Enième rebondissement

Sider

Que reste-t-il encore comme argument aux cadres gestionnaires pour justifier de la poursuite de l’exploitation du Complexe Sidérurgique El Hadjar (CSE). Celui-là même que plus de 55 ans après son inauguration, les anciens sidérurgistes vouent à tout sauf à une infrastructure de production sidérurgique avec ses Hauts-Fourneaux, ses laminoirs, aciéries et autres unités de production sont encore en mesure d’activer pour donner du fer et de l’acier.

Cette situation est confirmée par le dépôt de démission de Ridha Belhadj de son poste de DG. Même si la démarche a été rejetée par le syndicat, il n’en demeure pas moins qu’elle exprime le défaitisme du principal gestionnaire installé à son poste il y a à peine une année. Le communiqué qui s’en est suivi est une autre tentative de limiter l’impact de tout ce remue-ménage en révélant que le CSE a atteint cette fois-ci le bout du rouleau. Que l’enveloppe financière de 700 millions de dollars engagée pour une énième opération de réhabilitation n’a servi à rien. En tout état de cause, en déposant sa démission du poste de Directeur général, Ridha Belhadj avoue implicitement que la situation de l’entreprise est inextricable. Elle est aggravée par des conflits d’intérêts depuis avril 2020. Elle n’est pas faite pour rassurer les 5.200 travailleurs. Que ce soit du côté de la direction générale ou du syndicat elle tire au drame. Et ce n’est pas la politique des deux poids deux mesures appliquée en termes de communication extérieure depuis l’avènement de la nouvelle équipe en avril dernier, qui pourrait changer quoi que ce soit. A son installation au poste de DG, Ridha Belhadj avait exprimé un optimisme béat. Moins d’une année après, il revient pour exprimer son impuissance à redresser la situation de son entreprise. Il faut dire que déjà confrontée à la mauvaise gestion depuis les années 1980, celle-ci est toujours bloquée par la crise financière à laquelle est venue se greffer celle sanitaire crée par la pandémie Covid-19. Comme pour les précédentes situations vécues depuis la fin des années 1980, la crise financière est toujours présente. La toute dernière porte sur les 700 millions de dollars sensée avoir été engagée, et c’est la énième fois, pour la réhabilitation des installations de production. C’est ce qu’a souligné le DG dans son intervention inaugurant sa prise de fonctions. Tout en estimant difficile la situation, il avait «appelé à la conjugaison des efforts de tous pour relever le défi». Sa stratégie est basée sur l’élaboration d’urgence d’un plan de travail. Genre de feuille de route qui, selon lui, permettrait de rattraper le déficit accusé par le complexe auquel devrait être restitué les moyens nécessaires pour recouvrer sa stabilité et son équilibre financier. Pour ce faire, il avait avancé des perspectives trop optimistes similaires à celles déjà exprimées lors des différentes phases de compression. Ce que le P-dg de Sider considérait comme étant un projet du plan d’investissements devant permettre au complexe de fabriquer dès 2022 des produits ferreux conformes aux normes de compétitivité mondiale. Or, les 5.200 salariés en poste au complexe pourraient avoir à vivre d’autres fermetures d’unités obsolètes, mal configurées ou mal gérées. Alors que dans le monde, le temps est aux nouveautés en termes de production sidérurgiques et que les réflexions sont engagées pour permettre à ce secteur de reprendre du poil de la bête, chez nous on en est toujours à attendre le secours de l’Etat pour réhabiliter des installations de production maintes fois rabibochées. Dans l’état où elles sont, elles ne suffisent pas en 2021 au sauvetage de la sidérurgie algérienne ou même de ce qui pourrait en rester. La situation implique d’autres très lourdes conséquences sociales, avec des suppressions d’emplois dans les prochains mois. C’est cette démarche que Ridha Behadj a voulu éviter dans la gestion du complexe El Hadjar où tout a été fait non pas pour sauver l’outil de production, mais pour sauvegarder ce qui peut l’être de ce qui reste comme postes de travail. Ils étaient 22.000 salariés durant les années 1990 Ils ne sont plus que 5.200 en 2021. Et il faut s’attendre au pire. Le statuquo appliqué ces dernières années à des opérations de réhabilitation fait partie des discussions des syndicalistes et de leur employeur. Il est aussi question des prochaines élections qui pourraient amener une ouverture des investissements avec des possibilités de restructuration du secteur. En tout état de cause, telles que celles déjà vécues sous l’aciériste indien «Imiiltal « qui a empoché des milliards de dollars en pillant le complexe ou sous la forme d’une nationalisation intervenue par la suite, la gestion d’une industrie gérée de facto par l’État a de tout temps était un échec. Ce pourquoi, Le gouvernement doit trouver un équilibre entre les attentes des travailleurs et la réalité de la situation. Et ce n’est pas avec une gestion ouverte à pertes aux salariés qu’il pourrait imposer un quelconque changement. Finalement, il faut croire qu’en déposant sa démission de son poste de DG pour la retirer aussitôt, Ridha Belhadj se donne le temps de la réflexion. Celui nécessaire pour réaliser des machines de production à partir des planches à dessin de ses ateliers sans passer par la planche à billets de banques. C’est que la politique des Bouteflika, Sellal et consorts en termes de sidérurgie a servi beaucoup plus les dépositaires des comptes bancaires ouverts à l’étranger qu’à la sidérurgie algérienne aujourd’hui en très mauvaise posture avec une hémorragie financière qui n’a pas cessé de s’accélérer.
A. Djabali