Des experts français appuient la réhabilitation des sites

Essais nucléaires français au Sahara

Dans le Sud de l’Algérie, à Reggane et In Ekker, là où se trouvent les anciens sites d’essais et d’explosions nucléaires français, la radioactivité ambiante demeure très élevée et la contamination fait encore des victimes, à cause des effets nocifs de ces essais et explosions qui continuent à porter préjudice à l’espace, l’environnement et aux populations.

La région n’a pas été décontaminée de toute radioactivité. Pour y remédier, l’Algérie vient de créer une agence spécialisée qui a pour mission de mener à bien les travaux de réhabilitation de ces sites pour les remettre aux collectivités locales concernées. Des experts et militants français pour l’abolition des armes nucléaires s’en sont félicités. Ainsi, le porte-parole de la branche française de l’ICAN (Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires), Jean-Marie Collin, a indiqué que «l’Algérie a toujours été un Etat- acteur de la scène diplomatique internationale du désarmement et de la non-prolifération nucléaire, notamment en participant aux négociations aux Nations unies et en signant en 2017 le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN)». Il a souligné, dans une déclaration à l’APS, que «l’Algérie s’était engagée à travailler plus activement sur ce sujet sensible des anciens sites d’essais nucléaires», précisant que «le TIAN comporte un article (n 6) intitulé ‘Assistance aux victimes et remise en état de l’environnement’» qui exige la «remise en état de l’environnement des zones contaminées» et l’assistance aux victimes des essais d’armes nucléaires. Selon l’article 7 du Traité, les Etats devraient s’entraider pour la remise en état de l’environnement des zones contaminées, avec une responsabilité particulière des puissances nucléaires, c’est-à-dire la France dans le cas des essais nucléaires effectués en Algérie, au Sahara. Si la France est respectueuse du droit international, elle devrait en tenir compte.
La création par l’Algérie de l’Agence nationale de réhabilitation des anciens sites d’essais et d’explosions nucléaires français dans le Sud algérien, a également fait réagir le directeur de l’Observatoire des armements, Patrice Bouveret, qui a indiqué qu’il s’agit de «la concrétisation d’une volonté politique de ne plus laisser les sites en l’état», estimant que c’est une «bonne nouvelle pour les populations qui vivent près des zones affectées par les 17 essais nucléaires réalisés par la France entre 1960 et 1966». Co-auteur avec Jean-Marie Collin de «Sous le sable, la radioactivité ! Déchets des essais nucléaires français en Algérie», Patrice Bouveret souhaite voir «les travaux de nettoyage des sites débuter sans tarder». Le Président Tebboune, avait déclaré dans un entretien accordé récemment au magazine français Le Point, avoir demandé à la France de «nettoyer les sites des essais nucléaires», relevant que cette opération est «en bonne voie car aujourd’hui encore, la contamination fait des victimes».
«Que la France soigne les victimes des essais nucléaires. Le monde s’est mobilisé pour Tchernobyl alors que les essais nucléaires en Algérie provoquent peu de réactions. Ils ont pourtant eu lieu à ciel ouvert et à proximité des populations», avait tenu à rappeler le Président Tebboune. On sait que le rapport sur la Guerre de libération nationale de l’historien français Benjamin Stora, a fait l’impasse sur les crimes coloniaux notamment les essais nucléaires effectués dans le Sahara algérien. Mais «tôt ou tard», la France devra «assumer ses responsabilités historiques» sur les essais nucléaires qu’elle a effectués en Algérie, sous couvert de recherche scientifique, estiment nombre d’experts et de scientifiques en France même.
En 1985, la télévision algérienne avait diffusé un film documentaire (en 35 mm), ‘’Algérie, combien je vous aime’’, réalisé par Azzedine Meddour (décédé le 16 mai 2000) qui, sur la base de témoignages directs, avait révélé, pour la première fois au grand public, que des prisonniers de guerre algériens ont été utilisés comme cobayes durant des expériences nucléaires françaises au Sahara sous domination coloniale. Au début de ce mois, dans une interview accordée à l’hebdomadaire français Le Point, le Président Tebboune a affirmé que les Algériens attendaient une «reconnaissance totale de tous les crimes» commis par la France coloniale. Pour rappel : il y a eu 17 explosions dans le Sahara algérien, 4 en surface à Reggane et 13 souterraines à In Ekker.
Lakhdar A.