Tensions sur les prix du gaz au niveau mondial

Energie

Le pétrole a été coté le 7 octobre à 21h GMT à 82,46 dollars le Brent et 79,44 dollars le Wit, pour un cours 1,16 dollar un euro, toute dépréciation du dollar faisant augmenter le cours de l’énergie libellé en dollars euro/dollar. En Asie, depuis le début octobre 2021, le prix du GNL fluctue entre 33/37 dollars tenant compte du cout de transport, contre 27 millions de BTU début septembre où pour 27 dollars, en équivalent baril de pétrole, devant multiplier par six, équivaut à 150 dollars le baril de pétrole, soit presque deux fois plus que le prix du baril de Brent.L’OPEP+ lors de la récente réunion face à l’incertitude de l’économie mondiale a décidé un ajustement à la hausse de la production globale mensuelle de 400.000 barils/j, en attendant la prochaine réunion prévue le 04 novembre 2021, ce explique également cette tension sur les prix.

1.-Une croissance mondiale incertaine expliquant l’attitude de l’OPEP+
Avec le déploiement des vaccins et l’assouplissement des mesures de confinement les cours et la demande d’or noir ont connu une hausse inégalée tandis qu’une pénurie d’énergie dans l’hémisphère nord a fait grimper les prix du gaz naturel à leur plus haut niveau depuis sept ans, avec des répercussions sur le marché pétrolier.
Dans le même temps, les stocks de brut ont diminué, l’OPEP représentant 35/40% de la production commercialisée mondiale et les trois principaux pays qui ont une influence sur les prix étant l’Arabie Saoudite et la Russie et les USA pour le pétrole et les USA, la Russie, l’Iran et le Qatar pour le gaz . Cette progression intervient alors même que la reprise économique mondiale montre des signes de ralentissement en raison de problèmes dans les chaînes d’approvisionnement et dans un climat d’inquiétude concernant le variant Delta, qui entraîne un pic d’infections dans plusieurs pays. Selon la directrice générale du FMI dans une déclaration en date du 05 octobre 2021, je la cite « Nous nous attendons maintenant à ce que la croissance ralentisse légèrement cette année » par rapport à ce que le Fonds monétaire international prévoyait en juillet 2021 de plus 6%, précisant que le FMI publiera dans une semaine ses prévisions économiques mondiales actualisées en ouverture des réunions d’automne du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale.
Dans les pays émergents, qui n’ont pas accès à suffisamment de vaccins, la croissance « continue de se dégrader » tandis que les pays riches devraient retrouver leurs niveaux d’avant-crise « d’ici 2022 ». Si les Etats-Unis et la Chine, les deux premières puissances économiques, restent « les moteurs essentiels de la croissance», « leur croissance ralentit sans compter l’incertitude qui plane sur l’économie américaine qui pourrait faire face à un défaut de paiement. Pour la Chine, après le groupe immobilier Evergrande en graves difficultés financières, La capitalisation boursière du groupe immobilier ayant baissé de 80% depuis le début de janvier 2021, le géant de l’immobilier Fantasia est en défaut de paiement et pourrait faire faillite en laissant 205,7 millions de dollars d’impayés faisant craindre un krach qui pourrait se répercuter par effet domino sur les places financières mondiales. Selon le FMI , existe une divergence entre les économies avancées qui vont revenir à leurs niveaux d’avant la pandémie « d’ici 2022 » mais avec une dette publique mondiale qui, selon les calculs du FMI, atteint désormais près de 100% du PIB de l’économie mondiale, alors que la plupart des pays émergents et en développement « mettront encore de nombreuses années à se remettre » de la crise du Covid-19. Et pour combler cet écart, la Banque mondiale recommande comme objectif de faire vacciner 40% de la population mondiale d’ici la fin de cette année 2021 et 70% d’ici la première moitié de 2022 où en plus que certains pays émergents sont confrontés à des pressions sur les prix qui « devraient persister dont des prix alimentaires mondiaux, plus de 30% au cours de l’année 2020..C’est dans ce cadre de l’incertitude de l’économie mondiale que rentre la flambée des prix de l’énergie qui selon les experts est un phénomène mondial très complexe. Pour Michael Lynch, président du cabinet Strategic Energy & Economic Research (SEER), les niveaux de prix auxquels se situe actuellement l’or noir auraient été susceptibles de jouer sur la demande si le marché du gaz naturel n’était pas lui-même incandescent, car une partie de la demande de gaz se reporte ainsi sur le marché du pétrole et fait grimper encore davantage les cours. Cependant, seule une petite frange des centrales électriques disposent d’une capacité de basculement vers le pétrole ou le charbon, selon Tony Syme, économiste au sein de Salford Business School, le nombre ayant diminué ces trente dernières années du fait de la prise en compte de l’impact environnemental des combustibles fossiles.

2. Les stratégies gazières
mondiales
Entre 2018/2019, selon l’AIE nous avons la répartition suivante 33,1 % de pétrole, 27,0 % de charbon, 24,2 % de gaz naturel, 4,3 % de nucléaire et 11,5 % d’énergies renouvelables (hydroélectricité 6,5 %, éolien 2,2 %, biomasse et géothermie 1,0 %, solaire 1,1 %, agro-carburants 0,7 %), cette structuration étant appelée à évoluer avec la prise de conscience des impacts désastreux pour l’avenir de l’humanité du l’impact du réchauffement climatique. Mais au niveau mondial, la part du pétrole dans la production d’électricité est très faible : moins de 3% en 2019 selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), loin derrière le charbon (36,7%) et le gaz naturel (23,5%).. Les réserves mondiales prouvées sur un total de 197.394 milliards de mètres cubes gazeux( données de 2018/2019). Nous avons par ordre décroissant : Russie 47.800 milliards de mètres cubes, Iran 33.500, Qatar 24.300, USA 8.714, Arabie saoudite 8.602, Turkménistan 6061, Venezuela 5702, Nigeria 5.284, Chine 5.194 et pour l’Algérie entre 2500 et 3000 selon la déclaration du ministre algérien de l’Energie en décembre 2020 , 4500 étant celles de BP des années 2000. Les 10 principaux pays producteurs de gaz naturel par ordre décroissant sont la Russie qui représente à elle seule 20 % de la production mondiale de gaz naturel et est également le plus gros exportateur, au deuxième rang avec la révolution du gaz de schiste étant devenu exportateur en Europe, les États-Unis d’Amérique, puis vient le Canada ( troisième position) le Qatar quatrième position, l’Iran ayant été déclassé suite aux sanctions américaines, suivi de la Norvège, la Chine, l’Arabie Saoudite, et l’Algérie est en neuvième position. Ces données doivent être interprétées avec précaution car on peut découvrir des milliers de gisements, mais non rentables selon les normes financières fonction des coûts d’exploitation et de l’évolution du prix international lui-même fonction de la demande et facteur déterminant, la concurrence internationale. Nous avons, le gazoduc Israël-Europe en activité vers 2025, vers les côtes sud-européennes qui, acheminerait jusqu’à 16 milliards de mètres cube par an des champs pétrolifères maritimes israéliens et chypriotes vers l’Italie et la Grèce, pour un coût évalué à 6 milliards d’euros, financé en partie par les banques Goldman Sachs et JP Morgan ; les importants gisements de gaz en Méditerranée (20.000 milliards de mètres cubes gazeux) expliquant les tensions entre la Grèce et la Turquie, les grands gisements au Mozambique (plus de 4.500 milliards de mètres cubes gazeux), sans compter le Nigeria avec ses GNL. Outre les USA, premier producteur mondial avec le pétrole/gaz de schiste, avec de grands terminaux, ayant déjà commencé à exporter vers l’Europe, nous avons la concurrence en provenance de la mer Caspienne dont gazoduc Trans Adriatic Pipeline (818 km ) concurrent direct de Transmed, qui achemine le gaz à partir de l’Azerbaïdjan qui traverse le nord de la Grèce, l’Albanie et la mer Adriatique avant de rallier, sur 8 km, la plage de Melendugno au sud-est de l’Italie, opérationnel pouvant transférer l’équivalent de 10 milliards de mettre cube par an. Mais le le plus grand concurrent de l’Algérie sera la Russie, avec des coûts bas où la capacité du South Stream de 63 milliards de mètres cubes gazeux, du North Stream1 de 55 et du North Stream2 de 55 milliards de mètres cubes gazeux, ce dernier en voie de régularisation, assouplissement de la position des USA, soit au total 173 milliards de mètres cubes gazeux en direction de l’Europe (Conférence/débats du Pr Abderrahmane Mebtoul, à l’invitation de la Fondation allemande Friedrich Ebert et de l’Union européenne 31 mars 2021).. Nous avons également le fameux gazoduc Sibérie Chine, le Qatar et l’Iran proche de l’Asie avec des contrats avantageux pour la Chine et l’Inde , et en Afrique , le retour de la Libye (sans compter le pétrole 42 milliards de barils de réserves et 2000 milliards de mètres cubes gazeux non exploitées pour une population de 6 millions d’habitants), le Mozambique ( plus de 4.500 milliards de mètres cubes gazeux), et le Nigeria réserves 4500.

3.-Le pourquoi de la flambée du prix
du gaz ?
Au niveau de la Bourse américaine, qui cote journellement, ce qui n’est pas le cas en Europe et en Asie, étant un indicateur de tendance, le cours du gaz est passé en une année de 1,5 dollar le MBTU au 07/10/2021 à 5,66 dollars. Fin septembre , début octobre, le prix du gaz naturel liquéfié (GNL) importé par l’Asie du Nord-Est a dépassé les 30 dollars par million de btu (british thermal unit, la mesure de référence sur ce marché) et vient de battre un record, la cotation du gaz le 05 octobre 2021 était de 34,47 dollars le MBTU.
(A suivre)
Professeur des universités expert
international Abderrahmane Mebtoul