«La légitimité vient du peuple»

Sabri Boukadoum à propos des législatives :

«Nous allons étape par étape», dans le processus de changement en Algérie, a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, au quotidien espagnol «El Pais». Nous attendons beaucoup des prochaines élections législatives, a-t-il fait savoir. Il estime que «les moyens de changer sont là».

Pour Sabri Boukadoum, «la légitimité vient du peuple, même s’il vote à 20%. Ils ont la possibilité de choisir et de changer les choses». Il souligne qu’«il appartient fondamentalement aux jeunes de participer, d’être candidats, de changer les choses». Quant à ceux qui rejettent ce processus, qu’est-ce qui les empêche de s’organiser – «y compris le Hirak», insiste-t-il -, en formation politique. «Il y a eu des changements», dit-il, citant à l’appui la création de la Cour constitutionnelle du Conseil de la jeunesse, du Conseil de l’énergie… «Avant la Constitution, le Président décidait de tout. Plus maintenant», fait remarquer Sabri Boukadoum. C’est à l’occasion de sa visite de travail en Espagne, à l’invitation de son homologue espagnole, Arancha Gonzalez Laya, dans le cadre des consultations traditionnelles et régulières entre les deux pays, signataires, depuis 2002, du Traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération, que notre ministre des Affaires étrangères a accordé une interview au quotidien espagnol «El Pais».
Sabri Boukadoum a exposé la position de l’Algérie sur une série de questions d’intérêt commun et clarifié des aspects de la situation interne à notre pays. A propos de la situation au Sahara occidental, l’Algérie estime que «l’Espagne a une responsabilité historique, elle ne peut pas se cacher derrière les Nations unies». Pour l’heure, rappelle Sabri Boukadoum, il y a «une rupture du cessez-le-feu. Il y a des combats et des morts». Il souligne que «tous les Sahraouis ont de fortes racines en Espagne, je n’ai rencontré personne qui n’ait pas de connexion, y compris les jeunes. Tous parlent espagnol. C’est une question que nous devons aborder plus sérieusement. On prend une résolution, puis une autre… qui ne mène à rien, seulement au blocage et on sait déjà qui bloque. Certains pays passent leur temps à insulter». Sur le terrorisme – qui «n’est typique d’aucun pays ni d’aucune religion, mais qu’il s’agit d’un phénomène transnational», a-t-il dit -, Sabri Boukadoum estime qu’«il faut travailler avec des moyens militaires, mais aussi comprendre ce qui se passe.
Il serait utile que les problèmes de développement soient traités plus sérieusement. Lorsqu’il n’y a pas de ressources, l’argent facile du terrorisme et des enlèvements l’emporte ; gardez cela à l’esprit». «Vous pouvez avoir la force française Barkhane, avec 5.100 soldats, ou la Minusma de l’ONU, avec plus de 15.000, mais rien de tout cela n’est suffisant. Il ne s’attaque pas à la cause profonde du terrorisme», explique-t-il. Il rappelle que «le terrorisme nous frappe depuis longtemps ; nous avons de l’expérience», et insiste sur la coopération internationale qui est indispensable dans ce domaine. «Le Sahel est vital pour tous. Les Espagnols sont de plus en plus présents», fait-il observer. A propos du phénomène de la migration massive, Sabri Boukadoum fait savoir que «l’Algérie est devenue un pays d’origine et de destination».
Les migrations massives arrivent d’abord en Algérie avant qu’elles n’atteignent l’Europe, explique-t-il. C’est une pression considérable. «Les Européens se plaignent, mais devons-nous agir comme des policiers pour l’Europe ? Vous voulez une protection, mais qui nous protège ?», interroge-t-il. Sabri Boukadoum fait constater que «l’année dernière, avec la Covid-19, les chiffres se sont assouplis, mais durant l’année passée, à un moment donné, nous avons eu plus d’un millier d’arrivées par jour». «C’est la migration économique, motivée par la désertification, le terrorisme, le manque d’emplois… », explique Sabri Boukadoum.
«Cette migration doit être stoppée dans les pays d’origine. La création d’emplois les aidera à ne pas vouloir partir. Et ce sera moins cher que, par exemple, mettre des navires en Méditerranée. La Minusma coûte des milliards par an. Des écoles et des centres de santé doivent être construits». Concernant les jeunes Algériens qui partent aussi pour l’Espagne, il précise qu’«ils ne sont pas seulement Algériens». Beaucoup de gens qui quittent la côte algérienne déclarent être Algériens parce que nous rapatrions tous les Algériens. Certains en profitent».
Lakhdar A.