Ira-t-on vers un boycott de la Coupe du monde du Qatar ?

La question est déjà sur le terrain. De fil en aiguille, elle tisse son message jusqu’à le faire afficher sur les maillots des joueurs. Ceci amène tout sportif à se poser la question suivante : Quel goût aura cette Coupe du monde ? Nombreuses sont les sélections qui ont allumé la mèche, pour dénoncer le «non-respect des droits humains».

Cette Coupe du monde 2022 attribuée au Qatar le 2 décembre 2010 à Zurich, suscite encore un mécontentement, voire un rejet de la part de plusieurs fédérations européennes de football quant au choix de cet Etat pour l’organiser et n’hésitent pas à montrer du doigt ceux qui ont voté pour qu’elle ait lieu sur ces terres.
Pourquoi revenir au débat maintenant ?
La phase de qualification a déjà commencé pour certaines sélections, ce qui donne l’occasion de provoquer ce grand débat qui fâche. Une occasion, selon l’enquête du Guardian, de rappeler qu’«au moins 6 500 travailleurs asiatiques sont morts depuis le lancement des chantiers liés à l’événement – la FIFA, qui a d’autres statistiques, parlent de 37. Quoi qu’il en soit, la Norvège est allée jusqu’à dégainer l’idée d’un boycott».
«Nous ne pouvons plus rester assis»
Ce n’est pas fini puisque le club de Tromsö, bientôt suivi dans son initiative par d’autres dont le principal du pays, Rosenborg, a estimé récemment que le dialogue ne suffisait plus et a délivré son message : «Nous devrions réfléchir à ce qu’est l’idée du football et pourquoi tant de gens aiment notre sport, disait le communiqué. Le fait que la corruption, l’esclavage moderne et un nombre élevé de décès constituent le fondement de la chose la plus importante que nous ayons, la Coupe du monde, n’est pas du tout acceptable. Nous ne pouvons plus rester assis et regarder des gens mourir au nom du football».
Droits humains, sur et en dehors du terrain
La fédération norvégienne promet de se positionner au mois de juin. En attendant, mercredi passé avant leur victoire à Gibraltar, Erling Haaland et ses coéquipiers ont arboré un t-shirt en guise de rappel idéologique «Droits humains, sur et en dehors du terrain». Le lendemain, l’Allemagne puis les Pays-Bas et le Danemark ce week-end, ont véhiculé des messages similaires. Après ces messages qui tombent après ces premiers matches éliminatoires, quels effets auront-ils aujourd’hui ? «On est assez loin d’un boycott». Et à ce sujet, Joshua Kimmich, milieu de terrain de la Mannschaft dira «pour un boycott, nous arrivons dix ans trop tard.
C’est à l’époque qu’il aurait fallu réfléchir». Roberto Martinez, sélectionneur belge, le rejoint dans un élan timide dans «La Dernière Heure». Il dira «boycotter le Mondial au Qatar, ce n’est pas la solution. Ce serait tourner le dos au problème. On doit, au contraire, y faire face». Pour la France, pas question de revenir en arrière, dès début mars, par la voix du président de la «fédé», Noël Le Graêt disait «le Qatar a été désigné depuis longtemps par des gens responsables (ndlr : le Comité exécutif de Sepp Blatter), on ne va pas aller sur une remise en cause à un an de l’organisation».
Bref, la Coupe du monde aura lieu au Qatar et le monde du football s’y rendra, tout en délivrant ses bons messages au passage. «Tout accident, tout décès est une tragédie humaine, a admis Dominique Blanc, président de l’Association suisse de football, cité par Blick. Nous sommes convaincus que tout doit être mis en œuvre, au Qatar comme partout ailleurs, afin de protéger la santé et la sécurité des ouvriers. Nous nous impliquons en ce sens. Mais nous misons sur le dialogue, pas le boycott». Les Norvégiens ont encore du boulot.
Un pays critiqué…
Qu’en pense l’équipe d’Allemagne de football ? Celle-ci a fait parvenir un message en faveur des droits humains jeudi pour son match d’ouverture du Mondial-2022, organisé au Qatar, un pays critiqué pour son traitement des migrants employés à la construction des stades. «Au moment de s’aligner pour écouter les hymnes nationaux, les joueurs allemands se sont tenus côte à côte, chacun portant un t-shirt noir floqué d’une grande lettre blanche : les onze lettres formaient les mots ‘HUMAN RIGHTS’ (droits humains en anglais)».
Pas de sanction
«La FIFA ne sanctionnera pas l’équipe d’Allemagne pour avoir envoyé jeudi un message en faveur des droits humains lors de son premier match des éliminatoires du Mondial-2022, organisé au Qatar», a annoncé l’instance sportive vendredi… «La FIFA croit en la liberté d’expression et au pouvoir du football pour susciter des changements positifs», a-t-elle déclaré dans un communiqué transmis au SID, filiale sportive de l’AFP. «Nous voulions métrer clairement à l’opinion que nous n’ignorons pas cela». L’AFP rappelle que «cette action survient peu après la publication très commentée d’un article du quotidien britannique The Guardian affirmant que 6 500 ouvriers sont morts sur les chantiers des stades du Mondial depuis l’attribution de la compétition au Qatar en 2010». «Nous voulions montrer clairement à l’opinion que nous n’ignorons pas cela», a déclaré après le match le milieu de terrain Leon Goretzka. «Nous avons nous-mêmes tracé les lettres sur nos t-shirts, nous avons une large audience et nous pouvons formidablement l’utiliser pour envoyer des signaux en faveur des valeurs que nous défendons». Le Qatar est sous le feu de critiques d’organisations de défense des droits humains pour son traitement des travailleurs migrants, dont beaucoup viennent d’Inde ou du sous-continent indien.
La Norvège, la veille
Mercredi, l’équipe de Norvège avait organisé une action similaire avant son match de qualification à Gibraltar (3-0), en portant avant le match des t-shirts proclamant : «Droits humains sur et hors du terrain». L’entraîneur Staale Solbakken avait justifié l’initiative en affirmant : «Il s’agit de faire pression sur la FIFA pour qu’elle soit encore plus directe, encore plus ferme à l’égard des autorités au Qatar, qu’elle leur impose des exigences plus strictes». Plusieurs clubs norvégiens se sont prononcés en faveur d’un boycott du Mondial après les révélations du Guardian.
Synthèse H. Hichem