La croissance économique reposant sur une nouvelle organisation ministérielle et territoriale, s’insérant dans le cadre d’une planification stratégique

Les défis de l’Algérie 2021/2024 face aux tensions budgétaires

Le gouvernement Djerrad a déposé sa démission et un nouveau gouvernement devrait être mis prochainement en place, en espérant du fait de vives tensions budgétaires, sociales et des tensions géostratégiques de privilégier l’efficacité et non la pléthore de ministres pour satisfaire des appétits partisans.

Car une enquête récente, d’un centre de recherche sérieux le Cread montre clairement, contrairement aux discours euphoriques du ministre des Finances et du président du Conseil économique et social, voulant justifier un bilan mitigé, point de vue que ne partage pas même le président de la République, ni la majorité des experts, induisant en erreur les décideurs, rejoignant nos analyses, que la situation socio-économique est préoccupante. Mais sans verser dans la sinistrose, elle peut être redressée, sous réserve d’une autre gouvernance et d’une nouvelle trajectoire axée sur de profondes réformes. Car à un mauvais diagnostic, il en résulte forcément une mauvaise politique Il y a lieu donc de procéder sans complaisance à un examen très lucide de la situation pour mieux réagir dans plusieurs segments de la vie économique et sociale : tels l’éducation-formation, le savoir pilier du développement, la santé, la modernisation de l’agriculture, la culture financière des acteurs économiques, l’efficacité de l’administration, la relance des entreprises, à travers une nouvelle politique industrielle, lutter contre les déséquilibres régionaux et les inégalités sociales, la formation civique et politique de la jeunesse et tant d’autres domaines.

Nous assistons, hélas, à des constructions anarchiques avec le manque d’homogénéisation dans le mode architectural, un taux accéléré d’urbanisation avec des bidonvilles autour des grandes villes, avec le risque de l’extension de nouvelles formes de violence à travers le banditisme et de maux sociaux comme la drogue et la prostitution. Il suffit de visiter toutes les wilayas, sans exception, pour constater des routes, des infrastructures et des ouvrages d’art qui ont coûté à la collectivité nationale plusieurs dizaines de milliards de centimes inutilisables en cas d’intempéries, des routes éventrées à l’intérieur des villes où la plupart des autorités se complaisent uniquement aux axes principaux visités par les officiels, des ordures qui s’amoncellent depuis des années à travers la majorité des quartiers périphériques, des logements que les citoyens refont, surtout les secondes œuvres avec des VRD non finies, des espaces verts qui font place à du béton, la construction d’unités dangereuses et polluantes près des villes, des sites touristiques, près des côtes, contenant plusieurs centaines de lits et qui déversent à la mer leurs déchets sans compter le manque d’eau pour l’hygiène. Cela témoigne d’actions urgentes dont la responsabilité ne concerne pas seulement un département ministériel, mais à la fois plusieurs ainsi que les collectivités locales.

Cette situation peut avoir des conséquences très graves, avec la «bidonvilisation» sur le plan sécuritaire qui a un coût, d’où l’importance de l’aménagement du territoire et d’une véritable régionalisation économique qui doit avoir pour conséquence un meilleur gouvernement réel ressenti comme tel par la population, l’argument de base résidant dans la proximité géographique. Cela signifie qu’il existe une solution locale aux problèmes locaux et que celle-ci est nécessairement meilleure qu’une solution nationale. Du point de vue des réformes territoriales, l’objectif est de s’orienter ver une réelle décentralisation et non la déconcentration en créant d’autres entités administratives bureaucratiques, les nouvelles technologies permettant des réseaux décentralisés efficaces, afin de rapprocher l’Etat du citoyen et accroître l’efficacité économique. Cela suppose une autre organisation locale, par la création de cinq à six pôles socio-économiques régionaux pilotés par les chambre de commerce régionales, le wali jouant le rôle de régulateur et non de gestionnaire, impliquant tant l’administration, les élus, les entreprises, les banques, la société civile, les universités/centre de recherche devant donc revoir les codes communaux et de wilayas.

Les directions de wilayas qui sont budgétivores devront être regroupées en adéquation avec ceux des ministères. Cette nouvelle organisation devrait favoriser un nouveau contrat social national afin d’optimaliser l’effet de la dépense publique et rendre moins coûteux et plus flexible le service public. Une centralisation à outrance, favorise un mode opératoire de gestion autoritaire des affaires publiques, une gouvernance par décrets, c’est-à-dire une gouvernance qui s’impose par la force et l’autorité loin des besoins réels des populations et produit le blocage de la société. Après le tout Etat, l’heure est au partenariat entre les différents acteurs de la vie économique et sociale, à la solidarité, à la recherche de toutes formes de synergie et à l’ingénierie territoriale. C’est dans ce contexte, que l’APC doit apparaître comme un élément fédérateur de toutes les initiatives qui participent à l’amélioration du cadre de vie du citoyen, à la valorisation et au marketing d’un espace. C’est à l’APC que reviendra ainsi la charge de promouvoir son espace pour l’accueil des entreprises et de l’investissement devant se constituer en centre d’apprentissage de la démocratie de proximité qui la tiendra comptable de l’accomplissement de ses missions. Actuellement les présidents d’APC ont peu de prérogatives de gestion tout étant centralisé au niveau des Walis alors qu’il y a lieu de penser un autre mode de gestion, de passer du stade de collectivités locales providences à celui de collectivités locales entreprises et citoyennes responsables de l’aménagement du développement et du marke.

L’aménagement du territoire ne peut être conçu d’une manière autoritaire, interventionniste, conception du passé, mais doit être basé sur la concertation et la participation effective de tous les acteurs sociaux. Il doit dépasser cette vision distributive à l’image des programmes spéciaux mais doit concourir à optimaliser la fonction du bien être collectif. L’aménagement du territoire devra répondre aux besoins des populations en quelque lieu qu’elles se trouvent et assurer la mise en valeur de chaque portion de l’espace où elles sont installées. Il ne s’agira pas d’opposer le rural à l’urbain, les métropoles aux provinces, les grandes villes aux petites mais d’organiser leurs solidarités. Pour cela, il s’agira de favoriser une armature urbaine souple à travers les réseaux, la fluidité des échanges, la circulation des hommes et des biens, les infrastructures, les réseaux de communication étant le pilier. Cela implique une nouvelle architecture des villes, des sous systèmes de réseaux mieux articulés, plus interdépendants bien que autonomes dans leurs décisions (voir l’ouvrage collectif pluridisciplinaire regroupant économistes, sociologues, politologues, sous la direction du professeur Abderrahmane Mebtoul « réformes et démocratie Casbah 2 volumes Editions» (2004 Alger 500 pages) avec un chapitre a ce sujet).

L’efficacité de ces mesures d’aménagement du territoire pour favoriser les activités productives, impliquent la refonte des finances locales et des taxes parafiscales sans laquelle la politique d’aménagement du territoire aurait une portée limitée devant s’appuyer sur le système de péréquation entre les régions pauvres et riches. La structure qui me semble la plus appropriée pour créer ce dynamisme, ce sont les chambres de commerce régionales qui regrouperaient l’Etat, les entreprises publiques/privées, les banques, les centres de formation professionnelle, et les universités/centres de recherche autour de quatre à cinq pôles régionaux tenant compte du Sud/Est et du Sud Ouest. L’action des chambres de commerce, lieu de concertation mais surtout d’impulsion pour la concrétisation de projets serait quadruple : a- premièrement, dynamiser les infrastructures de base et préparer des sites confiés à des agences de promotions immobilières publiques et privées ; b- deuxièmement, mettre à la disposition des sociétés une main-d’œuvre qualifiée grâce à un système de formation performant et évolutif allant des ingénieurs, aux gestionnaires, aux techniciens spécialisés et ce, grâce aux pôles universitaires et des centres de recherche, évitant ce mythe d’une université par wilaya. Ainsi, nous assisterons à une symbiose entre l’université et les entreprises.

Car les sociétés ont besoin de l’accès aux chercheurs, aux laboratoires pour les tests d’expérimentation et l’université a besoin des sociétés comme support financier et surtout d’améliorer la recherche. Les étudiants vivent ainsi la dialectique entre la théorie et la pratique. (Pour ce point voir l’expérience du pole régional de Greenville USA www.google -Mebtoul 1995 suite à une longue tournée que j’ai effectuée aux USA ). c- la troisième action est de favoriser des entreprises souples reposant sur la mobilité et les initiatives individuelles. Des tests ont montré que l’initiative personnelle, pour certains produits, permet d’économiser certains équipements (donc d’avoir un amortissement moindre dans la structure des coûts) et de faire passer le processus de sept (7) minutes (420 secondes) à 45 secondes soit une économie de temps de plus de 90 % améliorant la productivité du travail de l’équipe. Ce qu’on qualifie d’équipes auto- dirigées; d- La quatrième action, la chambre de commerce intensifierait les courants d’échange à travers différentes expériences entre les régions du pays et l’extérieur et l’élaboration de tableaux de prospectifs régionaux, horizon 2021/2030. La mise à la disposition des futurs investisseurs de toutes les commodités nécessaires ainsi que des prestations de services divers (réseau commercial, loisirs) est fondamentale Cette symbiose entre ces différentes structures doit aboutir à des analyses prospectives, à un tableau de bord d’orientation des futures activités de la région, afin de faciliter la venue des investisseurs.

Réformes et culture participative : pour un nouveau contrat social

Toute cette organisation doit reposer sur la maîtrise du système d’information en temps réel, sans laquelle aucune prévision n’est possible, assistant actuellement à des déclarations contradictoires de ministère à ministère, le renseignement étant la base de toute action, nécessitant une structure indépendance du gouvernement à l’image de ce qui se passe dans les pays développés. Pour des raisons de sécurité nationale, la situation socio économique préoccupante implique une nouvelle gouvernance et un sursaut national où après les élections législatives du 12 juin 2021, l’important pour l’avenir de l’Algérie est le redressement économique et social existant un lien dialectique entre sécurité et développement. Car nous avons deux options : soit satisfaire les appétits partisans par une redistribution passive de la rente avec la création de 40 ministères sans efficacité réelle, ou privilégier l’efficacité gouvernementale, condition d’un développement durable. Ce dernier repose sur le travail et l’intelligence afin de redonner une lueur d’espoir, surtout à une jeunesse désabusée en conciliant l’efficacité économique et la justice sociale dans un univers concurrentiel où toute Nation qui n’avance pas recule.

(A suivre) A.M