Pour lutter contre la corruption et la mauvaise gestion, délimiter clairement les prérogatives des institutions de contrôle par des mécanismes de régulation transparents

Economie

La corruption, à ne pas confondre avec acte de gestion, devant éviter de freiner les énergies créatrices, la définition du manager étant de prendre des risques, pouvant gagner ou perdre, démobilise la société par une méfiance généralisée et accentue le divorce Etat-citoyens.

D’autant plus que les opérateurs publics durant cette phase où la bureaucratie est omniprésente, subissent des injonctions qui échappent à leurs propres initiatives dont les différentes formes d’organisations depuis l‘indépendance politique traduisent les rapports de force au niveau du pouvoir pour la gestion des capitaux marchands de l’Etat. D’où l’importance d’un système d’information transparent pour apprécier objectivement les performances. Car l’expérience montre souvent des amortissements exagérés par rapport aux normes internationales pour des unités comparables, le gonflement de la masse salariale qui éponge la valeur ajoutée l’absence d’organigrammes précis des postes de travail par rapport au processus initial, gonflement démesuré des frais de siège qui constitue un transfert de valeur en dehors de l’entreprise avec prédominance des postes administratifs, comptabilités à prix courants de peu de signification ne tenant pas compte du processus inflationniste.

Et comme au niveau macro-économique la production est production de marchandises par des marchandises nous sommes dans le brouillard pour tester les performances individuelles surtout en l’absence de comptes de surplus physico-financiers à prix constants qui peuvent aider à suppléer à ces déficiences comme je l’avais suggéré à la Présidence de l’époque en tant sue haut magistrat premier conseiller et directeur général à la Cour des comptes entre 1980/1983. Aussi s’agit de bien spécifier les facteurs internes à l’entreprise des facteurs externes. Au niveau interne car beaucoup de gestionnaires rejettent la responsabilité sur les contraintes d’environnement en soulignant l’importance des créances impayées, force de travail inadaptée, blocage bancaire, infrastructures (logement – santé, routes) mais oublient d’organiser leurs entreprises.

Combien d’entreprises publiques possèdent-elles la comptabilité analytique, les banques des comptabilités répondant aux normes internationales, afin de pouvoir déterminer leur efficience loin de l’ancienne culture mue par l’unique dépense monétaire. Combien d’entreprises établissent un budget prévisionnel cohérent du personnel, des achats, des ventes déterminant les écarts hebdomadaires, mensuels entre les objectifs et les réalisations, ces opérations budgétisées étant la base du plan de financement, sans compter la faiblesse des différents travaux comptables de base. Par ailleurs, l’absence d’observatoire de l’évolution des cours boursiers, permet des prix à l’achat exorbitants en devises pour ne pas parler de surfacturations, gonflant la rubrique achat de matières premières du compte d’exploitation où bon nombre de produits comme le blé, le rond à béton … sont cotés journellement à la Bourse. La compréhension des mécanismes boursiers, de l’évolution du Dollar, du Yen et de l’Euro a des incidences sur le niveau des réserves de change.

4.-L’efficacité du contrôle doit s’insérer dans le cadre d’une vision stratégique

Les mécanismes de contrôle en économie de marché doivent définir la nature du rôle de l’Etat pour favoriser le contrôle. Or, la dilution des responsabilités à travers la mise en place de différentes commissions témoignent de l’impasse du contrôle institutionnel en dehors d’un cadre cohérent, où les règlements de comptes peuvent prendre le dessus. Qui est propriétaire ? Car pour pouvoir sanctionner une entité, il faut qu’elle ait été responsable. Peut- on sanctionner un directeur général qui a subi une injonction externe. Un directeur général d’entreprise publique est-il propriétaire dans le sens économique large- véritable pouvoir de décision-de son entreprise ? Qui est propriétaire de l’ensemble de ces unités économiques et de certains segments des services collectifs se livrant à des opérations marchandes?

C’est toute la problématique du passage de l’Etat propriétaire gestionnaire à l’Etat régulateur ou stratège que n’ont résolu jusqu’à présent à travers les différentes organisations de 1965 à 2021, grandes sociétés nationales 1965/1979 – leurs restructurations de 1980/1987, les fonds de participations vers les années 1990, les holdings 1995/1999, puis entre 2000/2020 les sociétés de participation de l’Etat SGP et récemment au retour à la tutelle ministérielle. Ces évolutions s’expliquent par les interférences entre le politique et l’économique dans le cadre de la gestion des capitaux marchands de l’Etat, y compris le système financier public enjeu de pouvoir. Nous pouvons distinguer six cercles de décision.

Le premier cercle est celui par lequel transitent toutes les décisions sans exception, Présidence de la République et son staff et toutes les institutions qui lui sont rattachés dont la défense, le ministère des Affaires étrangères, des institutions comme le Conseil de sécurité ; le second cercle le chef du Gouvernement ou le Premier ministre avec son staff ; le troisième cercle les ministères de souveraineté et de l’économie le ministre de l’Intérieur, de la Justice, des Finances, de l’Energie ; de l’Investissement ; le quatrième cercle est l’ensemble des organisations politiques ( émanation du Parlement) juridictionnel (Conseil constitutionnel, Conseil d’Etat, Cour des comptes, Conseil économique et social, Conseil de la concurrence, Conseil national de l’énergie, en plus les Conseils culturels et religieux) ; le cinquième cercle est composé des administrations sectorielles centrales et locales;

Le sixième cercle de la décision est celui des syndicalistes, organisations professionnelles ou patronales, associations, entreprises publiques et privées; le sixième cercle peut être représenté par l’extérieur du fait des accords internationaux de l’Algérie notamment avec l’ONU, le FMI, la Banque mondiale et d’autres institutions internationales (zone de libre échange avec UE – le Monde arabe- l’Afrique, OMC). En résumé, les pratiques sociales contredisent souvent les discours si louables soient-il. Comme l’ a mis en relief l’économiste de renommée mondiale, John Maynard Keynes, il vaut mieux que l’homme exerce son despotisme sur son compte en banque personnel que sur ses concitoyens. Comme je le rappelais dans une interview donnée au grand quotidien financier, les Echos – Paris le 07 aout 2008, le terrorisme bureaucratique et la corruption sont les obstacles principaux au frein à l’investissement porteur en Algérie. La lutte contre la mauvaise gestion et la corruption renvoie à la question de la bonne gouvernance et de la rationalisation de l’Etat dans ses choix en tant qu’identité de la représentation collective.

(Suite et fin) Dr Abderrahmane Mebtoul Pr des universités Expert international