Les enjeux géostratégiques par la maîtrise de l’intelligence économique et leurs impacts sur la nouvelle architecture des relations internationales

L’objet de cette brève contribution, engageant la sécurité nationale, est une synthèse de mes nombreuses contributions nationales et internationales sur ce sujet entre 1980/2021.
Le monde est à l’aube d’un profond bouleversement géostratégiques tant dans le domaine économique, social que sécuritaire, où en ce XXIe siècle, le culturel sera déterminant, modifiant les comportements et profondément les relations internationalesDans les relations internationales actuelles n’existent pas de sentiments,
de discours de fraternité mais que des intérêts, une diplomatie n’étant forte que si l’économie, conciliant l’efficacité économique et une profonde justice sociale, renvoyant à la moralité des dirigeants, est forte, étant d’ailleurs la seule garantie de la cohésion sociale et d’un front national solide. D’où l’importance du redressement économique national, du renouveau culturel de toutes nos institutions militaires et civiles qui doivent s’adapter à ces nouvelles mutations.

1.Le fondement des nouvelles relations internationales
De nouvelles mutations modifient tant le fonctionnement des sociétés que les relations internationales, notamment la gouvernance interne déterminante, pour mobiliser les populations et les relations entre les États, les organisations internationales et les sociétés civiles mondiales et locales et leurs influences dans des conflits. Les différents acteurs ont des points de vue disparates quant à la manière de réaliser leurs objectifs. C’est que les conflictualités du monde contemporain ne sont pas seulement économiques ou sécuritaires, mais également et surtout ont pour essence une profonde crise morale devant se fonder sur une profonde rénovation de la perception du monde. Depuis que le monde est monde, nos sociétés vivent d’utopie. Comme le dit l’adage populaire, l’espoir fait vivre.
D’ailleurs, au niveau des sociétés, nous assistons à une pièce de théâtre où chacun a un rôle déterminé, les pouvoirs en place avec leurs cours et leurs discours contribuant à cette utopie. Les guerres et les révoltes sociales en sont le contrepoids. Aussi, il existe une tension entre d’une part, les processus de paix traditionnels menés par les États (la diplomatie officielle) et par l’armée et d’autre part, les processus engagés par des civils, qui résultent de traditions telles que la non-violence active et le dialogue à la base. C’est que les crises internationales ont toujours concerné de nombreux acteurs. Mais traditionnellement, en dehors de l’organisation de sécurité collective à vocation universelle et à compétence générale qu’est l’ONU, leur gestion revenait avant tout aux États. Or de nombreux autres acteurs y participent désormais, notamment, les organisations non gouvernementales et les organisations d’intégration régionales. On le constate, le champ est composé d’une multitude d’acteurs et d’approches qui implique de facto un morcellement des actions et une difficulté à avoir un impact significatif sur le terrain. De nombreuses études tentent de catégoriser les principaux acteurs de ces conflictualités émergentes. La plupart d’entre elles opposent les États, dotés de forces armées régulières, à des acteurs non-étatiques, laissant apparaître de nouveaux adversaires. Cette opposition, selon les experts en géostratégie entre États et acteurs non-étatiques, ne semble pas totalement satisfaisante car elle ne reflète pas l’ensemble des systèmes asymétriques.
En effet, une typologie des acteurs ne peut se faire qu’en prenant en compte plusieurs critères : les motivations, l’organisation et les modes d’action. De nouvelles conflictualités sont apparues où leurs acteurs se caractérisent souvent par l’illisibilité de leurs organisations, l’imprévisibilité de leurs actions multiformes qui privilégient la violence dûment mise en scène par la recherche du sensationnel et de la médiatisation. Des stratégies d’adaptations s’imposent donc face à ces nouvelles mutations. Il fut dans un temps pas lointain où les relations de chefs d’Etat à Etat, de ministres à ministres étaient à la base des relations internationales. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas et désormais ce sont les réseaux décentralisés à travers des organisations non gouvernementales disparates qui fondent les relations. (Voir notre contribution au colloque international sur le thème «Réseaux sociaux au Maghreb et au Moyen-Orient : quel impact sur les transitions politiques dans la région» organisé le 28 janvier 2020 au Cercle National de l’Armée, Beni Messous – Alger par l’IMDEP/MDN), s’adaptant aux nouvelles technologies ainsi que la diplomatie algérienne, n’étant plus dans les années 1970, pour s’adapter à ces nouvelles mutations. Grâce aux nouvelles technologies et à leur prolifération non maîtrisée, ces conflictualités sont susceptibles d’utiliser toute la panoplie des capacités actuelles : armement sophistiqué, maîtrise de l’information, diversité des types d’agression (capacité d’exporter une menace n’importe où dans le monde), générant des menaces (cyber-délinquance, cybercriminalité, etc.) qui mettent en évidence l’insuffisance des systèmes de sûreté ou de substitution dans les sociétés modernes. En effet, les moyens modernes de communication facilitent l’expression libre et la circulation, via les réseaux, des idées les plus extrêmes, dans un but revendicatif, subversif ou prédateur. Elles peuvent atteindre tous les pans de la société : cohésion sociale, légitimité de l’autorité, pertinence du modèle économique, sociétal ou religieux. Ainsi véhiculées, les techniques d’«agression» de toutes natures se propagent, et contribuent d’autant plus à la fragilisation des «cibles» potentielles qu’elles s’appuient souvent sur l’image, support d’émotion et propice aux comparaisons. Pour preuve les drones commencent à remplacer l’aviation classique et armés de missiles, à des centaines de kilomètres peuvent détruire des pans entiers du territoire ; les nouvelles télécommunications peuvent espionner toute conversation, détecter tout mouvement des troupes même en pleine nuit et les cyber-attaques peuvent paralyser toute une économie.
Parallèlement nous assistons à l’influence décadente des pays dits non alignés, où en réalité la majorité s’aligne, des organisations comme l’ONU, l’OUA, le monde arabe traversés par des courants contradictoires qui se limitent à des communiqués, vœux pieux et à des résolutions rarement appliquées. Concernant l’espace naturel de l’Algérie, la Méditerranée et Afrique avec de nombreuses zones de conflits, notamment la zone sahélienne avec des interférences étrangères, le contrôle économique de l’Afrique étant l’enjeu du XXIe siècle, avec des richesses non exploitées, objet de toutes les convoitises nous devrions assister à de profondes reconfigurations socio-économiques, technologiques mais également sécuritaires «Sur les mutations géostratégiques militaires, politiques, sociales et économiques» – voir la Revue IEMed 2017 -Barcelone -Espagne, un important collectif analysant la sécurité, le politique, l’économique, le social et le culturel de la région méditerranéenne auquel a contribué le professeur Abderrahmane Mebtoul sous la direction du professeur Senen Florensa, ancien diplomate et ministre espagnol, président de IEMed (516 pages), préfacé par Johannes Hahn ex-Commissaire européen à la politique de voisinage aux négociations d’élargissement. où ont contribué 51personnalités internationales (ministres, diplomates, politiques, militaires, économistes, sociologues, historiens, écrivains) des deux rives de la Méditerranée en huit chapitres interdépendants :
1.-le conflit arabo-israélien revisité
2.-les défis à venir de l’union européenne
3.-l’avenir de l’Islam
4.-(Dé) Radicalisation et sécurité et leurs effets – sur la région méditerranéenne
5.-Bilan et partenariat des pays -les pays méditerranéens / Union européenne -Balkans occidentaux -Maghreb -Moyen Orient et Turquie -Les autres acteurs
6.-secteurs stratégiques (sécurité et politique) –
7.-Economie et territoire –
8.-Société et culture)

2.- L’impact dans les relations internationales de la maîtrise de l’intelligence économique
Un des segments des nouvelles technologies est la maîtrise de l’Intelligence économique. Sa gestion stratégique est devenu pour une Nation et l’entreprise d’une manière particulière, l’un des moteurs essentiels de sa performance globale et de sa sécurité afin d’éviter de livrer aux concurrents des informations sensibles à travers le piratage. Beaucoup d’entreprises tentent de soutirer à leurs concurrents des technologies, des fichiers de clients, des secrets commerciaux, des structures de coûts de produits, des spécifications et procédures de fabrication de produits et des plans de développement. C’est pourquoi, actuellement la majorité des Etats développés contribuent à assurer le contrôle de la sécurité des bases de données internes pour faire face aux piratages des données. D’où le rôle d’une sensibilisation des acteurs de l’intelligence économique non seulement à une meilleure connaissance et une meilleure maîtrise des outils, mais également à une «culture» de la sécurité qui suppose des comportements et des habitudes adaptées à l’utilisation de ces outils. En fait tout cela renvoie à une nouvelle gouvernance fondée sur la valorisation de l’économie de la connaissance sans lesquels aucun pays ne peut se développer durablement. Et cela interpelle l’ensemble des Ministères, administrations et entreprises algériennes, mais également tous les citoyens. C’est que l’intelligence économique est un processus découlant du cycle du Renseignement. Les informations collectées permettent de construire une conviction au fil du traitement et non de confirmer l’opinion erronée qu’un acteur pourrait initialement avoir. Une étape d’expression du besoin formalisée permet de «cibler» la recherche en définissant un périmètre limité, étape indispensable pour éviter l’accumulation de données inutiles et donc se parer d’une surcharge informationnelle contre productive.
L’ensemble des champs qui complètent l’Intelligence économique, comme, la gestion des connaissances, la protection des informations, le lobbying, peuvent être regroupés dans le concept global d’Intelligence stratégique. A.M