Ecrire c’est lire en soi pour écrire en l’autre

Se connaître soi-même

C’est d’autant plus vrai qu’on ne peut pas écrire sans commencer à se connaître soi-même pour comprendre les autres sur le plan des sentiments, des désirs, des comportements psychologiques et de tout ce qui peut agiter intérieurement les individus. Lire en soi pour comprendre ce qu’est l’autre qu’on finit par découvrir dans toute sa complexité intérieure.

Lorsqu’on s’est bien lu, on est supposé avoir compris que les milliards d’hommes qui peuplent la planète sont autant d’individualités avec chacun des envies, des intentions, un quotient intellectuel, des capacités de mémorisation, de réflexion, de raisonnement, d’imagination, de concentration, de mémorisation ; bref, un ensemble de caractéristiques qui permettent de le distinguer des autres individus. Quand on arrive à comprendre ce qui nous tourmente intérieurement, on finit par savoir ce dont sont préoccupés les autres compte tenu du fait que chacun pense différemment en ayant une conception personnelle de la vie. De plus, chacun a des projets dans la vie, des projets de vie familiale, de vie professionnelle, d’abord à l’état virtuel c’est-à-dire qu’il en a la conception, avant de passer à la réalisation qui va peut-être s’avérer impossible. Ce qu’on lit sur soi, c’est également l’ensemble des revers, des déceptions, les malheurs, peut-être des coups durs qu’on a subis et qui ont eu un impact pour l’avenir. Il y a aussi les joies éprouvées personnellement ou en famille par les succès qui ont été déterminants pour la vie future, les conflits qu’on a eus avec les voisins, les proches et qui font partie des problèmes de la vie, on en souffre et on en porte les stigmates indélébiles. Ainsi nous devenons plus tolérants vis-à-vis des gens réservés ou trop expansifs, sinon hypocrites dans leur comportement parce que tel est leur nature.
Un romancier choisit des types particuliers de personnages devant jouer le scénario dans l’univers spécifique de son œuvre classique qui a un début, une fin, des étapes intermédiaires. Emile Zola, quand à lui, préfère les cas pathologiques devant s’affronter perpétuellement ; par deux caractères sanguins réputés pour leur caractère colérique et par conséquent, ne devant pas cohabiter. Zola en fait un couple marié pour permettre aux lecteurs d’assister à des scènes de ménage interminables. Si vous ne connaissez Emile Zola, il est fils d’ouvrier italien. Il s’est formé en autodidacte et ça ne l’a pas empêché de devenir un grand romancier naturaliste. Il avait un ami belge spécialiste en psychothérapie et psychanalyse qui lui envoyait des revues qui traitaient de sujets liées à ces spécialités et surtout des caractères humains. C’est pourquoi, la plupart de ses personnages sont des psychopathes. Savoir lire en l’autre, personnage d’œuvres littéraires Il s’agit de personnages atypiques qui se distinguent du commun des mortels par la pensée, le regard, peut-être le niveau de connaissances, comme dans ce roman fondé sur la vie d’un jeune plein d’ambition sociale cherchant à faire son destin qui s’est avéré être après des années un destin tragique alors qu’au départ, il avait tout pour mener une vie heureuse. Sa tenue vestimentaire, son niveau intellectuel, sa beauté physique le prédestinait à vie à une heureuse.
Mais l’itinéraire suivi l’a conduit à la séduction puis au tribunal. Dans les romans de Zola, les personnages sont choisis en fonction de leur état psychologique à une époque importante de l’histoire, celle de l’exploitation à outrance des masses ouvrières, celles des mineures au service d’une bourgeoisie industrielle qui cherchait à gagner toujours plus. E.Zola leur a consacré un roman « Germinal » pour informer le monde sur cette galère de travail des mineurs qui en plus d’être mal payé, avaient un volume de travail digne des esclaves. L’auteur étant un spécialiste des caractères humains, a constitué des couples mal assortis pour faire la démonstration que deux caractères sanguins ne peuvent cohabiter ; lui, il a choisi un homme et une femme de caractère sanguin alcooliques tous les deux et on assiste à des disputes quotidiennes. Par ailleurs, comme il connaissait parfaitement la réaction de chaque type de situation donnée. D’abord, le fils de ce couple, une fois grand et qu’il a atteint l’âge adulte, il est devenu violent, c’est pourquoi il s’est fait virer des chemins de fer où il travaillait, parce qu’il avait donné un coup de poing à son chef. Cette violence, il l’a hérité de son père qui frappait sa mère. Aussi, ses parents ont plusieurs fois divorcé. Les enfants qui naissent dans une telle ambiance familiale ne peuvent pas être équilibrés. Zola connait bien tous ces phénomènes pour les avoir étudiés dans les revues de psychiatrie que lui envoyait régulièrement son ami belge. « Germinal » est ce qu’on appeler un roman réaliste, c’est-à-dire qu’il est conforme à la réalité de le son temps.
Pour réaliser tous ses romans réalistes, il a suivi la méthode expérimentale à la manière de Flaubert, tous les deux ont appartenu au mouvement surréaliste. Les personnages qui jouent bien leur rôle peuvent être des personnages réels ou fictifs. L’auteur les a crées et mis en scène pour accomplir des actions qui sont les leurs et il les a conçus de telle sorte qu’ils soient en harmonie avec les autres pour créer une illusion du réel dans l’univers romanesque. Du roman réaliste au roman policier en passant par le fait divers et l’anecdote Revenons au sujet « L’écriture c’est lire en soi pour écrire en l’autre », c’est-à-dire qu’il faut bien se connaitre, pour connaitre l’autre et le comprendre. Et puisqu’on parle de réalisme, de fait divers, d’anecdote et de roman policier, parlons du Belge Simenon, spécialiste hors catégorie du roman policier, pour en avoir écrit prés de trois cents. Si vous connaissez le roman policier, il est inspiré des faits divers, et il n’y a pas de plus réaliste qu’un fait divers de catégorie « méfait » qui rapporte le récit récent d’un assassinat en indiquant bien qui est la victime, dans quelles condition elle a été assassinée, le mobile et l’auteur présumé du crime deviennent l’affaire du romancier, la matière essentielle de l’auteur du roman. « Le veuf » admirablement bien écrit par Simenon, est un roman qui raconte l’histoire d’un homme abandonné par sa femme que la police retrouve morte dans une chambre d’hôtel. Mais comment a-t-elle pu arriver à passer de vie à trépas. Son mari fait semblant d’être intrigué et dans le meilleur des cas, il aurait mené l’enquête à son compte.
L’enquête menée par la police est arrivée à la conclusion que la dame s’est suicidée. Au cours d’une reconstitution psychologique, il finit par comprendre que c’est à cause de lui que sa compagne s’est donné la mort. Le fait divers sert de prétexte et de point de départ à une vraie auto psychanalyse de l’enquêteur. La vie de l’homme intéressé par le seul souci du confort, son optimisme, ses comédies, sa mauvaise foi, ont amené sa femme au suicide. Après une reconstitution psychologique, ce mari coupable s’est avéré être un lâche, normalement, il est condamnable et doit se considérer comme tel. Bien des affaires de meurtres où la femme est victime innocente, sont prises en main par des enquêteurs policiers qui veulent mettre au grand jour les responsabilités. Et une fois la victime et l’auteur du crime connus, elle devient l’affaire du tribunal. On a dans les affaires suivies par Simenon, cette histoire d’une femme tuée par son mari qu’elle trompait. L’anecdote, source d’inspiration de bien des romanciers célèbres Les romans qui partent des informations données par l’anecdote sont généralement les meilleurs, au début ils sont assurés d’avoir une coloration pour devenir les meilleurs parmi les autres récits romanesques qui ont puisé à d’autres sources. Le roman anecdotique et réaliste, tiré souvent d’un fait divers, s’est défendu par l’intervention du narrateur chargé de lui donner une coloration grâce à son imagination. Imaginez la longueur du fait divers en tant que récit bref et d’actualité occupant un petit carré d’une page de journal, par rapport au roman qui a un volume de 200 pages au minimum, on se rend compte de l’importance du travail du narrateur qui doit savoir broder par son style et pour obtenir un roman digne d’appartenir à la famille des romans réalistes. Il ne faut pas oublier André Gide qui est parti d’un simple fait divers pour bâtir un roman de prés de 500 pages « Les faux monnayeurs ».

Boumediene Abed