«Marcher en duo», le premier pas vers une industrie compétitive

L’Etat et les investisseurs posent les conditions de la relance industrielle

L’Etat tente de renflouer ses caisses vidées par la forte hausse des dépenses provoquée par la crise sanitaire du Covid-19 et la chute inédite des cours du pétrole. Aujourd’hui, l’Algérie se trouve dans l’obligation de relancer le secteur industriel local en facilitant l’investissement dans divers domaines pour diversifier la production nationale, booster la croissance et générer de l’emploi. Suivre une nouvelle trajectoire, ce n’est pas une question d’alternative, mais de survie. Ainsi mesurer l’ampleur de chaque décision et actions à prendre et l’impact qu’elle peut y avoir. L’Etat se dit prêt à relever ce défi et appelle tous les responsables locaux, les investisseurs et les politiques à s’impliquer sérieusement pour relancer le tissu industriel et s’affranchir de l’ancien mode de gouvernance des administrations et des entreprises, notamment, publiques pour aller de l’avant.  Durant trois jours de suite, plus de 700 participants ont débattu de leurs propres problématiques de l’accès à l’investissement, des opportunités d’affaires, des obstacles intentionnels et des incitations et avantages accordés par l’Etat.
Intervenant dans ce sens, le Premier ministre et ministre des Finances, Aïmene Benabderrahmane a souligné le rôle important de l’Etat dans la concrétisation des orientations stratégique de la nouvelle feuille de route élaborée par le ministère de l’Industrie visant à redynamiser les activités industrielles notamment publiques. Ces dernières ont connu une baisse de 14% de leurs activités et la plupart des entreprises publiques sont menacées de faillites, malgré l’aide financière de l’Etat estimée à plus de 2.900 milliards de dinars, selon le chef du Gouvernement qui a dressé un tableau plutôt morose du secteur public marchand industriel, de services et des banques nationales.  Malgré les résolutions prises par les différentes parties présentes à la Conférence nationale sur la relance industrielle qui s’est déroulée du 4 au 6 décembre en cours à Alger, de nombreux analystes et chefs d’entreprises se posent la question sur les marges de manœuvre et la volonté de chaque partie concernée par cette relance de réunir les conditions nécessaires pour mettre en œuvre le Plan d’investissement national et surtout se  débarrasser des pratiques «polluantes et subversives»du passé, soit d’il y a deux ans.
Dans son allocution d’ouverture, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune a relevé les multiples freins qui ont pendant des années démotivé les meilleures volontés, fustigeant la bureaucratie associée de certaines parties à l’origine du blocage des projets d’investissements. Il a ordonné à cet effet de dégeler 57 projets en suspens et d’accélérer le déblocage d’autres projets pour booster l’investissement local. Il a fixé un ultimatum : quelques deux bonnes semaines avant la fin de l’année 2022. L’objectif est de bâtir une industrie contributive et résiliente à travers la mobilisation des investisseurs publics et privés et les pouvoirs publics pour que chaque partie puisse tenir un rang dans cette course. Encourager la compétitivité et la transparence par une meilleure gouvernance des entreprises et le renforcement des partenariats (public-privé). Ces deux secteurs doivent dépasser leur complexe et marcher en duo pour relancer l’économie nationale, et ce, en se conformant aux nouvelles dispositions prévues dans la nouvelle version du Code de l’investissement, visant à simplifier les procédures administratives et l’accès au foncier et au crédit.
Ce nouveau texte prévoit l’abrogation de la règle 51/49% pour encourager l’investissement direct étranger en Algérie, en déclin de plus de 19% en 2019 (Ndlr). Mais aussi la dissolution du Conseil national de l’investissement (CNI) accusé du blocage de 2.500 projets d’investissement en attente de son aval.  Par ailleurs, l’Etat compte réduire les montants consacrés à l’aide des entreprises publiques déficitaires et serrer la vis sur l’octroi des incitations et avantages fiscaux aux investisseurs, expliquant cette décision par le détournement de ces aides qui ont causé un creux de 10 milliards de dollars dans les caisses de l’Etat.  Le chef du Gouvernement a affirmé toutefois l’engagement de l’Etat à poursuivre ses efforts pour l’investissement local et d’accompagner les véritables investisseurs dans la concrétisation de leurs projets d’investissement productifs.
Il a appelé à fonder une industrie solide et éviter les erreurs du passé faisant allusion au montage automobile.
M. Benabderrahmane a répondu, également, sur le dossier de l’accès au foncier industriel et a affirmé son engagement à récupérer le foncier industriel non exploité et la réhabilitation des zones industrielles. Les résultats préliminaires du recensement font état de «plus de 628 zones d’activité et de 65 zones industrielles en activité», selon lui, affirmant que sur  une superficie totale de 27.000 hectares, plus de 14.700 lots de terrain octroyés ne sont pas exploités à ce jour. Quant au sujet du financement, le Premier ministre a annoncé l’ouverture des capitaux des banques publiques au même titre que celui de certaines entreprises publiques. Les participants ont appelé à l’accélération des réformes des textes réglementaires et la dépénalisation de l’acte de gestion, tant attendu. La Conférence nationale sur la relance industrielle s’est achevée sur une note d’espoir.
Samira Takharboucht