«Il faut rejeter très vite le système d’une économie extravertie», selon Benmihoub

Les entreprises publiques doivent être «réformées ou fermées si nécessaire»

Face aux nouveaux défis posés par la double crise sanitaire et économique, un mouvement de privatisation de certaines entreprises publiques en crise pourrait suivre.

L’objectif serait de «redimensionner» le secteur public déprimé, selon ses entrepreneurs. Sauf que ce n’est pas la solution adéquate, selon certains. Il faut chercher d’autres raccourcis utiles pour changer et redynamiser le secteur public. Considérant l’entreprise publique comme le fer de lance de l’économie nationale, le professeur Mohamed Cherif Benmihoub, ministre délégué chargé de la Prospective s’est dit contre «l’idée de privatiser, à tout va, les entreprises publiques», estimant qu’«il ne faut pas reproduire les mêmes schémas qu’auparavant». Tant que «le budget de l’Etat ne peut plus faire face aux défaillances de ces dernières», il juge «important d’engager des actions pour les réformer ou bien faire cesser leurs activités». En effet, il propose deux solutions : réformer la gouvernance et la gestion sociale des entreprises publiques qui ont besoin d’être renforcées et fermer celles qui n’évoluent pas. La réorganisation et la modernisation du secteur public s’imposent d’elles-mêmes.
C’est l’objectif attendu du plan de la relance économique 2020/2024 élaboré par le Gouvernement, selon le professeur Benmihoub qui a fait état, hier, lors de son intervention sur les ondes de la radio nationale, de «la faiblesse du tissu économique national, en majorité, constitué de toutes petites entreprises, particulièrement vulnérables et fortement dépendantes des subventions publiques». L’Etat doit revoir ses priorités et engager de véritables réformes pour renforcer son tissu économique à travers l’investissement qui sera plus tard transformé en croissance et par l’exportation. Deux leviers importants pour asseoir une économie forte et résiliente.
Ce qui ne peut se faire que «par une bonne gouvernance et régulation», selon l’invité qui a mis l’accent sur «l’importance de multiplier la création de nouvelles entreprises, de toutes tailles, pour générer de la richesse et renforcer, ainsi, les quelque 1,2 million en activité». L’amélioration du climat des affaires et des investissements est aussi déterminante pour stimuler la production et promouvoir l’exportation ainsi gérer de la devise. Cependant, il faudrait éradiquer l’obstacle de la bureaucratie qui, jusque-là, a dissuadé les investisseurs étrangers de travailler en Algérie. Il a appelé à «débureaucratiser l’acte d’investissement», estimant que «ce n’est pas à l’administration d’allouer la commande publique ou bien de décider qui doit, ou non, en bénéficier». Le temps presse et la situation économique et financière du pays est très «délicate et vulnérable». Le plan de relance économique doit, selon l’intervenant, apporter les ripostes et les solutions à la crise économique et financière du pays.
Il préconise, en premier lieu, d’«analyser sans concession le système productif national, dans toutes ses composantes, afin d’améliorer la situation», évoquant en exemple le secteur des mines, «un réservoir de richesses, abandonné à lui-même, depuis très longtemps», a-t-il déploré, citant en parallèle le secteur de «l’industrie pharmaceutique et des énergies renouvelables». Des secteurs qui ont besoin d’être «rationnalisés», selon lui pour ne pas «tomber dans les mêmes erreurs que celles dont ont été l’objet les énergies fossiles». Il plaide, à ce propos, pour «le développement local de la fabrication d’un maximum d’inputs utilisés dans le renouvelable». L’objectif est de détenir un savoir-faire local et maîtriser les technologies en vue de s’affranchir de l’expertise étrangère. Le ministre délégué chargé de la prospective a mis en garde, à cet effet, contre les conséquences d’une économie extravertie, dépendante des échanges internationaux.

Il a recommandé de «rejeter très vite, le système d’une économie extravertie, consistant à importer des produits finis et à exporter de la matière première», expliquant que ce système ne fait qu’accentuer la vulnérabilité de l’économie nationale. «Il faut, désormais, faire du développement et cesser de faire de la comptabilité, en restant braqué sur les réserves de change», a-t-il souligné. Pour lui, si l’Algérie «est en panne d’une croissance forte», c’est, uniquement, à cause de sa dépendance «aux subsides générés par ses hydrocarbures», «une relation organique dont dépendent tous ses secteurs d’activités», a-t-il ajouté. L’Algérie a besoin d’une relance économique effective basée sur des bases solides «l’investissement, la production et une bonne gouvernance et régulation». Ce sont les aspects majeurs pour réussir le défi d’asseoir une économie «résiliente et inclusive». «Le pays doit se lancer dans une croissance à des niveaux élevés afin, notamment, d’absorber le chômage chronique», a soutenu, le professeur Benmihoub, qui a appelé à tirer profit ou des leçons de la crise situation «pénible qu’a traversé le pays».
Samira Takharboucht