L’Algérie engage «une course contre la montre»

Entrée en vigueur sous haute tension (algéro-marocaine) de la ZLECAF

Cap sur l’inconnu ? Depuis plusieurs mois, l’économie algérienne tourne au ralenti à cause de la crise du Coronavirus doublée d’une crise financière sans précédent entraînée par la chute des cours du pétrole pendant des mois avant de retrouver leurs sommets, en novembre dernier.

Ce rebond ne signifie en aucun cas la fin de la crise économique qui a plongé le pays dans une période d’austérité fragilisant toutes les perspectives de sortie de crise. La stabilité politique intérieure suivie de la mise en œuvre accélérée des réformes structurelles et financières sont considérées unanimement comme étant les seules leviers de sortie de crise. Héritant d’une situation politique et économique chaotique après vingt ans de mauvaise gouvernance, de corruption et de malversation, l’Etat tente de trouver son équilibre et de défendre son «plan de développement» axé sur la «libéralisation de son marché commercial et énergétique». Sur le plan commercial, l’Algérie veut profiter des avantages du commerce intra-africain à travers l’adhésion de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), dont l’entrée en vigueur est prévue pour janvier 2021.
Une initiative saluée par l’organisation du Commerce internationale (OMC), qui a toutefois mis en garde le manque de coordination entre les 55 pays signataires et l’absence d’une stratégie nationale de ces pays qui pourrait anticiper l’échec de ce projet. Une initiative qui peut aussi être mise en danger et désintégrée par les multinationales. Ce qui interroge sur l’intention de chaque pays ayant ratifié la convention de la ZLECAF. Il faut faire face aux effets endogènes et exogènes qui peuvent influencer l’aboutissement de ce projet. Les bras de fer permanents entre l’Algérie et le Maroc qui s’apprêtent à ratifier cet accord peuvent influencer la mise en œuvre prochaine de la ZLECAF que chaque partie défende à sa manière. Des contraintes visibles sur le terrain et le manque de coordination constituent une réelle contrainte pour parvenir à un consensus économique africain.
Depuis 2012, l’Algérie, le Maroc, la Tunisie, l’Egypte, la Libye, la Mauritanie et le Soudan étaient réticents à l’idée de créer une zone commune de libre-échange. A chaque rencontre africaine consacrée au projet, ces pays notent le retard pris dans le processus de sa mise en place et soulignent la difficulté de poursuivre les négociations contrairement aux autres pays africains (Est, Ouest, Central et même du sahélo-saharien). L’Algérie a rejoint définitivement la ZLECAF et a exprimé son ambition de contribuer au développement du commerce intra-africain. Les pays membres de l’Union du Maghreb arabe et la Communauté des États sahélo-sahariens, dont le Sahara occidental, ont intégré officiellement la ZLECAF qui comprend 55 États de l’Union africaine. Tous ces pays souhaitent saisir cette opportunité qui a un potentiel de rassembler plus de 1,2 milliard de consommateurs, pour un PIB de plus de 2.500 milliards de dollars.
Avec la reprise progressive de l’économie mondiale prévue en 2021 suite à la mise au point d’un vaccin anti-Covid-19 et le début des campagnes de vaccination ainsi que la hausse des cours du pétrole. Plusieurs bouleversements politiques et économiques mondiaux ont marqué l’année 2020, dont la plupart des évènements sont des prémices d’un nouvel ordre mondial. Depuis quelques semaines, le torchon brûle entre l’Algérie et le Maroc. La situation s’est aggravée avec l’annonce du président américain sortant Donald Trump «la marocanisation du Sahara occidental». La polémique enfle depuis cette annonce qualifiée d’«unilatérale», par la Russie et «inadmissible et infondée» par plusieurs autres pays et organisations internationales dont l’ONU qui a reconnu sa défaite dans la gestion de ce dossier.
Au-delà de l’impact politique sur la région, l’impact économique sera dévastateur. Les rumeurs sont reines depuis cette annonce. Des médias évoquent d’ores et déjà un bras de fer entre l’Algérie et le Maroc concernant la construction du premier gazoduc relié au Nigeria. L’Algérie vient juste d’annoncer la relance du projet du gazoduc transsaharien entre Alger et Abuja qui remonte aux années 80, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) annonce l’examen de la réalisation du projet du gazoduc Nigeria-Maroc. Le sujet semble diviser. De nouvelles alliances se forment au sein des mêmes communautés et pays qui sont membres de la ZLECAF. Des frictions qui peuvent influencer l’entrée en vigueur de la zone de libre échange africaine !! L’Algérie subit depuis des mois des campagnes hostiles de l’extérieur visant à déstabiliser ses positions au niveau régionales. Un jeu malsain auquel l’Algérie n’adhère pas et tente malgré sa vulnérabilité financière d’amorcer la transition économique et énergétique pour effacer des années d’échec et de «servitude».
Samira Takharboucht