Le Redressement national suppose une profonde moralisation de la société

Sécurité et développement

Dans toute société toujours en mouvement, n’existe pas l’immobilisme. Toute nation qui n’avance pas recule forcément. Le statu quo serait suicidaire pour le pays pouvant conduire à sa déstabilisation. L’unanimisme est source de décadence de toute société et le dialogue productif est l’outil par excellence de la bonne gouvernance.

1.- Tout projet social , en démocratie, est porté par des partis politiques, fonction d’affinités idéologiques et économiques dont le but, pour être crédible, loin des slogans populistes, est d’améliorer la situation sociale des citoyens, de concilier efficacité économique avec une profonde justice sociale (pas l’égalitarisme), impliquant une économie forte, toute nation ne partageant que ce qu’elle a préalablement produit. Vouloir remplacer Mohamed par Abdelkader pour jouir d’une rente, ne résout en aucune manière les problèmes du pays, surtout après les révélations des salaires des députés du CNT et d’autres catégories sociales, une minorité, alors que 70/80% de la population algérienne vit difficilement de son salaire, pratiques du passé, ne peut que conduire le pays à la récession économique et à la démobilisation générale. Un responsable moral ne peut jouir d’une retraite à vie après avoir exercé deux à cinq années devant rejoindre son travail d’origine, comme dans tous les pays du monde étant pour une mission temporaire au service de l’Etat, ne peut prétendre une rente à vie, sans compter les nombreux avantages octroyés, un salaire net variant entre 230 000 et 260 000 dinars/mois (le brut variant entre 350 000/400 000 dinars) alors qu’un professeur d’université en titre ayant exercé pendant plus de 30/35 ans perçoit 160 000/170 000 dinars et un professeur de CEM et lycée entre 50 000/70 000 dinars net par mois. Certes ce n’est pas du vol, mais avant de donner des leçons de morale de certaines personnes qui passent leur temps sur les plateaux de télévisions, il faut être moral et un Etat de droit suppose que l’Etat soit droit.

C’est une condition indispensable, pour un large front national et de profondes réformes systémique, nécessitant une nouvelle politique et la moralisation de la société du fait que la bureaucratie et la corruption accentuent le divorce entre l’État et les citoyens, tout en constituant un frein à l’investissement national ou international productif. Cette moralisation est d’autant plus nécessaire que l’Algérie connaît de fortes tensions budgétaires et financières. La crise provoquée par le coronavirus a projeté une lumière crue sur un écosystème devenu fortement obsolète où les réserves de change sont passées de 194 milliards de dollars fin décembre 2013 à 42/43 milliards de dollars fin 2020 contre 62 fin 2019 où à cette tendance elles clôtureront à environ 20 milliards de dollars fin 2021. Qu’en sera-t-il pour 2022, en cas d’une non relance de la machine économique, la loi de Finances 2021 selon le FMI, nécessitant 110 dollars le baril, où aucun patriote ne souhaite le retour au FMI. Nous sommes à l’ère d’internet et des réseaux sociaux, le langage de la vérité, par une autre communication, doit primer si l’on veut faire adhérer la population algérienne. L’on devra analyser la situation socio-économique sans passion : ni sinistrose, ni autosatisfaction source de névrose collective. Car les mêmes causes et comportements produisent les mêmes effets, posant l’urgence du redressement de l’économie nationale.

2.- C’est que nous assistons à des tensions géostratégiques au niveau des frontières de l’Algérie la chute des prix du pétrole et surtout du gaz naturel plus de 70% depuis 2010 procurant 33% des recettes de Sonatrach (98% des recettes en devises avec les dérivées) qui en plus connaît une baisse de la production en volume physique tant du pétrole que du gaz, l’Algérie ne profitant que très peu de la remontée actuelle des prix du pétrole. Qui ont un impact sur le niveau des réserves de change. La baisse des réserves de change est drastique, 194,0 milliards de dollars fin 2013 à 62 fin 2019 et à fin 2020, malgré toutes les restrictions à l’importation, selon la déclaration du Président de la République en date du 1er mars 2021 entre 42/43 milliards de dollars les prévisions de la loi de Finances complémentaire étaient de 44,2 milliards de dollars contre 51,6 prévus dans la loi initiale. Aussi, il y a urgence d’un sursaut national devant éviter des promesses utopiques où des responsables promettent depuis plus d’une année la venue de partenaires étrangers, la dynamisation de l’investissement national alors que selon plusieurs organisations patronales plus de 70% d’entreprises courent à la faillite faute d’équipements et de matières premières, de intégration du capital argent de la sphère informelle, alors qu’elle s’est accrue entre 2019/2020 selon le dernier rapport de la Banque d’Algérie, de maîtriser l’inflation et que nos responsables aillent faire le marché pour constater l’explosion des prix, qu’on allait mobiliser 2 milliards de dollars pour l’importation de voitures dont le prix des voitures d’occasions ont et des pièces détachées augmentées de plus de 30/40% et toujours certains qui passent leur temps à donner des interviews en promettant des études déconnectées de la réalité, en clamant haut et fort, appliquer le programme du Président de la République qui n’a pas besoin de discours et de louanges, mais de résultats palpables sur le terrain.

Soyons réalistes, selon nos informations au niveau international et national, la majorité des opérateurs voulant investir dans des créneaux à valeur ajoutée durable, attendent le nouveau gouvernement, promis en principe, pour le mois de juin 2021 après les élections, où le taux de participation sera déterminant pour la crédibilité des institutions, où l’on devra éviter les pratiques néfastes du passé, passant par la moralité des responsables qui dirigent la Cité, d’un renouvellement du personnel politique et économique composé de réformateurs et quoi qu’il fasse le gouvernement actuel, transitoire, gérant les affaires courantes, ne pourra pas attirer les investissements étrangers sérieux où son action reposera uniquement sur la dépense publique via la rente des hydrocarbures En résumé, le rôle de l’intellectuel, d’un cadre de l’Etat et en ce XXIe siècle du journaliste dans une société mondiale surmédiatisée, non les organiques aux ordres, n’est pas de faire des louanges en contrepartie d’une rente, contre-productif pour le pouvoir, mais de tolérer la différence des idées (personne n’a le monopole de la vérité et du patriotisme) afin de contribuer au redressement national et ce par un langage de vérité. Les analyses de certaines institutions internationales, prévoyant de sombres scénarios sur l’avenir de l’Algérie entre 2021/2023 peuvent être contournées par la mobilisation générale et un changement de cap de la politique socio-économique. Car, en ce mois de mars 2021, l’Algérie n’est pas au bord de l’effondrement ayant une dette extérieure relativement faible, inférieure à 6 milliards de dollars. Mais il faut être réaliste et ne pas verser dans la démagogie. La situation pourrait prendre une autre dimension et s’aggraver sans un changement dans le système de gouvernance s’adaptant tant aux nouvelles mutations internes que mondiales, loin des théories abstraites et du juridisme, l’Algérie ayant certaines lois les meilleures du monde mais rarement appliquées. Existant de liens dialectiques entre sécurité et développement, il y a lieu d’éviter les replâtrages conjoncturels qui accélèrent l’insécurité et la crise à terme. En ces moments de grands bouleversements géostratégiques, c’est par une nouvelle gouvernance et un discours de vérité collant avec la réalité sociale, loin des bureaux climatisés des bureaucrates, par une profonde moralisation, sans laquelle aucun développement n’est possible, l’Algérie ayant les potentialités, trouvera les solutions à la crise actuelle avec l’impact de l’épidémie du coronavirus qui touche tous les pays et pas seulement l’Algérie, qui devrait modifier considérablement tant les politiques socioéconomiques que les relations internationales. En bref, l’Algérie sera avant tout, ce que les Algériennes et les Algériens voudront qu’elle soit.

Professeur des universités, expert international, Dr Abderrahmane Mebtoul