations ; sixièmement, ces guérillas créent des cellules spécialisées dans l’usage des médias et de l’Internet pour diffuser leur propagande et leurs revendications. Ainsi, nous avons différentes formes de criminalité transnationale organisée qui est une industrie en constante évolution, qui s’adapte aux marchés et crée de nouvelles formes de délinquance, s’agissant d’un commerce illicite qui transcende les frontières culturelles, sociales, linguistiques et géographiques.
La combinaison de ces divers éléments, selon des schémas extrêmement complexes, induisent un climat d’insécurité croissant propice à la déstabilisation des Etats sahéliens, faute d’une bonne gouvernance. 3.- Je rappelle les différents éléments de trafics. Premièrement, nous avons le trafic de marchandises. Pour l’Algérie, existent des trafics de différentes marchandises subventionnées comme le lait, la farine achetées en devises fortes, le trafic de carburant représenterait un manque à gagner de plusieurs centaines de millions de dollars pour le Trésor public, c’est énorme. Cela est lié globalement à la politique des subventions généralisées sans ciblage et à la distorsion des taux de change par rapport aux pays voisins. Deuxièmement, nous avons le trafic d’armes. Le marché «noir» des armes et de leurs munitions, issu nécessairement du marché «blanc» puisque, rappelons-le, chaque arme est fabriquée dans une usine légale, est une thématique qui permet de comprendre les volontés de puissance des divers acteurs géopolitiques à travers le monde. Tandis que le trafic de drogues est réprimé internationalement, le trafic d’armes est réglé par les Etats qui en font leurs bénéfices. La vente d’armes s’effectue régulièrement entre plusieurs partenaires privés et publics. Troisièmement, nous avons le trafic de drogue. La montée en puissance du trafic de drogue au niveau de la région sahélienne a des implications sur toute l’Afrique du Nord où nous pouvons identifier les acteurs avec des implications géostratégiques, où les narcotrafiquants créent de nouveaux marchés nationaux et régionaux pour acheminer leurs produits. Afin de sécuriser le transit de leurs marchandises, ces narcotrafiquants recourent à la protection que peuvent apporter, par leur parfaite connaissance du terrain, les groupes terroristes et les différentes dissidences, concourant ainsi à leur financement.
Le trafic de drogue assure une marge de bénéfice très élevée : un gramme de coca, qui coûte 1 dollar à la production, est vendu de 200 à 300 dollars. Quatrièmement, nous avons la traite des êtres humains. C’est une activité criminelle internationale dans laquelle des hommes, des femmes et des enfants sont soumis à l’exploitation sexuelle ou à l’exploitation par le travail. Nous avons le trafic de migrants qui est une activité bien organisée dans laquelle des personnes sont déplacées dans le monde en utilisant des réseaux criminels, des groupes et des itinéraires. Cinquièmement, nous avons le trafic de ressources naturelles qui inclut la contrebande de matières premières telles que diamants et métaux rares (provenant souvent de zones de conflit) et la vente de médicaments frauduleux potentiellement mortelle pour les consommateurs. Sixièmement, nous avons la cybercriminalité. Elle est liée à la révolution dans le domaine des systèmes d’information qui peut déstabiliser tout un pays tant sur le plan militaire, sécuritaire qu’économique. Il englobe plusieurs domaines exploitant notamment de plus en plus l’Internet pour dérober des données privées, accéder à des comptes bancaires et obtenir frauduleusement parfois des données stratégiques pour le pays. Le numérique a transformé à peu près tous les aspects de notre vie, notamment la notion de risque et la criminalité, de sorte que l’activité criminelle est plus efficace, moins risquée, plus rentable et plus facile que jamais. Septièmement, nous avons le blanchiment d’argent.
C’est un processus durant lequel l’argent gagné par un crime ou par un acte illégal est lavé. Il s’agit en fait de voiler l’origine de l’argent pour s’en servir après légalement. Les multiples paradis fiscaux, des sociétés de clearing (aussi Off Shore) permettent de cacher l’origine de l’argent. 4. Face à cette situation complexe et en perpétuelle mutation, la stratégie diplomatique et militaire de l’Algérie est guidée par des principes fondamentaux : la mise en place d’un dispositif de sécurité aux frontières et la restructuration des forces armées et de sécurité ; l’amorce de processus bilatéraux de coopération avec les pays voisins ; le développement d’un processus multilatéral à travers l’initiative des pays de Cham ; la non ingérence dans les affaires intérieures des Etats et en cas exceptionnel prévu dans la Constitution adoptée le 1er novembre 2020, l’article 91 consacre, que le chef de l’état «chef suprême les forces armées de la République» et «responsable de la Défense nationale peut décider «l’envoi d’unités de l’armée nationale populaire à l’étranger». Mais cette décision est subordonnée à l’approbation à la majorité les deux tiers du Parlement, tout en déterminant le cadre de participation des forces militaires algériennes en dehors les frontières.
(Suite et fin) A. M.