«L’explosion de la consommation énergétique menace sérieusement les exportations»

Pr Mourad Preure, expert international en pétrole :

L’expert international en pétrole, le Professeur Mourad Preure a estimé, hier mardi à Alger, que l’Algérie doit diversifier ses ressources énergétiques. «Il faut que la compagnie nationale des hydrocarbures, Sonatrach, s’oriente pour être le grand leader dans la transition énergétique», a-t-il indiqué, relevant que la véritable force de l’Algérie c’est son ensoleillement, qui est exceptionnel avec 3.500 heures par an sur 86 % du territoire national.

«L’Algérie a les moyens de s’imposer, dans les 20 prochaines années,  comme un leader de la transition énergétique», a-t-il observé. Intervenant sur les ondes de la Chaîne III de la radio algérienne dont il était l’invité de la rédaction, l’expert international en pétrole a évoqué la problématique de la consommation énergétique qui a, a observé le Pr Mourad Preure,  explosé carrément ces dernières années et menace sérieusement les exportations.
«On consomme 46 milliards de m3 de gaz annuellement, soit une augmentation de 53 % depuis 2009, c’est excessif», affirme-t-il. Relevant que la quantité de gaz qui devrait être réinjectée dans les gisements, notamment à Hassi Messaoud et Hassi R’mel pour augmenter la pression, a été réduite et dirigée vers l’exportation. C’est, a poursuivi l’invité de la rédaction de la chaîne III de la Radio algérienne, inacceptable.
«Non seulement on n’a pas investi, mais également on a malmené nos gisements», a ajouté le Pr Mourad Preure, rappelant que le pétrole est une industrie à long terme et que nos installations ont souffert. «Nous subissons actuellement les conséquences de ce que nous n’avons pas fait, il y a 15 ans. C’est un effet mécanique», a-t-il dit. A la mi-novembre dernière, avait indiqué que la compagnie nationale des hydrocarbures, Sonatrach, se doit de devenir un leader mondial dans les énergies vertes surtout, avait-il dit, en cette période de crise sanitaire qui freine l’économie mondiale causant ainsi une baisse des prix de pétrole. «Les compagnies pétrolières sont en train de basculer vers les énergies renouvelables alors que nous on pense pétrole et hydrocarbures. Nous marchons à contre-sens dans une autoroute», avait-il relevé. C’était sur les ondes de la Chaîne III de la Radio algérienne dont il était l’invité de la rédaction.
Sonatrach, avait-il poursuivi, doit basculer vite vers les énergies renouvelables puisque la demande pétrolière ne peut pas reprendre. Mettant en avant les dernières prévisions du FMI, selon lesquelles l’économie mondiale devrait connaître une récession de plus de 4 % en 2020.  «Les grandes compagnies pétrolières ont déjà anticipé les choses en commençant à devenir des compagnies énergétiques, à l’instar de la compagnie British Petroleum qui veut multiplier, par dix, ses dépenses dans les énergies renouvelables d’ici 2030 et atteindre 5 milliards de dollars. Mais aussi de Total qui vise à être, d’ici 2030, dans le top cinq des producteurs des énergies vertes», avait-il dit. Pour cet expert international en pétrole, l’ascension après cette crise sera lente et incertaine et que pour retrouver le niveau de croissance de 2019, il faudra attendre entre trois ans et quatre ans, dans de telles conditions la demande pétrolière va certainement se réduire.
«Nous sommes face à un véritable choc baissier», avait encore poursuivi le Pr Mourad Preure. Faisant observer que ce choc survient dans un contexte exceptionnel où il y a une surabondance de l’offre de pétrole et où la demande ralentit à cause de l’épidémie du Coronavirus (Covid-19). Nous sommes dans une situation de grande imprévisibilité et de forte incertitude», avait-il dit. Il y a, avait ajouté cet expert international en pétrole, une réalité qu’il faut prendre en compte. «L’Algérie doit changer de stratégie et s’investir dans les renouvelables. La transition énergétique ne doit pas se résumer à l’importation de systèmes solaires, mais prendre la dimension d’une véritable ambition industrielle qui entraîne dans son sillage industrie, universités et recherche nationale. La compagnie nationale des hydrocarbures, Sonatrach, a les moyens d’être la locomotive de la transition énergétique dans notre pays».
Rabah Mokhtari