Le fondateur de l’Équipe de la Liberté 

Mohamed Boumezrag 

L’ancien joueur et entraîneur Mohamed Boumezrag a toujours été présenté comme étant le grand architecte de la glorieuse équipe de football du Front de libération nationale qui avait porté haut le drapeau algérien pendant la Guerre de Libération nationale.

Dans la concrétisation de ce projet, chacun des joueurs professionnels qui avait répondu à l’appel de la patrie avait apporté une pierre à l’édifice mais force est de reconnaître que c’est le regretté Mohamed Boumezrag qui en a été le grand initiateur et l’architecte. L’idée de créer cette Équipe de football avait germé dans l’esprit de Mohamed Boumezrag juste après son retour de Moscou (Russie) où il avait pris part aux Jeux de la jeunesse de 1957. Mohamed Boumezrag a été discret, et son premier contact fut avec Mohamed Maouche avec qui il avait exposé son projet. A partir de là, ils ont commencé à se voir régulièrement, chaque mercredi au café du Luxembourg à Paris, afin de tout mettre en place.
Mohamed Boumezrag a joué au poste d’inter droit au Girondins de Bordeaux, mais il a terminé sa carrière comme entraîneur-joueur à l’Union sportive du Mans entre 1943-1945 puis au SC Colmar, mais il est surtout connu pour avoir été le fondateur de l’Équipe de la Liberté, une formation de football qui était dans la clandestinité et en exil à Tunis (1958) pendant la lutte de l’Algérie pour son indépendance, celle que l’on a surnommé le Onze de l’indépendance. Mohamed Boumezrag a mis en exécution son projet, aidé par son camarade Mokhtar Arribi ainsi que Mohamed Maouche.
Mohamed Boumezrag a porté les couleurs du FC Blida, du GS Orleanville (actuellement Chleff) du MC Alger, du FC Valenciennes, du SC Colmar, du FCO Charleville, du Red Star, des Girondins de Bordeaux, de l’US Mans puis du SC Colmar. C’était un milieu de terrain au grand talent, très technique. Boumezrag connaissait les rouages du football français puisqu’il était directeur de la sous division régionale algérienne de la Fédération française de football, et avant la création de l’Équipe de la Liberté, il y avait la formation de l’équipe de l’ALN, un an avant la formation de l’équipe du FLN.
Deux anciens joueurs et entraîneurs algériens ont décidé de former à Tunis la première sélection qui allait représenter l’Algérie. Il s’agit de Ahmed Benelfoul et Habib Draoua. En 1956, l’équipe est formée, et en mai 1957, la formation de football est approuvée par le Front de libération nationale et décide qu’elle représentera l’Armée de libération nationale vue qu’il y a des joueurs qui sont venus du maquis. Cette formation est composée, essentiellement, de joueurs amateurs évoluant en Algérie et en Tunisie. Entre mai 1957 et avril 1958, elle dispute de nombreux matches au Maghreb ou encore au Proche-Orient pour soutenir la cause indépendantiste d’un pays colonisé. On lui attribue 42 victoires. Cette sélection va donner naissance, une année plus tard, à la formation de l’Équipe de la Liberté.

Planification
A l’automne 1957, les dirigeants du Front de libération nationale décident de bâtir une équipe nationale algérienne de football afin de promouvoir l’indépendance de l’Algérie dans d’autres pays et selon le FLN, le sport peut être exploité pour l’indépendance de l’Algérie comme cela a déjà été fait dans le secteur militaire syndicale, étudiant ou culturel, en créant des organisations ou des syndicats autonomes et musulmans. Cette dynamique a pour but de prouver que le pays peut se développer seul sans aide extérieure, et ainsi influer positivement sur le moral du peuple algérien. De plus, afin d’établir une équipe de football capable de se confronter aux meilleures équipes du monde, il semble nécessaire qu’elle se compose de joueurs professionnels selon les membres de la direction du FLN, et ceci, afin de contrer la tentative de la France de se garantir une hégémonie culturelle dans ses colonies. Et pour cela, le communiqué du FLN du 13 avril 1958 souligne aussi l’importance d’une équipe performante sur le plan international pour l’émergence d’une «Identité Algérienne» et il qualifie ses joueurs de patriotes prêts à tout sacrifier pour l’indépendance de leur Nation et les présentent comme un exemple de courage pour les jeunes algériens. Cette tâche de sélection des joueurs est attribuée à Mohamed Boumezrag qui est directeur au sein de la FFF, et politiquement, il est chargé par Mohamed Allam de préparer et garder secrète cette équipe pendant la phase de planification.
Le Front de libération nationale peut aussi s’assurer de recruter un bon nombre de joueurs algériens professionnels en France du fait que ces derniers versent, périodiquement au FLN, la taxe révolutionnaire qui peut aller jusqu’à 15% du salaire perçu. Pour des raisons de sécurité, Mohamed Boumezrag rend personnellement visite à chaque joueur pro-Algérien admissible dans l’Équipe du FLN. Il établit des contacts amicaux avec eux avant de leur faire subir une pression morale. Dans tous les cas, ces joueurs qui s’acquittaient de la taxe révolutionnaire n’ont pas à craindre des représailles s’ils refusent de rejoindre l’Équipe de la Liberté comme le font par exemple Salah Djebaili et Kader Firoud (Nimes Olympic) Ahmed Arab (Limoges) ou encore Mahi Khenane (Stade Rennais).
L’équipe du FLN surnommée aussi le Onze de l’indépendance est une formation constituée principalement de footballeurs professionnels qui évoluent en France métropolitaine avant de rejoindre le mouvement révolutionnaire pour l’indépendance de l’Algérie. Le FLN est là pour l’aider en organisant entre autres des rencontres de football. Cette formation est fondée le 13 avril 1958 et le rôle de cette équipe est avant tout politique pour montrer aux Français de métropole que même des footballeurs professionnels s’impliquent dans cette cause quitte à renoncer à leur statut. Les autorités françaises obtiennent facilement la non reconnaissance de cette équipe par la FIFA. Malgré cette interdiction de jouer, l’Équipe du FLN réalise une tournée mondiale d’environ 80 rencontres, notamment en Europe, en Asie et en Afrique. Ces rencontres de football font connaître à travers le monde la cause algérienne et sa guerre d’Indépendance.
Côté historique, l’opération indépendance commence en football des 1947 avec l’organisation spéciale qui est le bras armé du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques de Messali Hadj et le Comité révolutionnaire d’unité et d’action. De ces deux mouvements est parvenue l’idée d’une guerre d’Indépendance contre la France.
Mohamed Boumezrag et Mohamed Allam ainsi que Arribi Mokhtar et les autres footballeurs pro qui avaient répondu à l’appel de la Patrie pour la noble cause, sont considérés aux yeux du monde entier comme étant les premiers ambassadeurs de la jeune Nation algérienne et les premiers représentants du peuple algérien libre.
Hormis certains voisins comme l’Espagne et l’Italie qui savaient que l’Algérie était en guerre contre la France, le reste du monde n’avait aucune idée de ce qui se passait chez nous. Beaucoup, d’ailleurs, considéraient que l’Algérie n’était qu’un petit département français, et pour cela, l’objectif du FLN était de prouver le contraire, et c’est à notre équipe qu’incombait de prouver le contraire. Le FLN avec Mohamed Boumezrag et chaque membre de cette glorieuse équipe sont pour nous la fierté de notre identité, de notre patriotisme et l’amour du pays qu’ils nous ont donné ! Difficile de les oublier, c’étaient des braves, des gens qui ont tout sacrifié afin que l’Algérie retrouve son indépendance. Bravo, ils sont la fierté de l’Algérie.
Kouider Djouab