Une nouvelle guerre du pétrole se profile à l’horizon !

L’Opep+ s’enfonce dans l’impasse des quotas

Les treize pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et leurs dix alliés non-Opep, conduits respectivement, par l’Arabie saoudite et la Russie ont décidé, avant-hier, d’annuler le Sommet Opep+ devant statuer sur la stratégie à adopter à partir du mois d’août, bien que le plan ait été mis à table depuis jeudi dernier.

Une fois de plus, l’Opep+ est à la croisée des chemins. Après deux ans d’efforts communs pour stabiliser un marché pétrolier en décomposition, les deux alliés traditionnels et indéfectibles du Golfe Riyad et Abu Dhabi tombent en désaccord et font échouer la signature d’un accord «crucial». Dans l’impasse, la 18ème réunion ministérielle de l’Opep+ est reportée sine die, laissant croire à une reconduction en août des quotas de production s’appliquant en juillet, faute de consensus sur la poursuite de la stratégie de la hausse progressive de production, élaborée préalablement. L’absence d’un accord fait, par ailleurs, propulser le baril de Brent et du WTI au sommet, depuis 2014, alors que le volume de la production risque de rester inchangé. Selon Louise Dickson, analyste de Rystad «le report de la réunion de l’Opep+ rapproche le marché d’un mois d’août sans barils supplémentaires de la part de l’Alliance, c’est pourquoi les prix du pétrole ont immédiatement bondi à la nouvelle», a-t-elle expliqué dans une déclaration accordée au site spécialisé Prixdubaril.com.
L’opposition des Emirats arabes unis aux membres de l’Alliance a alimenté le désaccord qui commence à prendre une connotation négative. Cette situation pourrait entraîner une offre limitée du cartel dans les prochains mois, par conséquent, la hausse des prix et surtout un déséquilibre entre l’offre et la demande. Le marché pétrolier deviendra déficitaire qu’auparavant, alors que les puissances économiques essaient de relancer leurs économies et activités industrielles. Pour le spécialiste, Neil Wilson, vaut mieux une offre limitée que surabondante, expliquant que «si l’accord venait à être rompu, les producteurs pourraient être tentés de pomper beaucoup plus, de quoi refroidir les ardeurs actuelles des investisseurs». L’Accord Opep+ est mis de nouveau à l’épreuve des faits. L’Arabie saoudite soutenue par le reste du Groupe refuse de céder à la demande des Emirats arabes unis qui réclament la révision de la base de référence de la production et de les laisser augmenter proportionnellement leurs extractions. Une demande rejetée par Riyad et la Russie qui, pour une fois, se fait passer pour «une juge de paix». Quant aux autres pays, ils préfèrent être prudents en raison de l’instabilité du marché et le retour de la pandémie.
L’Arabie saoudite s’est explicitement opposé aux EAU et les a décrit comme étant le seul obstacle à la signature d’un accord. Les 23 pays membres du cartel doivent, impérativement, trouver un consensus pour éviter de reproduire le scénario de 2014. Il est impératif de trouver un compromis entre les deux parties adversaires car, il est impossible de signer un accord sur l’augmentation de la production en août sans la participation des Émirats. C’est un membre important du Groupe. Sans son aval aucun accord ne sera signé. Dans une telle situation, l’intervention d’un intermédiaire pourrait faciliter le rapprochement entre les deux alliés traditionnels du Golfe, tombés en désaccord pour des raisons bien connues. En effet, Abu Dhabi demande à ce que ses quotas de production de référence, arrêtés comme les autres à la date d’octobre 2018, soient relevés.
Allant jusqu’à qualifier le refus des autres pays de cette demande d’«injuste». Cette divergence fait dérailler l’Opep+ depuis jeudi dernier et le suspens risque de durer si les parties antagonistes ne s’accordent pas. Certes aucun accord ne pourra être signé sans l’aval des EAU, mais l’Arabie saoudite demeure un membre très influent et surtout imprévisible. Rappelons-nous de la guerre des prix entre la Russie et l’Arabie saoudite qui a fait plonger les prix du pétrole à des niveaux historiques. Le baril américain (WTI) a enregistré une valeur négative, tandis que le baril de Brent a frôlé les 10 dollars. C’est ce qu’a rappelé l’expert Naeem Aslam, d’Avatrade, estimant que «les investisseurs ne doivent jamais oublier les conséquences des précédentes guerres de l’offre de pétrole et le pouvoir dont dispose l’Arabie saoudite en termes d’augmentation de sa production de pétrole».
Samira Takharboucht