Les journalistes algériens ont payé un lourd tribut pour la liberté d’expression

Journée internationale de la liberté de la presse

La Journée internationale de la presse a été célébrée cette année dans les quatre coins du monde. Cet événement ne peut pas passer inaperçu en Algérie, les journalistes algériens ont payé un lourd tribut pour la liberté d’expression.

Comme à l’accoutumée, nos pensées se sont envolées vers nos collègues, confrères et consœurs qui ont payé de leurs vies, le prix du droit d’informer. Avant même les années 1990, quinze de nos collègues ont péri dans le crash d’un avion présidentiel «707» dans la matinée du 8 mars 1974. Le crash a eu lieu vers 8h du matin à 25 Km de la capitale du Vietnam Hanoï. Nos collègues avaient pour mission de couvrir le déplacement de feu Houari Boumediene en tournée en Chine, Pakistan, Vietnam et autres pays d’Asie. Le 3 mai 1982, c’est un autre journaliste qui a trouvé la mort alors qu’il était en mission pour couvrir la médiation de l’Algérie dans le conflit irako-iranien. Notre confrère était dans l’avion qui transportait la délégation algérienne conduite par feu Mohammed Seddik Benyahia et des hauts cadres du ministère des Affaires étrangères. L’avion fut abattu par un tir du missile. Tout de suite après, l’Algérie passe au pluralisme politique et à l’ouverture des médias au secteur privé.
Personne ne s’attendait à ce que la presse en plein élan allait se heurter à ceux qui voulaient faire taire les journalistes. Malgré les intimidations, provocations et les menaces, les journalistes n’ont pas abdiqué et ont sacrifié leurs vies pour défendre la liberté d’expression et pour sauver la République. Le courage des journalistes algériens pendant cette période cruciale est unique dans le monde, ils ont résisté face à la barbarie et la cruauté des ennemis de la démocratie et de la liberté d’expression. La liste des martyrs de la plume est longue, elle dépasse la centaine. C’est par leur intelligence, leur savoir-faire et leur courage que les défenseurs de liberté d’expression se sont battus contre l’obscurantisme et contre le fondamentalisme religieux. Face à la haine, aux couteaux et à la Kalachnikov des groupes armés, nos journalistes se sont défendus avec leurs plumes. Les menaces et les assassinats n’ont pas fait plier les défenseurs de la liberté d’expression. «Il n’est pas question de se taire alors que notre pays est en danger», ont-ils à chaque fois répété.
Pour les journalistes, c’est une lâcheté de garder la neutralité alors que les Algériens de tous corps confondus se font égorger par les hordes sauvages. Prenant leur courage entre les deux mains, les journalistes algériens ont suivi à la lettre le dicton de feu Tahar Djaout : «Si tu parles, tu meurs. Si tu te tais tu meurs. Alors, dis et meurs». Hommes et femmes de la presse écrite, parlée ou de l’audiovisuel, les journalistes ont tous juré de parler et de mourir en héros pour la liberté d’expression et pour permettre à l’Algérie de rester debout. La haine des sanguinaires envers les journalistes a été des plus barbares. Les groupes armés n’ont pas fait de différence entre un journaliste de sexe masculin ou féminin, d’un francophone ou arabophone. Les sanguinaires avaient pour objectif d’anéantir les «témoins» pour camoufler leurs méfaits et pour dissimuler les massacres et les carnages dont le peuple fait l’objet. Le mot d’ordre a été donné aux groupes terroristes de faire taire les radios, de noircir les écrans et d’immobiliser les plumes.
C’est une véritable chasse à l’homme que les journalistes ont fait l’objet de la part des sanguinaires. Appliquant les directives de leurs émirs et responsables, les groupes terroristes ont multiplié les enlèvements, les assassinats individuels et collectifs dans les milieux des journalistes. Ni le premier assassinat, ni la 100e victime et ni les attentats à l’explosif n’ont fait abdiquer les courageux journalistes. Bien au contraire, cette barbarie a donné du courage à la famille de la presse qui a levé la voix pour dire haut et fort : Non à l’assassinat de la liberté d’expression. Les journalistes ont tenu leurs promesses, ils se sont battus aux côtés des milliers d’hommes et femmes intègres qui ont pris la défense de l’Algérie. Ils ont réussi avec d’autres secteurs et surtout les forces de sécurité à maintenir debout une Algérie qui a été déjà donnée pour morte et enterrée par les ennemis de la nation. Durant la décennie noire, plus d’une centaine de journalistes ont été lâchement assassinés. Certains corps de nos confrères enlevés par les groupes armés n’ont pas été retrouvés jusqu’à ce jour. Après une décennie noire meurtrière, les journalistes ont continué à exercer et ne ménagent aucun effort pour informer l’opinion publique.
Que ce soit à travers la presse écrite, parlée, audiovisuelle ou électronique, les journalistes algériens poursuivent leur noble mission qui est celle d’informer. Malgré les difficultés, les problèmes de la vie et les multiples obstacles, les journalistes algériens tentent toujours d’arriver à la source pour décrocher la bonne information et tenir informer l’opinion publique. Ce n’est pas facile certes, mais rien n’arrêtera la famille de cette corporation qui s’est sacrifiée pour la liberté d’expression. Nous ne pouvons pas également oublier les collaborateurs de la presse qui couvrent les événements à travers l’ensemble du territoire nationale. Il s’agit des correspondants de presse qui exercent dans chaque région du pays et que par leur biais, l’information locale est diffusée pour arriver à l’opinion publique. Les éléments de cette catégorie ont également donné des martyrs et se sont sacrifié pour la liberté d’expression. Nous ne pouvons pas oublier notre confrère Mohamed Hassaïne qui fut enlevé le 28 février 1994, un jour de Ramadan. Ce jour-là, il venait de quitter son domicile situé à Larbaatache avant qu’il ne soit enlevé et embarqué dans un véhicule. Des témoins ont indiqué à l’époque avoir assisté à la scène mais à l’époque personne ne pouvait intervenir. Depuis, notre confrère n’a jamais donné signe de vie et même son corps n’a jamais été retrouvé. Gloire à nos martyrs.
Moncef Redha