Un genre littéraire d’origine lointaine

Poésie

On ne fait pas de la poésie pour le plaisir d’écrire en langage esthétique. Beaucoup de spécialistes du domaine composent des vers pour de noble idéaux : aider autrui à s’éveiller à la beauté du monde qui l’entoure, susciter de beaux sentiments humains dans un univers où la tendance est à l’indifférence à tout.

On parle de moins en moins de poésie. Dommage ! Etant donné son impact sur l’état d’esprit, particulièrement des jeunes qui en ont le plus besoin pour mûrir, comprendre les autres dans leurs comportements singuliers, se forger une personnalité, être sur la voie de la sagesse. L’une des vocations de l’enseignement, c’est d’éveiller les consciences, motiver, entraîner à l’émulation, créer les conditions qui permettent aux enfants d’apprendre par des méthodes actives et vivantes inspirées des dernières découvertes dans un domaine en pleine expansion et sur la voie du perfectionnisme : la psychopédagogie. Ne dit-on pas d’ailleurs qu’enseigner, c’est apprendre à apprendre.

Une poésie destinée prioritairement aux enfants
Les poèmes à vocation didactique servent de supports pédagogiques les plus efficaces. Jadis, du temps où l’enfant était un objet de préoccupation de tout le monde : la famille, la société, l’école, on cherchait à la préparer du mieux qu’on pouvait à la vie de famille ou de chef de famille responsable. On lui faisait aimer ses parents, ses semblables, son pays, le travail, bref, toutes les valeurs sans lesquelles il n’y a point de progrès ni de morale sociale et professionnelle. Et pour créer chez les petits l’envie de s’instruire, on cherchait à leur faciliter l’accès aux notions abstraites en les concrétisant par des textes poétiques à caractère didactique. Il s’agit des notions d’union pour des idéaux communs, de solidarité, de travail sérieux et fait proprement et portant une signature personnelle.
On leur enseignait par cette poésie le respect de la différence, la curiosité en tant que prédisposition à la compassion, l’altruisme. Depuis des siècles, ceux dont l’art de versifier est inné, se sont mis à versifier pour des courses louables : rappeler à l’ordre les indisciplinés et marginaux de toutes sortes, inciter à un mieux être pour soi et pour les autres, aimer les autres parce que sans eux, la vie serait impossible, inculquer l’esprit de compétition et de créativité individuelle au travail pour faire avancer la production aussi bien en quantité qu’en qualité, être jaloux de sa terre natale et des siens, aimer la terre nourricière et son pays, entrer dans la compétition internationale pour le progrès scientifique et technique. La liste des thèmes est trop longue pour pouvoir en faire une émulation exhaustive.
Les poètes de tous les temps ont privilégié ces domaines de recherche pour leur importance dans l’enseignement de nos jours. Ils y puissent selon les circonstances pour améliorer les comportements, l’harmonie de tous les participants à toute tâche de création et de créativité collective, l’esprit inventif et de rapprochement entre les hommes. Même la poésie chantée est conçue pour aider chaque jeune, déboussolé à être convaincu que tout dans ce monde doit s’obtenir au mérite après que l’on a donné le meilleur de soi-même pour réussir honnêtement. Nos anciens, maintenant disparus, nous ont laissé des pensées par poèmes interposés et qu’on ne s’est jamais donné la peine de repenser pour mieux comprendre le monde qu nous entoure, le sens du mérite. M’hamed Issiakhem disait à juste titre que les jeunes de chez nous aiment la fleur sans l’avoir plantée. C’est comme cet instituteur de la bonne école qui avait lancé cette citation qu’on avait pris soin de saisir au vol : «Un peuple qui ne s’instruit pas prédite et meurt».

Des poèmes didactiques comme supports didactiques
Ils ont pour but d’apporter des connaissances et de manière continue. Les textes poétiques ont été composés dans un style simple pour les rendre accessibles aux enfants. Ils leur étaient destinés et les maîtres d’école les donnaient à apprendre pour leur multiple vocation. «Un singe» nous a été rapporté par un ancien de la bonne école qui dit en avoir été marqué pour sa forme et son contenu. C’est un poème donné à apprendre par cœur parce qu’il met en garde les enfants sur l’importance qu’ils ont de respecter le cultivateur, le boulanger, le maçon, tous ceux qui, chaque jour, lui apportent le nécessaire pour vivre. «Le cultivateur m’a dit en songe : «Laboure toi-même la terre qui te nourrit», le boulanger m’a dit : «Fais toi-même ton pain», puis le maçon, l’épicier, le boucher qui avaient décidé d’arrêter de travailler, se sont adressés aux gens du village pour leur annoncer leur serment.
L’enfant avait eu peur en se réveillant mais tout à tout voit par la fenêtre chaque travailleur en activité. C’était le bonheur. Et extraordinairement, tout ce qui a été appris dans l’enfance marque à vie. «Je me souviens bien de cette chanson, Le soc d’une charrue», dit le personnage qui dit «je» dans la chanson ? Il s’agit d’une charrue qui chaque jour va dans les champs et en revient brillant. «Où as-tu cet éclat», lui dit un autre soc rouillé pour n’avoir jamais travaillé. «En travaillant, en creusant des sillons chaque jour», lui répond l’autre. Réponse du soc à donner à méditer aux enfants pour leur faire comprendre ce qui signifie le mot «éclat».
Abed Boumediene