«J’ai compris que c’est un devoir de santé publique»

Parcours d’un vacciné

«Plus tôt ça sera fait, mieux ça sera», disait Siham, une jeune femme de 35 ans, rencontrée hier, devant un centre de vaccination, à Alger. Elle envisage de se faire vacciner le plus tôt possible. «Pourquoi pas aujourd’hui», s’interroge-t-elle ?

Elle a accepté de partager avec nous ses interrogations et son expérience de vaccination. Après six mois de réticence et d’incertitude sur l’efficacité des vaccins utilisés en Algérie (russe et chinois, elle change d’avis et décide d’aller se faire vacciner. «J’ai compris qu’il faudra tôt ou tard passer par là», dit-t-elle. Pour elle, ce n’est plus une question de conviction, mais d’engagement et de devoir de santé publique. Elle a peur pour ses enfants et ses proches d’être affectés par ce virus et par ses variants. C’est l’unique solution pour s’en sortir. Tout commence le jeudi 8 juillet au matin, vers 10h00, sous un soleil ardent et des températures élevées. C’est le début de son parcours pour se faire immuniser contre la Covid-19. Sortie de chez elle à 9h30, ce matin-là, elle se dirige vers le centre de vaccination le plus proche de son lieu de résidence, à Bir Mourad Raïs, à Alger pour se faire vacciner.
Elle choisit celui de Sidi Yahia pour sa proximité. «Je veux profiter de l’été et de la disponibilité des vaccins sans rendez-vous pour me faire vacciner et de mieux me préparer pour la rentrée prochaine», dit-elle à son amie qui l’accompagnait. Placée en seconde ligne pour accueillir les personnes souhaitant se faire vacciner, les établissements de santé de proximité affichent complets dès 9h00 du matin. C’est ce que nous avons constaté à notre arrivée dans ce centre de vaccination. L’accueil est restreint au public. Il y a un agent de sécurité qui tentait, tant bien que mal, de gérer les arrivées et de vérifier que les personnes présentes sont bien inscrites sur la liste.
Cette dernière a été clôturée à 8h00 du matin. Siham ne le savait pas. «SVP, puis-je ajouter mon nom sur la liste ?», lance-t-elle à l’agent en essayant d’attirer son attention. «Non», répondit-il, «toutefois, il est possible de revenir pour vous faire inscrire dimanche matin, après le week-end» a-t-il ajouté. «J’ai besoin d’information», dit-elle à son amie. Elles ont attendu encore quelques minutes avant de repartir. L’opération de vaccination à commencé pour les personnes inscrites. «Au moins, j’aurais essayé», s’exclame la jeune maman de deux enfants. «Dimanche matin à 6h00, nous serons ici», a-t-elle ajouté.

«Si ça ne marche pas, je chercherai un autre centre» Êtes-vous déçue ?
«Oui, mais du manque de communication», regrette-t-elle. «Je suis venue avec l’idée de me faire vacciner, je veux partir en vacances et protéger ma famille aussi de ce virus. C’est pour ça que je ne veux pas attendre», explique Siham qui a affirmé qu’elle «fera une ultime tentative dimanche». «Et si ça ne marche pas ?», lui dit son amie, universitaire de 31 ans. «Si ça ne marche pas, je chercherai un autre centre», a-t-elle répondu. Hésitante encore ! Elle n’était pas la seule à rentrer chez elle sans se faire vacciner et compte revenir le dimanche matin pour le faire. Pour ces deux jeunes femmes et d’autres, le vaccin anti-Covid est indispensable pour retrouver plus ou moins leurs vieilles habitudes et soulager le personnel soignant engagé dans cette lutte depuis plus de 16 mois. D’autant plus, la situation épidémiologique dans le pays devient de plus en plus préoccupante. Deux jours plus tard, soit dimanche matin, nous sommes retournés dans le centre de vaccination de Sidi Yahia.
Il était 6h30 du matin. Siham, cette fois-ci, accompagnée de son conjoint sont déjà dans la file d’attente. Les inscriptions pour les personnes souhaitant se faire vacciner sont ouvertes. Une cinquantaine de personnes est déjà marquée. «Six heures du matin est, en fait, l’heure idéale pour tenter de s’inscrire et espérer une injection, sans prendre de rendez-vous , a-t-elle fait remarquer à son conjoint. A peine une heure, la liste est clôturée. L’agent de santé commençait à distribuer les tickets, avec le numéro de chaque candidat à la vaccination dessus. En un laps de temps, deux files d’attentes irrégulières se forment devant l’entrée du centre : celle de personnes venues pour se faire injecter la deuxième dose et celle de ceux qui viennent pour la première fois. «Ces files d’attente conséquentes à l’entrée sont produites suite à l’étape des inscriptions», nous fait observer un homme de 46 ans, venu pour recevoir la deuxième dose du vaccin chinois «Sinovac».
Ce dernier semble faire l’unanimité des candidats. «Heureusement que je ne travaille pas aujourd’hui», dit-il, contrairement à Siham et son époux qui ont dû s’absenter pour se faire vacciner. Sous le chapiteau se trouvait une foule masquée qui attendaient patiemment, malgré la chaleur étouffante. L’ambiance semble détendue à l’intérieur des deux chapiteaux implantés dans la cour de la polyclinique. «C’est difficile d’anticiper, le flux change tout le temps», indique une vieille dame de 65 ans qui tenait son ticket à la main. «C’est la troisième fois que je viens ici», ajoutera-t-elle. «C’est pareil pour moi», répliqua la jeune femme de 35 ans. A l’extérieur, l’agent de santé essayait d’organiser les files et les différencier, tout en répondant aux questions des arrivés.
«C’est la pagaille», cria-t-il, quand une infirmière fit appeler les candidats à se rendre à l’intérieur du centre pour se faire vacciner. «C’est mon tour», lança Siham, suivie par son époux. Après plusieurs heures d’attente, le couple reçoit sa première injection. Il devra y retourner dans un mois pour recevoir la deuxième dose. C’est le soulagement ! Pour ces deux jeunes personnes, en bonne santé, «se faire vacciner est la seule façon pour s’en sortir». La vaccination massive des Algériens devra se poursuivre durant des mois pour atteindre l’objectif fixé par les autorités. Ces dernières doivent intensifier les campagnes de communication au niveau des centres de vaccination pour éviter la confusion et la déception des candidats à la vaccination, ce qui pourrait décourager davantage les réfractaires et les habitants des zones rurales et isolées du pays.
Samira Takharboucht