éviter les erreurs du programme de privatisation 1995-1999

Une économie de marché productive à finalité sociale

Le Président Abdelmadjid Tebboune lors de sa rencontre avec la presse nationale, le 8 août 2021, a indiqué sa volonté d’ouvrir le capital des entreprises publiques y compris les banques au secteur privé, condition de l’instauration d’une économie de marché productive à finalité sociale, loin de tout monopole qu’il soit public ou privé, source de surcoûts et d’inefficacité économique et sociale, devant éviter les erreurs du passé (la période 1995/2012) et le bradage du patrimoine public.

Ses orientations seront-elles appliquées ? Lui-même reconnaissant les difficultés de la transition d’une économie administrée, bureaucratisée à l’extrême, depuis plus de 60 années à une économie de marché à finalité sociale, liée à un Etat de droit, supposant de nouvelles forces sociales réformistes qui se heurteront à la résistance des conservateurs rentiers n’ayant plus le droit de réserve, après plus de 20 années, s’impose le devoir de vérité, certains pour fuir leurs responsabilités ayant incombé, faute de connaître le dossier, au Conseil national de privatisation, l’accusant d’avoir bradé le patrimoine national.

Pour éviter tout amalgame, le conseil de privatisation mis en place en 1996 avec ma nomination en tant que Président, certainement pour satisfaire les institutions internationales après la cessation de paiement de l’Algérie en 1994 et le rééchelonnement, (ayant été nommé puisque fondateur de l’association nationale de l’Economie de Marché ADEM (agrément ministère de l’Intérieur 63/92) a été gelé entre 1997, où d’ailleurs durant toute l’année 1997, j’ai été chargé de diriger par feu Ali Tounsi, DGSN, afin de parer au terrorisme, à la caserne Cati, l’audit sur l’optimalisation des moyens financiers de la DGSN en collaboration avec certains segments des services de sécurité et l’Institut de stratégie globale.

Toutes les dissolutions d’entreprises notamment locales avec des centaines de milliers de mètres carrés localisées en zones urbaines et semi urbaines et les cessions d’actifs, dans une totale opacité, au moment où le dollar sur le marché parallèle était d’environ 100 dinars un euro, au profit de certains privés entre 1995/1999, ont été réalisées directement par les services du Premier ministère de l’époque sans consulter la conseil de privatisation, où il serait utile de réaliser une audit pour évaluer le préjudice au profit du Trésor public. Après une conférence que j’ai donnée à l’Aurassi, Alger début 1998, menaçant de démissionner face à ces pratiques, le chef de gouvernement de l’époque, sous pression, a autorisé le Conseil de privatisation seulement début 1998 de faire l’évaluation de certaines petites entreprises publiques y compris certains hôtels, ce qui a été fait avec l’assistance de bureaux d’études publiques. Fin 1998, un avis d’appel d’offres a été réalisé dans une totale transparence en présence des soumissionnaires et de la presse nationale y compris l’ENTV.

Pour éviter ces cessions, alors que l’on continuait à céder des parts de grandes entreprises sous l’égide du Conseil national des participations de l’Etat présidé par le Premier ministre, juste après la démission du Président Liamine Zeroual, le Conseil de privatisation qui n’a pu réaliser aucune de ces petites cessions, sous la pression, avec l’arrivée du Président Abdelaziz Bouteflika qui a mis ses propres hommes, mis fin à ma mission et dissous le Conseil fin 1999. Pour ma part, je suis retourné à l’Université en janvier 2020, en tant que professeur et activant en tant qu’expert à l’international, à ce jour. C’est seulement face aux scandales financiers récents de certains hauts responsables qui se targuaient de patriotisme que j’ai pris conscience que cette transparence a dérangé maints rentiers sous le couvert non de l’idéologie, mais de gains personnels, expliquant cette dissolution.

Pour la période 2000/2019, plusieurs cessions ont eu lieu et là aussi un audit doit se réaliser, dont en cas de malversations, n’engageant que leurs auteurs, mais ne devant pas confondre acte de gestion avec corruption. En résumé, l’on ne doit pas confondre processus de privatisation qui est une cession partielle ou totale d’actifs avec la démonopolisation qui consiste à favoriser la création d’unités privées nouvelles. Privatisation et démonopolisation sont un acte éminemment politique, car déplaçant d’importants segments de pouvoir liés à la rente d’où des résistances naturelles de ceux qui en bénéficient, les gagnants de demain n’étant pas forcément ceux d’aujourd’hui. (Voir notre ouvrage édition OPU 1981 réédité à paris Editions Amazon 2018 sur réformes et privatisation).

Par Abderrahmane Mebtoul