Les facteurs déterminants du cours des hydrocarbures

Face aux enjeux géostratégiques

Evitons de fonder une politique économique sur des modèles appliqués aux pays développés, déconnectés des réalités nationales.

Septièmement, les USA/Europe qui représentent actuellement plus de 40% du PIB mondial pour une population inférieure à un milliard d’habitants poussent à l’efficacité énergétique avec une prévision de réduction de 30% et l’urgence d’aller vers la transition énergétique afin de luter contre le réchauffement climatique car si les Chinois, les Indiens et les Africains avaient le même modèle de consommation énergétique que les USA et l’Europe, il faudrait cinq fois la planète actuelle où je rappelle que selon le rapport de l’ONU une sécheresse sans précédent frappera l’Afrique du Nord et l’Afrique sub-saharienne entre 2020/2025. Cela d’autant plus que la majorité des pays ont entériné l’Accord de la COP21 avec le retour des Américains aux accords qui repose sur des efforts de limitation du recours aux énergies fossiles, charbon et pétroler horizon en tête, le monde s’orientant vers un Mix énergétique, l’énergie de l’avenir horizon 2030/2040 étant l’hydrogène où la recherche développement connaît un réel essor. Huitièmement, les tendances sont à une nouvelle division et spécialisation internationale avec la concentration de l’industrie manufacturière forte consommatrice d’énergie en Asie qui absorbera 65% de la consommation mondiale horizon 2030, notamment l’Inde et la Chine. Les relations clients-fournisseurs seront à leurs avantages, pour avoir des avantages comparatifs et pousseront à la baisse des prix. Neuvièmement, l’occupation par les terroristes de champs pétroliers et gaziers les écoulements au marché noir notamment en Irak pour un baril entre 30/40 dollars ainsi que l’Iran avec l’embargo surtout en direction de l’Asie. Dixièmement, l’évolution des cotations du dollar et l’euro, toute hausse ou baisse du dollar, pouvant entraîner un écart de 10/15%. Le cours euro-dollar ayant été coté le début de l’année 2020 à environ 1,10 dollars et dépassant actuellement à plus de 1,21 dollar, cette dépréciation du dollar, du fait du déficit budgétaire américain a conduit à augmenter le cours du Brent entre 10/15%. Onzièmement, le niveau des stocks américains et souvent oubliés les stocks chinois, la baisse des prix du pétrole ayant permis à la Chine d’économiser un montant important de sa facture énergétique.

2- Face à cette dépendance des hydrocarbures, dont le prix échappe à toute décision interne, que faire ?
La situation socio-économique en ce mois de février 2021, contrairement aux discours démagogiques, auxquels plus personne ne croit, est très préoccupante devant avoir un discours de vérité. Sans renouveau de la gouvernance et de profondes réformes structurelles, l’Algérie restera dépendante de cette ressource éphémère en attendant son épuisement. En cette période difficile de tensions budgétaires, personne n’ayant le monopole de la vérité et du nationalisme, l’Algérie doit mobiliser tous ses enfants sans exclusive, favoriser le dialogue productif, évitant les dissensions inutiles ou pouvoir, opposition et experts non organiques, doivent contribuer au redressement national dont une croissance négative ou faible, devant être supérieure au taux de croissance démographique, peut avoir des répercussions tant nationales, sociales, politiques que géostratégiques au niveau de la région existant un lien dialectique entre sécurité et développement. Evitons de fonder une politique économique sur des modèles économétriques appliqués aux pays développés déconnectés des réalités nationales. Car, les enjeux géostratégiques mondiaux, le nouveau modèle de consommation qui devrait faire émerger un nouveau pouvoir énergétique mondial horizon 2020, et les facteurs techniques économiques sont les déterminants du cours du pétrole.
Les réserves sont fonction à la fois du coût et du vecteur prix international, plus le prix est élevé plus certaines réserves marginales deviennent rentables. Pourra-t-elle profiter d’une éventuelle hausse des prix avec la baisse de la production exportable en volume physique ? Pour 2020-2021, il faudrait un cours supérieur à 100 dollars le baril pour équilibrer le budget en n’oubliant pas que selon le bilan de 2018 nous avons la structure d’exportation suivante : GN, 32,9%, GNL, 14,4% (au total gaz 47,3%) pétrole brut 25,2%, condensat, 4,4%, produits raffinés 15,6%, Gpl 7,6%. Une hausse d’un dollar en moyenne annuelle procure entre 300-400 millions de dollars supplémentaires à l’Algérie permettant de limiter le déficit budgétaire car l’artifice comptable du dérapage du dinar par rapport au dollar réduit artificiellement le déficit du trésor par l’augmentation de la fiscalité hydrocarbures, idem pour la fiscalité ordinaire via les importations tant en dollars qu’en euros. Il ne faut pas être utopique, l’Algérie dépendra encore pour de longues années des hydrocarbures pour ses entrées en devises selon un bilan en Conseil des ministres de 2015, l’Algérie aurait seulement entre 2500/3000 milliards de mètres cubes gazeux de réserves et 10 milliards de barils pour le pétrole, données reprises par l’ex-ministre de l’Energie en 2020, avec une très forte consommation intérieure qui risque de dépasser les exportations actuelles. D’où l’importance de profondes réformes tant politiques, sociales, qu’économiques afin de dynamiser les exportations hors hydrocarbures.
Un bon développement allège le poids sur les forces de sécurité ; un frein au développement par une mauvaise gouvernance accroît les tensions sociales et donc l’insécurité. L’Algérie n’a pas d’autres choix : réussir les réformes qui seront douloureuses à court terme mais porteuses d’espoir à moyen et long terme pour les générations présentes et futures, possédant toutes les potentialités pour réussir supposant une autre démarche où le politique, l’économique, le social, le culturel sont dialectiquement liés. Ou rester en statut quo en retardant les réformes structurelles avec le risque sans correction de l’actuelle politique économique et notamment dont le résultat est mitigé, contrairement à certains discours démentis par le terrain, est d’aller droit vers le FMI horizon 2022 ou cohabiteront crise financière et crise de gouvernance, ce qu’aucun patriote ne souhaite. Sans un retour à la confiance citoyens/gouvernants, passant par une profonde moralisation des dirigeants avec des institutions et intermédiations politiques économiques et sociales crédibles et un gouvernement de compétences nationales, loin des relations de clientèles, il ne faut pas s’attendre à des miracles. J’ose imaginer une Algérie où les nouvelles générations vivront confiantes dans leur pays et où nous assisterons à un retour volontaire progressif des cadres expatriés. Aussi, l’Algérie qui a d’importantes potentialités sera ce que le peuple algérien et les responsables chargés de gérer la Cité voudront qu’elle soit.
(Suite et fin)
Professeur des universités, expert international Dr Abderrahmane Mebtoul