Une autre gouvernance en Algérie pour éviter les transferts illicites de capitaux

Sécurité nationale et lutte contre la corruption

«N’ayant pas attendu les récentes déclarations, comme je le rappelais déjà lors d’audits au niveau de la Cour des comptes entre 1980/1983 et sur Sonatrach entre 1974/1995, et dans des interviews notamment à l’Agence France Presse – AFP- 4 août 2013 et à Radio France Internationale le 6 août 2013 ‘’L’Algérie et les transferts illicites de capitaux’’, il reste beaucoup à faire pour que nos responsables s’adaptent aux arcanes de la nouvelle économie, où se dessinent d’importants bouleversements géostratégiques mondiaux, croyant que l’on combat la fuite des capitaux à partir de commissions et de circulaires, ignorant tant les mutations mondiales que la morphologie sociale interne, en perpétuelle évolution».En préconisant l’adoption d’un mode de règlement à l’amiable garantissant la récupération des biens détournés, des précisions du gouvernement s’imposent. Comment récupérer les montants, faute de traçabilité, dans les paradis fiscaux, en bons anonymes dans les bourses, et souvent mis sous le nom d’étrangers, donc non soumis au Droit algérien. Ceux qui les pratiquent se font assister par des bureaux conseils spécialisés pour effacer toute traçabilité, cela concernant pas seulement l’Algérie mais comme le montre la pratique, bon nombre de pays développés où en plus cela nécessite que l’Algérie ait signé des accords de réciprocité et une collaboration sans faille tant des pays que des institutions internationales. Excepté les biens notariés mis aux noms d’Algériens supposant d’ailleurs des procédures judiciaires complexes, il convient de se demander combien le gouvernement a récupéré ces dernières années, ne devant pas confondre les biens acquis par le ministère des Affaires étrangères, propriété de l’Etat qui peuvent être vendus. Rappelons-nous les fonds du FLN dans certains comptes spéciaux, durant la guerre de libération nationale dont une grande partie n’a jamais pu être récupérée. Même en distinguant la personne physique de la personne morale, il faut tenir compte des structures de l’économie algériennes où plus de 95% des entreprises, selon le registre de commerce sont des unités unipersonnelles ou de petites SARL à gestion familiale. Pour les personnes morales étrangères, elles relèvent du droit de leur pays et il est illusoire qu’elles se dénoncent car risquant de graves sanctions pénales. La direction de la douane algérienne a demandé par le passé, notamment à l’Europe et à la Chine naïvement, de leur communiquer les tarifs, pour dénoncer leurs opérateurs qui sont également complices de surfacturations, pas de réponses de ces pays, cette demande étant une utopie. Au niveau des relations économiques internationales, quelques centaines de grandes entreprises globalisées contrôlent 70% du commerce mondial, 75% du commerce de matières premières et 80% du commerce de la gestion et des services. Aussi, lorsque les échanges s’effectuent entre structures d’un même groupe multinational (filiales, fournisseurs, distributeurs…), le potentiel de manipulation des prix, des cours et de la facturation est naturellement multiplié. Pour se prémunir, l’Algérie doit se mettre en réseaux avec les institutions du traitement du renseignement luttant contre les circuits financiers clandestins qui pourraient lui fournir toutes les preuves matérielles impliquant des Algériens dans ce genre d’opérations de transfert illicite de capitaux. Mais l’Algérie doit avant tout faire le ménage au sein de l’économie algérienne en mettant en place de nouvelles méthodes de gestion tant dans les administrations et services collectifs que dans les entreprises. Il faut donc s’attaquer à l’essence de la réforme des institutions et du système financier qu’aucun gouvernement via le ministre des Finances depuis l’indépendance politique n’a pu réaliser car enjeu énorme de pouvoir, et nécessitant la mise en place d’un système d’information reliés aux réseaux internationaux permettant des interconnexions, ministère des Finances (banques, douanes, fiscalité), les ports/aéroports, et les entreprises et ce pour lutter contre les surfacturations et les trafics de tous genres : produits de mauvaises qualités ou périmés, ayant constaté parfois des produits dans les conteneurs ne correspondant pas aux déclarations.

En résumé, sans vision stratégique, le risque est le retour à une économie administrée où l’Etat voudrait tout contrôler bureaucratiquement sans la mise en place de mécanismes économiques. Les agents économiques sont rationnels comme en témoignent les spéculations, qui sont un acte économique, contournant les mesures administratives, dans la majorité des bourses mondiales où bon nombre de produits sont cotés au jour le jour. Ne pas maîtriser les mécanismes boursiers internationaux peut se traduire pour une Nation des pertes en milliards de dollars et se pose cette question : combien d’entreprises et d’administrations maîtrisent en Algérie les nouveaux mécanismes financiers internationaux, une mauvaise gouvernance accroissant l’insécurité du pays. Que nos bureaucrates analysent les mécanismes de la cotation du dinar sur le marché parallèle jour par jour au Square Port Saïd à Alger ou d’autres centres à l’Est et à l’Ouest. Les pratiques de surfacturation se trouvent également pour les marchés locaux en dinars ayant des impacts sur la qualité des travaux surtout dans les infrastructures. Aussi, il y a urgence pour l’Algérie de s’adapter aux importants bouleversements géostratégiques mondiaux, car l’on ne combat pas la fuite des capitaux à partir de commissions et de circulaires. Un mauvais développement accroît l’insécurité. Il appartient au gouvernement de mettre en place des mécanismes de régulation transparents car la lutte efficace contre les transferts illicites de capitaux suppose des mécanismes démocratiques de contrôle et une bonne gouvernance loin des mesures bureaucratiques autoritaires. L’Algérie ne peut continuer dans cette gestion administrative bureaucratise suicidaire, au risque d’une aggravation du déficit budgétaire, de l’épuisement de ses réserves de change, d’une accélération du processus inflationniste et donc de tensions sociales. A l’avenir, ne devant pas paralyser l’économie en redonnant confiance aux investisseurs nationaux et étrangers créateur de valeur ajoutée, devant éviter le mythe du juridisme à travers les codes d’investissement (des dizaines depuis l’indépendance sans aucun effet) alors que le blocage est d’ordre systémique avec le terrorisme bureaucratique. L’on ne doit pas confondre corruption et acte de gestion qui doit être dépénalisé afin de ne pas bloquer l’initiative des managers, car c’est par la mise en place de mécanismes transparents que l’on évitera que les pratiques du passé ne se reproduisent plus.
(Suite et fin)
Professeur des universités,
Abderrahmane Mebtoul