Une puissance méditerranéenne sur près de cinq siècles

Royaume de Numidie

« Je voudrais que mes phrases soient écrites pour toujours », disait Hemingway. Il aspirait à écrire des livres vrais, qui resteraient en nous à tout jamais.

Le royaume de Numidie a été, avec Rome et Carthage, l’une des principales «puissances politiques économiques et militaires du bassin méditerranéen pendant plus de cinq siècles», indique le chercheur Farid Ighilahriz qui a évoqué les spécificités des différentes périodes d’évolution du royaume et son apport à la civilisation du sud du bassin méditerranéen. Dans un entretien à l’APS l’archéologue et préhistorien est revenu sur l’unification de la Numidie et les différentes guerres et alliances entre les trois puissances qui ont conduit l’aguellid Massinissa (238 – 148 av. J-C) sur le trône de ce royaume, symbole d’un «territoire unifié et de la civilisation du sud du bassin méditerranéen».
De l’époque de Massinissa, dont le règne a duré plus de cinquante ans, le chercheur retiendra «la création et le développement de comptoirs commerciaux et d’un commerce international, la création d’un réseau routier, le développement de l’agriculture et la sédentarisation de la population ainsi que la création d’une monnaie» à une période où le troque était encore une pratique courante dans de nombreux pays. Farid Ighilahriz, ancien directeur du Centre national de recherche en archéologie (Cnra) évoquera également l’apport de Micipsa, fils de Massinissa qui avait «installé une organisation et un découpage administratif des territoires» avant de revenir sur la résistance militaire de Jugurtha (160 – 104 av. J-C) qui a duré sept ans avant la trahison de Bocchus qui l’avait livré à l’armée romaine.
La résistance à la main mise romaine se poursuivra encore sous le règne de Juba I (85 – 46 av. J-C), après sa défaite et sa mort, un nouveau découpage du royaume de Numidie est imposé par l’empire romain. Le nouveau royaume de Maurétanie, qui s’étend de l’océan atlantique jusqu’à l’actuel ville de Sétif, sera confié au roi Juba II (52 av. J-C- 23 ap. J-C), fils de Juba I et descendant de la lignée de Massinissa, qui est né à Hippone (Annaba) et a été formé et éduqué à Rome avec une forte influence hellénistique. Juba II prendra pour capitale Césarée, actuelle Cherchell, où il va créer une grande ville avec son épouse Cléopâtre Séléné, fille de Cléopâtre et de Marc Antoine, qui avait également reçu la même éducation.
Cette période sera marquée, selon Farid Ighilahriz, par un grand intérêt pour «les arts, le théâtre notamment, la littérature, et les sciences, qui découle de la formation de Juba II qui avait lui-même rédigé une dizaine d’ouvrages dans différents domaine dont la botanique et la géographie». Ce roi est également connu pour avoir construit de nombreux théâtres, thermes, temples, jardins publics et le célèbre mausolée royal, un tumulus de pierre à l’architecture purement berbère. Considéré comme un lettré et un érudit par les écrivains de l’antiquité, Juba II se verra ériger une statue commémorative à Athènes.
R. C.