Hassan II, le fils de Glaoui

Maroc

Ahmed Rami, raconte le général Oufkir, m’a personnellement informé – le 10 octobre 1972 – au cours d’une discussion sur la dynastie alaouite, ce qu’il a appris de Glaoui lui-même : que Hassan II est, en fait, né d’une ancienne concubine (de mère juive) du Pacha de Marrakech qu’il a offert (enceinte de lui de six mois) à Mohamed Ben Youssef. Hassan II est le fils biologique du grand traître Haj Thami El Glaoui.

Les sultans alaouites ne célébraient pas leur mariage et ne le rendaient pas public. C´était des mariages morganatiques. La célébration se passait souvent à la naissance d´un enfant dont souvent on ne savait pas, avec certitude, qui en est le vrai père. Ceux qui ont offert les concubines aux sultans, les marchands maquereaux qui les ont vendues ainsi que les esclaves de la «Garde noire» peuvent souvent être les vrais pères des sultans «alaouires» bâtards. Les sultans alaouites avaient souvent plusieures femmes «légitimes» et un grand nombre de concubines souvent offertes, en corruption, par des tribus ou achetées par l´intermédiaires de marchands juifs spécialisés en Europe. Mohamed V – qui était un «coureur de jupons» et obsédé sexuel notoire – avait reçu du Glaoui, le bordelier de Marrakeche, durant plusieurs années, tout un harem de concubines souvent d’origine juives ou africaines.
D’ailleurs le premier mariage «officieux» de Mohamed V ne s´est pas déroulé à Rabat, la Capitale du Maroc, mais à Marrakech, «Capitale» de Glaoui, le 27 octobre 1926 avec une concubine de Glaoui «Abla» (aussi né d´une mère juive) et décèdée à Rabat le 1 er mars 1992.Hassan II, lui aussi, a suivi la tradition féodale et jahilite de ses ancêtres «alaouites». Mohamed, son fils aîné et l´actuel « roi » Mohamed VI, est né le 21 août 1963 à Rabat. Sa mère était «roturière» – selon le mythe alaouite – et n’a jamais reçu de titre, tout au plus était-elle l´une des «mères des enfants royaux».

Qui est Glaoui ? Haj Thami
El Glaoui appartient au clan familial des Glaoui qui sont une « Dynastie » de caids qui a « régné » sur une partie plus ou moins étendue du sud du Maroc probablement depuis le début du XVIIIè siècle jusqu’en 1956. La famille Glaoui construit sa réputation grâce au contrôle mafieux qu’elle exerçait sur la route qui lie Taroudant à Marrakech. Plusierurs tristement célébres «caïds» sont issus de cette famille. Le traître pacha de Marrakech, Thami Glaoui, s’illustre sous la colonisation par le soutien qu’il apporte à l´occupation étrangére de son pays. Il s’opposa à la résistance nationalistes et se ralia franchement aux occupants. Madani Glaoui a été grand vizir (premier ministre) de Moulay Hafid depuis l’intronisation de celui-ci (dont Madani fut le principal artisan) en 1908 jusqu’à 1911. Son cadet Thami – le père biologique de Hassan II – fut pacha de Marrakech (sorte de gouverneur sous l´autorité des occupants pour la moitié sud du Maroc) de 1912 jusqu’à l’«indépendance». L’origine des Glaoui reste obscure ; ils se sont même usurpé , comme les «alaouites» après coup, une ascendance «cherifienne». Thèse crédible : Fuyant les famines de l´AfriqueNoire l’ancêtre des Glaouis – comme celle de Ba Ahmed – se serait placé sous la protection d’un marabout local, aurait épousé la fille de ce dernier et hérité, à sa mort de sa «baraka» de la Zaouia et des biens affectés à son entretien notamment des salines sur l’oued Mellah.
L’agurram (santon) devient ensuite amghar «Cheikh» (chef séculier désigné par ses contribules pour les représenter auprès du Makhzen) et fait entériner sa position par Moulay Ismael qui le nomme à la tête des Glaoua (tribu du versant sud de l’Atlas) où il établit un souk (Khemis de Telouet) et un caravansérail. Il contrôle alors le passage des caravanes venant du Tafilalt et du Sahara (qui lui versent un droit de passage) et perçoit des taxes sur tous les produits vendus au souk et les revenus du caravanserail. En 1856 le commandement de ses successeurs est augmenté par Moulay Abderrahmane d’une tribu du versant nord de l’Atlas où il établit un second souk (El Had Zraqten, non loin de Telouet). L’omnipotent Pacha El Glaoui Il a été bourreau des rebelles de l’Atlas, collaborateur de la France coloniale, ennemi juré des nationalistes et suppôt du sultan Fantoche Ben Arafa. Pure produit du système alaouite, il était tout cela à la fois dans le Makhzen à l’époque, mais comment y est-il parvenu ? Les Glaoua, puissants guerriers, et comme les alaouites, bandits de grand chemin du Haouz, chefs de tribus Imzwarn, obtiennent de la France, avant même l’occupation, le statut de protégés. Après la destitution du sultan Abdelaziz, le caïd Madani El Glaoui (41 ans) est promu grand vizir, et son frère cadet Thami (28 ans) Pacha de Marrakech.
Durant les premières années de la colonisation, le jeune Thami El Glaoui passe, aux yeux de Lyautey, pour le «pacificateur» des tribus rebelles du Sud. Il est le «dompteur» de dissidents comme El Hiba et l’auteur des campagnes décisives qui lui ont valu une série de médailles françaises qu’il arbore avec fierté et des dotations d’armes considérables. En 1918, alors que son frère meurt, Lyautey le nomme «chef de la famille», le réinstalle Pacha de Marrakech et l’introduit auprès de personnalités françaises influentes, dont Philippe Pétain et Marcel Boussac. El Glaoui règne alors sur le Haouz. Telouet (jusqu’à Ouarzazate), est tenu par son neveu, le caïd Hammou. Après la mort de Hammou, en 1934, il y place son fils aîné, Brahim, né (justement) de sa concubine turque, Lalla Kamar Torkia. Entre temps, il sait se rendre utile, aux occupants, jusqu’au Rif, dépêchant en 1926 plus de 1.000 soldats en expédition pour évincer Abdelkrim. Une année auparavant, rapporte Gavin Maxwell, il dira à Lyautey qui repart, «peu importe qui vous succédera, vous resterez toujours mon maître». Il lui est reconnaissant, explique l’historien marocain, Kenbib, de «faire appel à lui pour faciliter la mise en place du protectorat et par là même conforter les structures traditionnelles du Makhzen» alaouite.
Du statut de protégé des occupants, il devient, comme tout le makhzen alaouite, l’un des piliers de l’occupation coloniale. Le butin de guerre d’El Glaoui provenant de ses pillages pendant ses attaques de «pacification» coloniales contre les tribus rebelles devient considérable. Le Glaoui devient alors un gros propriétaire terrien, avec le legs de dahirs (des lois) sultaniens et la bénédiction des occupants reconnaissant. En véritable mafioso, bien avant qu’il devienne pacha, «personne ne pouvait vendre ses olives avant lui», rapporte Paul Pascon. Avec l’autorité sur la région et sur les terres Guich, il a multiplié les stratagèmes pour étendre son territoire : 5300 ha cédés par l’État à titre quasi gracieux, 5000 ha «extorqués» à son bras droit El Biaz à sa mort, des impôts dont il retenait une part régulière, des droits d’eau obtenus sans contre-partie, etc. Au bout du compte, rapporte Pascon, en 1929, son salaire ne représentait que 2% de ses revenus. «Il a monté son train de vie en tablant sur la permanence des revenus que lui rapporte l’exploitation intensive des tribus», note à l’époque le commandant Orthlieb.
Le Glaoui devient actionnaire principal dans l’Omnium Nord Africain (ancêtre de l’ONA royale), mais aussi à la CTM. Dans le faste d’antan, raconte Mehdi Bennouna (fondateur de la MAP, cité par El Glaoui fils), «mon père a compté, à table, 17 plats pour chaque invité». A l’époque, le sultan alaouite se contente d’apposer son sceau et signature sur les décisions des occupants, et le Pacha passe, au mieux, en ajoutant à sa signature : «le seigneur de l’Atlas » et, au pire, pour « le prédateur du Sud ».El Glaoui aurait pu ne pas connaître une telle ascension si le caïd Mohamed Boucetta, son unique rival pour le pachalik de Marrakech, réputé plutôt vertueux, n’avait pas été assassiné en janvier 1920 par des hommes de main de Glaoui. El Glaoui a également une identité de « grand bordelier» (expression de Charles André Julien et Jean Lacouture). Le titre, il le doit au quartier de maisons closes de Bab El Khemis à Marrakech qui contenait plus d’un millier de prostituées, dont il prélevait 25% des entrées. Pragmatique jusqu’au bout, le Glaoui. Le fait que son beau père et grand vizir, El Mokri, lui ait signifié, lui «le serviteur du Makhzen», qu’il n’était plus le bienvenu au Palais l’aurait mis (subitement) en rogne. Enfin, le fait que le maréchal Juin l’ait «remonté contre le roi qui joue l’Istiqlal contre les serviteurs classiques du Makhzen» l’aurait convaincu de la nécessité de comploter contre lui (comme le fit son frère, Madani, contre le sultan Moulay Abdelaziz). Outre ses actions dans le groupe de la presse de l’occupation Mass, le Glaoui entretenait moult journalistes étrangers à sa solde. Lorsqu’en 1932, Gustave Babin signe un brulôt qui le démasque, intitulé «Son excellence», il envoie un plaidoyer autant au sultan qu’au résident général pour s’en dédouaner.
El Glaoui se prend même pour le prince à la place du prince. Profitant de sa relation privilégiée avec Winston Churchill, il tente d’envoyer à la reine d’Angleterre un cadeau en émeraudes à l’occasion de son mariage en 1952, mais on lui fait savoir qu’il n’était pas un chef d’État. L’épisode, commente Kenbib, montre «la maladresse du pacha une fois sorti du pays ». Mais elle montre aussi la mobilité et la notoriété surdimensionnée du personnage. Lucide mais aussi rongé par un cancer de plus en plus déclaré, il comprend tardivement que la soumission inconditionnée au couple Juin-Guillaume, a été la mauvaise carte à jouer. Le résident général Grandval l’ignorant, Mendès France refusant de le recevoir, les libéraux (pour l’indépendance et le retour du roi) ayant de plus en plus d’appuis à Paris, El Glaoui devient en octobre 1955 un anachronisme. 26 octobre 1955. Les traîtres marionnettes du Makhzen se retrouvent et se réconcilient ! Rabat. El Glaoui se fait petit devant le conseil de régence. Quinze jours plus tard, il se prosterne devant le sultan revenu au château St Germain-en-Laye. Alors que le alem dissident, Kettani, n’est pas reçu, le pacha traître est absout. Il meurt peu après, comme si «sa vie s’est confondue avec celle du protectorat», commente judicieusement Kenbib.
Livre de Ahmed Rami Mohamed El Ouahed