Hommage à l’équipe algérienne de football qui a su redonner espoir et réconcilier l’Algérie avec elle-même

Consécration sportive

L’équipe nationale de football s’est qualifiée pour le 3e et dernier tour (barrages) de la Coupe du monde 2022 au Qatar et, selon les experts du sport, cinq adversaires potentiels sont au menu, à savoir l’Egypte, la République démocratique du Congo (RDC), le Ghana, le Cameroun et le Mali. Pour l’instant, l’ équipe nationale a disputé plusieurs matches avec des victoires sans faille, montrant qu’avec une nouvelle gouvernance loin des relations de clientèles, l’Algérie peut surmonter la crise multidimensionnelle actuelle.Devant raisonner à moyen et long terme, loin des actions conjoncturelles, pour bénéficier véritablement de son intégration au marché international, le football algérien doit absolument construire un modèle dont la professionnalisation lui permettra de conserver ses meilleurs joueurs plus longtemps supposant des mécanismes de régulation qui arbitrent de manière plus équilibrée entre recherche du profit et les aléas des compétitions. Et quel que soit le résultat à la finale, l’équipe nationale aura réalisé ce qu’aucun gouvernement depuis des décennies n’a réussi, à réconcilier les Algériens avec eux-mêmes. Jamais de mémoire depuis l’indépendance politique une fièvre de liesse populaire en faveur du drapeau national, dans les cafés bombés pour suivre les différentes rencontres, des immeubles, des maisons, des voitures, bus et camions décorés de drapeaux, n’a eu lieu, et ce de l’Est à l’Ouest en passant du Centre au Sud. Même pour les grandes fêtes nationales on n’a pas vu cela, fête ces dernières années inaugurées par des officiels au sein de salons climatisés, passée presque inaperçue. Cela ne signifie pas que les Algériens n’accordent pas une importance aux importants anniversaires comme ceux du 5 juillet ou du 1er novembre, mais qu’ils la fêtent à leur manière, la plus sûre et la plus sincère dans le cœur. Et selon la majorité des citoyens, contrairement à certaines propagandes, la seule institution qui garde la confiance de la population est l’ANP. Mais avec le mythe qui se propage à l’ensemble de la société d’enrichissement sans efforts, cette situation est intenable dans le temps, existant un lien dialectique entre sécurité et développement de la responsabilité du gouvernement impliquant une coordination sans faille entre toutes les structures du pays et des prévisions fiables, évitant ces tâtonnements au gré du cours des hydrocarbures, comme facteur d’adaptation au nouveau monde en perpétuel évolution, où toute Nation qui n’avance pas recule forcément. L’urgence est donc la refonte de l’Etat afin de réaliser la symbiose Etat citoyens, éviter que la majorité des autres institutions étatiques bureaucratiques du sommet à la base, passant par une réelle décentralisation autour de grands pôles économiques régionaux. Or malheureusement, on assiste à des discours contradictoires d’autosatisfaction de certains responsables facteurs de démobilisation, des partis politiques et des sociétés dites civiles vivant souvent du transfert de la rente, incapables de faire un travail de mobilisation et d’encadrement efficients, donc de contribuer significativement à la socialisation politique et à l’œuvre du redressement national, et en cas de malaise social laissent les forces de sécurité seules face à la population.
Rendons hommage à l’équipe nationale pour ce renouveau d’espoir qu’elle a suscité au profit exclusif de l’Algérie, qui permet à l’Algérie de se réconcilier avec elle-même en souhaitant que les prochains matchs se déroulent dans la sérénité et l’esprit sportif qui a toujours animé notre équipe nationale. Ce message d’espoir, renoue avec la génération de ceux qui ont libéré le pays entre 1954/1962 et de celle de 1962 qui avait fêté l’indépendance nationale en brandissant avec fierté le drapeau Algérie. L’équipe nationale réconcilie également l’Algérie avec sa communauté émigrée, montrant qu’un Algérien sportif, intellectuel, ou opérateurs économiques, évoluant dans un autre environnement, loin des tracasseries bureaucratiques s’épanouit. On ne peut faire revenir les «génies», il ne faut pas se tromper de cibles, que si on améliore d’abord le sort de ceux qui sont sur place pour éviter également leur départ par leur revalorisation et surtout par la considération supposant un renversement des échelles de valeur reposant sur la morale , le savoir et non sur les rentes, où hélas les pratiques sociales contredisent souvent les discours démagogiques de certains responsables.
Cette mobilisation citoyenne est donc sans pareille, que les autorités devraient méditer où avec les tensions à la fois budgétaires, sociales et géostratégiques au niveau de la région où s’impose une Front national composé de différentes sensibilités, au lieu de se contenter d’une distribution passive de la rente des hydrocarbures, pour une paix sociale éphémère, car ne relevant pas d’une bonne politique socio- économique hors rente, ni d’une bonne gouvernance, partage de surcroît inégalitaire comme en témoigne les enrichissements sans efforts et la course aux rentes. Et oui, qui a dit que les Algériens n’aimaient pas leur pays puisque la leçon vient de jeunes qui donnent des leçons aux adultes. Or, la leçon que l’on peut tirer de cette jeunesse et des déclarations de son entraîneur, qui dit tout haut ce que l’immense majorité des algériens pensent tout bas, sans arrières pensées, est que ce serait une grave erreur politique de certains partis politiques- pouvoir et opposition- ou de certaines personnes en mal de publicité de faire de cette mobilisation spontanée une adhésion à leur politique et s’il y a eu cette immense mobilisation, c’est que le politique est hors-jeu. Car, selon l’adage l’espoir fait vivre, la majorité des Algériens s’attache, faute de mieux avec la détérioration de leur niveau de vie sur le plan socio-économique, à des signes d’espoir et que la leçon des harraga témoigne d’une situation de désespoir que certains responsables malveillants tentent de banaliser alors qu’ils constituent un mal social profond. Aussi, comment ne pas penser donc à l’avenir de cette jeunesse car l’Algérie dans 10 ans c’est-à-dire demain, avec une population qui dépassera 50 millions d’habitants avec l’épuisement des ressources en hydrocarbures, l’âge moyen de nos filles et garçons d’environ 20 ans , auront 30 ans et entre temps ayant une exigence comme tout Algérien avoir un emploi, un logement, se marier, avoir des enfants, donc une demande sociale croissante, donc une obligation, supposant de préparer l’ère de l’après pétrole pour les générations futures.
Car, la leçon principale que l’on peut tirer est que la population algérienne d’une manière générale et notre jeunesse d’une manière particulière (70% de la population) est capable de miracles pour peu qu’on lui tienne un discours de vérité grâce à une nouvelle communication et une gouvernance rénovée, permettant une mobilisation citoyenne, condition pour le développement de l’Algérie., cette jeunesse dynamique bien plus importante que toutes les ressources en hydrocarbures. Car, le véritable patriotisme se mesurera à l’avenir par la contribution de chaque algérien à l’accroissement de sa participation à la valeur ajoutée nationale et aux gouvernants une moralité sans faille. En fait, la population algérienne à travers cette mobilisation demande plus de liberté, plus de justice sociale récompensant le travail et l’intelligence et non les rentes en contrepartie de soumissions de clientèles, en un mot un Etat de droit et la démocratie sans renier ses valeurs culturelles. Face à des mesures autoritaires bureaucratiques centralisées sans adhésion et concertation, la faiblesse de contrepoids politiques et économiques, la société enfante ses propres règles qui lui permettent de fonctionner expliquant la dominance de la sphère informelle dans la majorité des segments de la société, économique, politique, social et culturel. Or seuls, le dialogue permanent, le respect du contrat gouvernants/gouvernés, la réorientation de la politique socio-économique conciliant l’efficacité économique et une profonde justice sociale, évitant ce manque de cohérence et de visibilité permettent le dépassement du statu quo et résoudre la crise multidimensionnelle. Aussi, il y a urgence de solutionner la crise économique , sur la base d’un dialogue productif afin d’éviter la déflagration sociale de ce qu’aucun patriote ne souhaite. Les derniers évènements et mesures biaisées montrent clairement que certains segments des pouvoirs publics (central et local), du fait de l’ancienne culture bureaucratique et administrative, n’ont pas une appréhension claire de l’essence de la crise actuelle. La lutte contre la corruption implique un véritable Etat de Droit une nouvelle gouvernance si l’on veut la combattre efficacement alors qu’elle constitue le plus grand danger, pire que le terrorisme qu’a connu l’Algérie entre 1990/2000. En conclusion, au vu des réalisations notamment de notre équipe nationale de Football, je ne suis pas pessimiste vis-à-vis de ‘l’avenir de mon pays, l’Algérie éternelle , n’ayant pas d’autre patrie de rechange, gardant l’espoir du renouveau.. Comme j’ai eu à l’affirmer dans plusieurs interventions nationales et internationales, notre jeunesse a montré une maturité sans faille devant aller vers un climat apaisé avec des concessions de part et d’autres afin de dépasser, le temps perdu en économie ne se rattrapant jamais, conduisant inévitablement le pays droit au FMI avec l’épuisement des réserves de change Le dialogue productif, au profit exclusif de l’Algérie, assorti à une profonde réorientation de la politique socio-économique, tout projet étant forcément porté par des forces sociales, impliquant restructuration des partis et de la société civile sur la base de nouveaux réseaux, est la seule voie de sortie de la crise actuelle. L’Algérie a besoin qu’un regard critique et juste soit posé sur sa situation, sur ce qui a déjà été accompli de 1963 à 2021, et de ce qu’il s’agit d’accomplir encore au profit exclusif d’une patrie qui a besoin de se retrouver et de réunir tous ses enfants autour d’un même projet, d’une même ambition et d’une même espérance.

Professeur des universités
Expert international
Dr Abderrahmane Mebtoul