Concilier la cohésion sociale et l’efficacité économique

Les défis de la nouvelle politique des subventions pour l’Algérie

Le Gouvernement, dans son Plan d’action, a pour objectif de cibler les subventions. Cette présente contribution est une brève synthèse, d’une brûlante actualité, d’un rapport réactualisé remis à l’ancien Gouvernement le 14 septembre 2012 dont les recommandations n’ont jamais été appliquées. Une politique des subventions ciblées suppose une autre gouvernance et un système d’informations fiable en temps réel, système qui s’est effrité. Pour preuve, les déclarations contradictoires sur la masse monétaire au niveau de la sphère informelle et contrôlant une masse monétaire hors banques, selon les informations données par le président de la République lors de sa conférence de presse, fin 2020 entre 6.100 et 10.000 milliards de dinars, soit au cours de 137 dinars un dollar entre 44,52 et 72,99 milliards de dollars pour un PIB en nette diminution en 2020 de 160 milliards de dollars et selon le FMI de 153 milliards de dollars pour 2021. Au niveau des subventions, le PLF 2022 fait ressortir un montant qui avoisine en moyenne 3.250 milliards de dinars par an sur la période 2012-2017 (soit environ 19,3% du PIB), ce qui représente entre 30 et 41 milliards de dollars en fonction de la fluctuation du taux de change.Pour les prévisions 2022, en plus de l’alimentation des caisses de retraite de retenir 3% de la taxe pétrolière ce qui donne environ 63 milliards de dinars, les subventions implicites, constituées notamment de subventions aux produits énergétiques et des subventions de nature fiscale, représentent environ 80% du total des subventions et que les subventions explicites représentent un cinquième du total des subventions. Le montant des subventions est contremandé par la dévaluation dinar, où la loi de finance prévisionnelle PLF 2022 prévoit une dépréciation progressive par rapport au dollar, de 149,3 dinars un dollar en 2022, 156,8 en 2023 et 164,6 en 2024, posant le problème du fait de l’extériorisation de l’économie algérienne dont le taux d’intégration ne dépasse pas 15% des impacts d’actions spéculatives sur les devises, sur le taux d’inflation qui constitue une épargne forcée, et de l’opportunité du lancement de projets créateurs de valeur ajoutée dont le retour en capital est à moyen et long terme

1- Les différentes formes
de subventions
Pour le PLF 2022, le montant des subventions est estimé à 1942 milliards de dinars, 14,17 milliards de dollars au cours d’octobre 2021, soit 19,7% du budget de l’Etat contre 24% en 2021 et 8,4% du PIB. Sans entre exhaustif, nous avons les subventions du prix du pain, de la semoule et du lait où bon nombre d’Algériens vivent dans la pauvreté se nourrissant essentiellement de pain et de lait ce qui traduit une fracture sociale. Les subventions octroyées coûtent au Trésor public un différentiel qui reste mobile en fonction des fluctuations du prix d’achat de la matière première sur les marchés mondiaux. Toutefois, le Trésor public paie ce différentiel, quel que soit son niveau. Les subventions les plus importantes supportées pat le Trésor sont les subventions des carburants et de l’électricité.
L’Algérie est classée parmi les pays où le prix du carburant est le moins cher au monde. Mais conserver cette politique coûte de plus en plus cher. La différence du prix à la pompe avec les pays voisins fait que de grandes quantités de carburants traversent quotidiennement les frontières vers le Maroc et la Tunisie, sans compter les pays riverains du grand Sud. Il en est de même du prix de l’électricité/gaz, avec une différence entre le prix aux ménages et les clients industriels. Le niveau du prix du gaz concédé aux centrales est de l’ordre de 10% de celui qui correspond aux transactions internationales du gaz, une différence qui grève considérablement le budget de Sonelgaz, en déficit structurel depuis des années et en plus, ce prix plafonné qui couvre à peine les couts a de quoi décourager tout investisseur local ou étranger dans ce domaine rendant caduque la loi sur l’électricité et le gaz par canalisations. Pour les différentes unités pétrochimiques, aciéries, matériaux de construction etc. fortes consommatrices de gaz, quel doit être le prix de cession pour éviter un transfert de rente ? Nous avons les subventions de l’eau, renvoyant au problème de la tarification de l’eau qui se pose, à peu près, dans les mêmes termes que les carburants. Son prix de cession demeure faible malgré des coûts croissants (investissement additionnel) plus importants pour l’eau dessalée qui nécessite de lourds investissements, problème aggravé par les déperditions du réseau de distribution (45 à 50 % de pertes, en moyenne nationale), le différentiel étant payé par l’Etat. Pour le système de Santé, les subventions supportées par l’Etat sont importantes.
Pour le transport, il n’y pas uniformité devant distinguer le transport par rail subventionné, des autres moyens. Pour Air Algérie, du fait d’une gestion défectueuse et de sureffectifs sont de loin plus élevés par rapport aux normes internationales. Ainsi les compagnies étrangères s’alignant sur ceux d’Air Algérie bénéficient d’une rente de monopole. Pour le transport routier de voyageurs, on assiste à des conflits permanents notamment des transporteurs privés du fait du bas tarif et de la confusion de l’interprétation de différentes circulaires, le prix étant lié aux coûts des pièces de rechange et au prix du carburant.
Les subventions s’appliquent également au logement social où le prix du mètre carré dans les grandes agglomérations varie de 50 000 à 500 000 et plus selon les quartiers, non supportés par les bénéficiaires, ce qui occasionne un transfert de rente. Pour l’aide à l’emploi où l’entreprise qui recrute, bénéficie d’importantes facilités financières et fiscales, d’importants abattements sur la cotisation de sécurité sociale à leur charge, non supportés par l’employeur et pris en charge par le Trésor public.
Nous avons la charge financière du transport des étudiants, de la restauration et de l’hébergement des étudiants internes sans distinction ce qui se répercute sur la gestion des Œuvres universitaires comme les frais de la carte d’abonnement annuel du transport universitaire où le prix de la restauration, date des années 1970. Qu’en sera-t-il avec plus de 3 millions d’étudiants horizon 2025, sans rappeler également l Nous avons les exonérations fiscales et de TVA accordées par les différents organismes d’investissement (ANDI, ANSEJ) y compris pour les entreprises étrangères, dont il conviendrait de quantifier les résultats par rapport à ces avantages (exportation et création de valeur ajoutée interne) les subventions à travers les Œuvres sociales des CEM et des lycées ? A cela s’ajoutent les assainissements répétés aux entreprises publiques qui ont coûté au Trésor public, selon un rapport du Premier ministère, repris par l’APS, le 1er janvier 2021, ces trente dernières années, plus de 250 milliards de dollars de quoi créer tout un nouveau tissu productif et dont plus de 80% sont revenus à la case de départ et les différentes réévaluations qui selon le premier ministre ont été évaluées entre 2005/2020, à 8 900 milliards de dinars soit au cours moyen de 135 dinars un dollar environ 66 milliards de dollars : continuer sur cette voie est un suicide collectif

2.- Concilier l’efficacité économique et la cohésion sociale
Il ne faut pas se tromper de cibles pour paraphraser les stratèges militaires. Il ne faut pas se focaliser uniquement sur les subventions mais revoir la gouvernance actuelle pour plus de cohérence et de visibilité de la politique économique et sociale, une lutte contre la corruption et les surcouts et concilier l’efficacité économique avec la cohésion sociale. Aussi, se pose cette question stratégique pour l’Algérie avec la chute du cours des hydrocarbures, l’Etat pourrait ne pas avoir les moyens de continuer à subventionner certains produits alimentaires, comme se pose actuellement l’alimentation des caisses de retraite le déficit approchera les 700 milliards de DA, fin 2021.
(A suivre)
A. M.