Une relance économique en «suspens pour 2021»

Après une année de tous les déficits, les autorités se préparent

La pandémie a eu des répercussions désastreuses sur les Algériens et sur l’économie formelle et informelle du pays qui a fait face, également, aux conséquences de l’actionnement de la planche à billets en 2017 et à la tendance lourde de la chute continue des cours du pétrole sur le marché mondial et du dinar. Dans l’ensemble, tous les indices sont décalés vers le bas par une réalité macro-économique décevante précipitant le pays dans l’austérité.

Malgré les chiffres insolents de l’économie nationale, l’Etat espère dès 2021 amorcer une phase de transition vers l’économie du marché et accélérer le processus des réformes économiques pour équilibrer ses finances. C’est l’objectif attendu à considérer les grandes orientations de la loi de Finances 2021 qui prévoit de nouvelles règles fiscales, commerciales et financières au profit des entreprises. Une politique qui devait soutenir la relance du tissu industriel et financier, cependant, il faudrait corriger et stabiliser les dérapages de la dette publique. Ainsi mener des réformes ponctuelles, mais coordonnées afin de garantir l’aboutissement des transformations financières, bancaires, commerciales, sociales et technologiques pour éviter un naufrage économique certain. Malheureusement l’environnement actuel est caractérisé par une crise financière inédite, plombée par la pandémie et par d’importants déficits budgétaires. 2020 était une année très difficile pour les ménages et les entreprises qui s’interrogent d’ores et déjà sur ce qui se passera en 2021. Est-ce une crise ou une reprise ? Le rapport annuel de la Cour des comptes dresse un tableau plutôt «morose» de la situation économique nationale et territoriale. Plusieurs dysfonctionnements ont été relevés par cette administration qui accuse en premier lieu la mauvaise maîtrise du processus du désendettement par les administrations, les entreprises et les banques publiques et l’absence d’une planification stratégique des réformes qui doivent être menées au niveau national et local.
La hausse des dépenses publiques en 2020, la baisse des recettes étatiques et l’épargne ont eu des répercussions dévastatrices sur le Trésor public et le budget de l’Etat. Ce dernier a injecté d’importantes sommes pour soutenir les ménages durement touchés par la crise sanitaire et économique suite à l’arrêt de l’activité de plusieurs entreprises. Le résultat de ces dernières en 2020 et la structure de leur bilan s’est détérioré avec la hausse de l’endettement et l’érosion de leurs fonds propres se trouvant ainsi dans l’incapacité de couvrir le fonds de roulement, par conséquent, les salaires. La décision du confinement de la population et la fermeture des frontières, brusquement, a plombé tous les indicateurs macro-économiques et micro-économiques du pays. Ce qui s’est confirmé par la dégradation de l’activité du marché formelle et informelle, impacté les secteurs économiques à différents niveaux. Au bout de quelques semaines, aucun marché ne semblait plus en mesure de résister au confinement qui a plongé les ménages et les opérateurs économiques dans un climat d’incertitude, avec des prévisions plutôt sombres que prévues. Baisse du PIB, manque de perspective, chômage, chute du dinar et une inflation galopante… le bilan de 2020 n’est qu’une conséquence logique de la stagnation de l’activité économique et financière 2019 dont l’origine remonte à 2017, après le recours au financement non conventionnel de l’économie nationale. Depuis, l’environnement économique et social se dégrade. Le prix à la consommation augmentait alors de «0,3 %, en rythme annuel, selon l’Office national des statistiques (ONS) qui a évalué le taux d’inflation moyen annuel en Algérie à 2,2 %, à la fin du mois d’octobre».
La reprise de l’inflation a bouleversé l’environnement des marchés financiers et a creusé les inégalités sociales. Cette tendance haussière se poursuivra en 2021, selon la LF 2021 qui prévoit «une inflation à 4,5 %, en raison de la baisse de la consommation et des revenus des ménages et des sociétés, suite à l’exécution des instruments de la politique monétaire». Plus de 500.000 personnes se trouvent sans emploi à cause de la pandémie du Coronavirus, qui a explosé le taux de chômage qui, selon certains spécialistes, a dépassé les 14% en 2020 et plus de 99.000 entreprises ont déposé leur bilan. Un véritable naufrage économique qui aura des conséquences néfastes sur l’équilibre socio-économique à la clôture de l’exercice de l’année 2020. L’intervention de l’Etat pour sauver les entreprises et les emplois n’est que temporaire car la baisse de l’activité de l’économie formelle et informelle n’est pas répartie de manière homogène. Les secteurs les plus lésées demeurent les mêmes depuis le début de la crise et continuent de souffrir en raison du dérapage de dinar et l’érosion du matelas des devises qui ont chuté à 56 milliards en 2020, ce qui pourrait couvrir une période 16 mois d’importation, tandis que le dinar a perdu 10% de sa valeur sur le marché de change. Ce dérapage a entraîné une crise de liquidité grave, qui s’est installée dans la durée, et ce, malgré l’intervention de la Banque d’Algérie qui a baissé le taux de réserve obligatoire de 6 à 3 %, afin de libérer de la liquidité. D’où la décision du Gouvernement d’accélérer la mise en place du paiement électronique afin de contrôler les circuits financiers et légaliser l’argent qui circule dans l’informel qui dépasse les 8.000 milliards de dinars, soit 80 milliards de dollars.
A priori, l’Algérie sacrifie sa monnaie pour éviter l’endettement extérieur, alors que sa dette intérieure a augmenté drastiquement (57%). Elle ne peut couvrir les déficits publics au risque d’exploser l’inflation et les taux d’intérêt des banques et conduire le pays vers la faillite. Face à toutes ces dérives, certains experts estiment que l’Algérie se dirige, immanquablement, vers les services du Fonds monétaire international (FMI), ne cesse de faire pression sur l’Algérie, qui refuse catégoriquement ses offres. Par ailleurs, pour compenser le trou budgétaire, l’Algérie prévoit de renforcer son tissu industriel et libéraliser son activité commerciale avec l’entrée en activité de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) en janvier 2021. Mais aussi par la réduction de la facture des importations devant soutenir l’épargne publique et réduire le déficit budgétaire qui a dépassé 2.900 milliards de dinars en 2020, qui devra augmenter en 2021, alimenté par les mesures de soutien aux ménages et aux entreprises impactées par la crise sanitaire. Mais aussi par les dépenses imprévues et la baisse des recettes fiscales. Une autre niche que l’Etat compte réajuster afin de tirer profit à travers l’éradication de la corruption au sein de ses structures et des entreprises. Quant à la hausse du déficit du Trésor estimé à plus de 1.590 milliards de dinars, est causé par les interventions des pouvoirs publics pour couvrir le déficit structurel de la CNR (600 milliards de dinars), de celui des entreprises et administrations publiques.L’Algérie devra faire des efforts exceptionnels pour surmonter une situation exceptionnelle. Avouer une défaite pour tout reconstruire sur de nouvelles bases. Les experts n’ont d’ailleurs pas chômé, entre analyses et recommandations, les solutions à la crise ne manquaient pas.
Samira Takharboucht Voir sur Internet www.lnr.dz.com