Une proposition qui divise

Un Mondial tous les deux ans

Lors de la 71e assemblée de la FIFA, vendredi, les dirigeants du football mondial vont débattre de la «faisabilité» d’une Coupe du monde masculine et féminine organisée tous les deux ans.

Arsène Wenger, directeur du développement à la FIFA, recommande «d’aboutir chaque fin d’année à une grande compétition». Voilà une proposition qui soulève un torrent de réactions. Il y a ceux qui applaudissent si cela devait de concrétiser, et bien entendu, il y a ceux qui qualifient cette proposition de saugrenue. Les débats devraient porter sur les menaces de boycott du Mondial qatari ou sur l’éphémère Super League. Mais c’est une nouvelle bataille du calendrier qui se serait dessinée ce vendredi au congrès de la FIFA, avec l’idée d’une Coupe du monde tous les deux ans. Inscrite à l’agenda par la fédération saoudienne, proche du patron de la FIFA Gianni Infantino, «cette proposition a de quoi allécher les diffuseurs mais crisper les championnats nationaux, les confédérations et tous les clubs qui constatent déjà l’épuisement des joueurs». Mais le simple fait d’envisager «une étude de faisabilité sur les conséquences de l’organisation» de Mondiaux masculin et féminin «tous les deux ans», idée distillée depuis plusieurs semaines déjà, «fait l’effet d’une petite bombe», estime RMC.

Une déclaration qui dérange
Le coup est parti depuis la déclaration faite par le Français Arsène Wenger qui préconisait dans une interview au Parisien d’organiser «tous les deux ans» la Coupe du monde, l’Euro et les autres championnats continentaux, «et d’arrêter tout le reste». L’association European Leagues a vite jugé «irréaliste» cette proposition, «qui regroupe une trentaine de championnats européens, elle figure aussi dans un rapport rendu la semaine dernière par le même Wenger, qui recommandait samedi d’aboutir chaque fin d’année à une grande compétition». Pour RMC «Une telle refonte du calendrier sonnerait le glas des matches amicaux, réorganisent les phases de qualification, décalerait les tournois continentaux programmés deux ans après le Mondial, et imposerait aux clubs de libérer leurs internationaux chaque été – donc de retarder leur reprise et d’assumer un risque supplémentaire de blessure».

Les priorités de Gianni Infantini…
L’impact économique est lui aussi incertain : «Attention au risque de rendre le produit moins rare, donc moins prestigieux» que le Mondial actuel, explique à l’AFP Raffaele Poli, responsable de l’Observatoire du football CIES à Neuchâtel. Par ailleurs et comme «on ne peut pas faire payer le consommateur à l’infini, une telle multiplication des rendez-vous internationaux rongeait les droits TV des championnats et des tournois continentaux, bousculant tout l’équilibre actuel», ajoute le chercheur. Comme souvent, Gianni Infantino, cultive le mystère sur ses intentions : fin mars, il assurait être «ouvert à tout» pour le calendrier international au-delà de 2024 et début mai, il promettait «des discussions intéressantes» sur les propositions d’Arsène Wenger. «Sa priorité reste de faire de la place à son Mondial des clubs élargi à 24 équipes, projet repoussé en raison de la pandémie, combattu depuis l’origine par l’UEFA et la Confédération sud-américaine de football (Conmebol), et qui permettrait à la FIFA de renforcer sa position dans le lucratif football de clubs».

Cent matches supplémentaires qu’il va falloir caser
Pour Raffaele Poli, l’idée d’un Mondial tous les deux ans peut d’ailleurs n’être qu’une «position de négociation» de l’instance pour décrocher un compromis plus favorable sur le calendrier international, en arrachant par exemple un accord sur son Mondial des clubs. Après la réforme par l’UEFA de sa Ligue des champions au-delà de 2024, avec cent matches supplémentaires qu’il va falloir caser, la FIFA «montre qu’elle aussi peut saturer le calendrier», relève le responsable du CIES. Reste à voir comment ces manœuvres seront accueillies par les championnats, entraîneurs, joueurs ou supporters, las de n’être pas consultés sur des programmes toujours plus denses et déjà exaspérés par l’épisode Super League, estime l’AFP, ce projet de compétition privée voulu par douze grands clubs dissidents et rapidement avorté face au tollé général. «Peut-être devons-nous demander à l’UEFA et à la FIFA de prolonger l’année. Peut-être que nous pourrions avoir 400 jours par an», ironisait ainsi mi-avril Pep Guardiola, l’entraîneur de Manchester City.
Synthèse de H. Hichem