Un footballeur des plus complets 

Soukhane Abderrahmane 

Certes, Soukhane Abderahmane était un footballeur professionnel des plus complets mais aussi un combattant de la première heure pour la noble cause du combat libérateur de son pays l’Algérie, la preuve, il n’avait pas hésité un seul instant pour rejoindre la Tunisie avec ses nombreux compagnons à l’appel du Front de libération nationale.Soukhane Abderahmane a été sacré meilleur buteur du Championnat de France avec 21 buts à son actif avec le Havre club évoluant en division 2. En 1958, il rejoint l’équipe de la Liberté, représentant le FLN, mouvement luttant pour l’indépendance de l’Algérie, et a participé à de nombreux matches amicaux à travers le monde que ce soit en Chine, Jordanie, Yougoslavie, Maroc, Tunisie, Irak, Egypte et autres.
Après que l’Algérie ait gagné son indépendance, sa souveraineté avec la perte de plus d’un million et demi de Chahid, Soukhane Abderahmane retourne en France plus spécialement au Havre FC puis il poussa sa carrière à Toulouse FC à partir de 1964 puis le Red Star en 1967-1968. Cependant, il décida de rentrer en Algérie où il devint entraîneur du WA Tlemcen, puis entraîneur de l’Equipe nationale d’Algérie en compagnie de son ami de toujours Rachid Mekhloufi. Soukhane Abderahmane est né le 13 septembre 1936 à El Biar, un quartier chic de la Banlieue d’Alger, avec la JS El Biar, un club qui respire le football.
Il avait tout juste 20 ans lorsqu’il signa une licence avec le Havre en compagnie de son frère Mohamed, son aîné et cela durant l’année 1956. Ce joueur qui évoluait à El Biar, son club formateur va très vite s’imposer avec les rouges et marine comme un avant-centre de qualité, extrêmement efficace, mais il ne tarda pas au Havre où il ne va passer que deux années avant de retourner en Algérie.
En 1962, la guerre d’Algérie terminée, Abderahmane Soukhane décide de retourner en France, plus spécialement au Havre qui évoluait en division 2, il va de nouveau être illuminé par le talent de grand buteur.
Il fit partie, avec son frère aîné Mohamed disparu dernièrement, du Onze de l’indépendance. Il a traversé la vie avec beaucoup de bonheur et de réussite, malgré le difficile contexte de l’époque (la colonisation), cette glorieuse formation de football qui, étant une véritable école, a enfanté des générations de grands et talentueux footballeurs à l’instar des frères Soukhane, des Ibrir, Issad Dhomar, Omar Kezzal, sans oublier Ouabri, Zoubir, Meghalsi, Abdelkader Saadi, Reda Abdouche, Zoubir Bachi, Nacer Bouiche, les frères Bourai, Boualem Laroum et bien d’autres enfants du quartier qui ont fait le bonheur d’un club qui a été pendant des années la fierté du football algérois et algérien.
Jamais dans le monde du football algérien, un joueur a été aussi complet et d’une correction exemplaire comme le fut Abderahmane Soukhane : c’était un footballeur de grande classe, enthousiaste et lucide dans l’entrejeu. Sorti de la grande école El Biaroise au même titre que son frère aîné Mohamed, cependant Abderahmane était devenu l’idole des jeunes, il savait voir le jeu et le réaliser d’une manière juste.
Soukhane Abderahmane avait de l’ambition et fut la grande découverte du football algérien.
Il était devenu le Maestro de la JSEB. Il était l’animateur, le réalisateur et le créateur, il symbolisait aussi la volonté de cette formation qui avait produit sans risque de nous tromper, les meilleurs footballeurs Algérien.
Abderahmane avait un tempérament de gagneur, avec une grande valeur technique, il était à l’aise que ce soit sur le flanc gauche ou droit, un joueur intelligent sur le terrain. Il était solide, accrocheur et volontaire, ses débordements le long de la ligne de touche et ses centres relevaient d’une précision diabolique avec désorientation totale de la défense adverse qui faisait de lui un attaquant adroit dont il faut se méfier, il aimait avoir du champ libre devant lui pour mieux s’exprimer afin d’exploiter comme il se doit ses qualités de dribbleurs. Soukhane Abderahmane a fait tout son apprentissage au sein de la JSEB avant de faire le même itinéraire que son frère Mohamed qui le conduira au Havre, un club de seconde Division du Championnat de France. Puis, il ralliera la Tunisie où il évoluera au sein de l’équipe de la liberté, glorieuse formation du Front de libération nationale. Nous pourrons dire que les trente deux footballeurs de l’indépendance furent des moudjahidine sans arme à la main mais seulement un ballon dans les jambes. En 1962, il rentre au bercail mais les conditions footballistiques sont telles qu’il fait le même choix que certains professionnels tels que Rachid Mekhloufi, Amara Said, Oudjani afin de recommencer une seconde carrière. Il atterrit au FC Toulouse l’entraîneur Firoud. Soukhane Abderahmane avait acquis une grande expérience au sein de l’équipe de la Liberté pour devenir un buteur et un meneur de jeu incomparable. Il était doué balle au pied, un véritable génie constructeur. Qui de nous ne se souvient pas de lui, il a porté le maillot national plus de douze fois et a marqué trois buts avec les Verts, il avait de la classe dans les jambes, il pouvait faire ce qu’il voulait avec un ballon dans un terrain de football.
Soukhane Abderahmane a fait partie de la première équipe algérienne qui joua sa deuxième rencontre internationale en date du 28 février 1963 face à la Tchécoslovaquie à l’âge de 26 ans avec l’entraîneur Ibrir, El Kamel et Firoud. La chose qui était frappante à l’époque était le fait qu’ils étaient deux frères à être alignés parmi les Verts : Abderahmane et Mohamed, deux frères qui avaient débuté à la JSEB puis au club du Havre pour en fin de compte faire partie de la glorieuse formation de la Liberté.
Soukhane Abderahmane a continué de jouer jusqu’à l’âge de 32 ans, sa dernière rencontre officielle internationale avec les Verts fut en date du 17 novembre 1968 contre la Tunisie avec l’entraîneur Lucien Leduc. De retour en Algérie, il signe une licence à l’USM Bel-Abbès avec laquelle il terminera sa carrière de footballeur avant de faire partie du staff technico-administratif de l’Equipe nationale avec Rachid Mekhloufi et Zouba Abdelhamid.
Soukhane Abderahmane a participé à une rencontre de Coupe du monde (éliminatoires) et à divers matches amicaux. C’est un véritable battant, toujours à l’affût de l’erreur adverse. Les entraîneurs qui s’étaient succédé furent enthousiasmés par ses qualités techniques, il a beaucoup donné au football algérien, il mérite le plus grand respect et le plus bel des hommages.
L’Algérie et le peuple algérien doivent être fier d’avoir enfanté un joueur de la classe de Soukhane Abderahmane et de son nationalisme : il ne fait plus partie de ce monde certes, mais il demeure ancré dans les cœurs de ceux qui l’ont connu.
Kouider Djouab