Relance économique ou régression sociale et diplomatique

Suite au rapport mitigé du gouverneur de la Banque d’Algérie, les défis de l’année 2022, pour l’Algérie

La sécurité nationale est posée imposant un discours de vérité, devant éviter ces discours d’autosatisfaction, la fuite en avant selon l’adage «après moi, le déluge» et donc de gérer l’économie au gré de la conjoncture sans vision stratégique, comme une épicerie. Cependant évitons tout sinistrose, malgré une situation difficile, l’Algérie n’est pas en faillite, elle a les moyens de surmonter la crise actuelle sous réserve d’une nouvelle gouvernance et d’éviter la vison monétariste restrictive, devant concilier la dynamique économique et la dynamique sociale au sein d’une économie ouverte. L’année 2022 est une année charnière, c’est la dernière chance pour redresser l’économie, devant éviter l’illusion d’un miracle d’un baril de pétrole à plus de 100 dollars et un volume physique de production d’hydrocarbures au même niveau des années 2007/2008. Sinon ce sera la régression sociale et l’isolement de l’Algérie sur la scène internationale.

On évoque actuellement la nationalisation des unités des oligarques. Attention de ne pas renouveler les erreurs du passé, puisque selon les données du premier ministère des couts d’assainissement durant les trente dernières année ont couté au trésor public environ 250 milliards de dollars et durant les 10 dernières années, selon les fluctuations du taux de change, les réévaluations, faute de maitrise des coûts, environ 60/65 milliards de dollars. Et ce sans parler de cette interminable feuilleton du dossier des voitures depuis 2019, où l’objectif a été dès le départ d’économiser les réserves de change , le besoin annuel étant selon les experts à environ 250 000 unités/an, environ 2,5 milliards de dollars/an , ayant permis donc d’économiser 5 milliards de dollars entre 2020/2021. Ces montants sont à soustraire aux réserves de change existantes évaluées à 44 milliards de dollars fin septembre 2021, ce qui aurait donné entre 10/ 20 milliards de réserves de change fin 2021.

2.- D’où l’importance de rappeler les principales dispositions de la loi de finances 2022 adoptée par l’APN. Le PLF 2022, se basant sur un cours de 45 dollars le baril du Brent et un prix du marché de 50 dollars, prévoit une croissance de 3,3% contre 3,4% en 2021 et moins 6% en 2020, taux de croissance faible par rapport à TO donne une croissance faible. Il faudra être réaliste si on prend un exemple si les projets du fer de Gara Djebilet et du phosphate de Tébessa commencent leur production en 2022, l’investissement de ces deux projets étant estimées à environ 15 milliards de dollars ainsi que le projet du gazoduc Nigeria/Algérie dont le coût est estimé par l’Europe 20 milliards de dollars, le seuil de rentabilité sera ver s2027/2030, sans compter le grand projet de Cherchell dont le cout est estimé entre 5/6 milliards de dollars. Malgré le dérapage du dinar pour ne pas dire dévaluation de 5 dinars vers les années 1970/1973 de 80 dollars entre 2000/2004 et actuellement entre 138/139 dinars un dollar cela n’a pas permis de dynamiser les exportations hors hydrocarbures montrant que le bocage est d’ordre systémique avec la dominance du terrorisme bureaucratique qui bloque les énergies créatrices. Comment ne pas rappeler que l’Algérie a engrangé plus de 1 000 milliards de dollars en devises entre 2000/2019, avec une importation, de biens et services toujours en devises de plus de 935 milliards de dollars pour un taux de croissance dérisoire de 2/3% en moyenne alors qu’il aurait dû être entre 9/10%. Selon le FMI le taux de croissance a été négatif de 6% et devrait se situer à 3,4% en 2021. Mais un taux de croissance se calcule par rapport à la période précédente : un taux élevé en T1 par rapport à un taux faible en TO donne un taux relativement faible. Le déficit budgétaire prévu est d’environ 4175 milliards de dinars au cours de 137 dinars un dollar, au moment de l’élaboration de la loi, soit 30,50 milliards de dollars, 8 milliards de dollars de plus qu’en 2021.
Le niveau d’inflation, encore que l’indice n’a pas été réactualisé depuis 2011, devrait s’élever à plus de 5/6% pour 2021, la banque d’Algérie donnant plus de 9% pour octobre 2021, pour quatre raisons : la restriction des importations, la dévaluation du dinar, la faiblesse de l’offre et des émissions monétaires sans contreparties productives, la masse monétaire ayant enregistré une croissance de 12,79% durant les dix premiers mois de l’année en cours 2021.
Cette politique, en plus de la restriction drastique d’autres produits, au gré de la conjoncture sans vision stratégique, a paralysé tout l’appareil de production, le dernier feuilleton étant la poudre de lait, restriction qui vient d’être levée, contribuant à accélérer le processus inflationniste, le prix des voitures d’occasion ainsi les pièces détachées avec la pénurie ayant connu une hausse variant selon les catégories entre 50 et 100%, en plus des accidents de voitures, laminant le pouvoir d’achat des camionneurs, des taxieurs et des consommateurs.
Du fait que plus de 85% des matières premières sont importées, le taux d’intégration faible, tant pour les entreprises publiques et privées , sans compter l’assistance technique étrangère, avec la dévaluation du dinar entre 2022 et 2024, l’inflation sera de longue durée. Le PLF2022 prévoit 149,3 DA pour un dollar 2022, 156,8 DA/dollar en 2023 et 164,6 DA/dollar en 2024, la cotation officielle avec un écart de plus de 50% sur le marché parallèle, (entre 213/215 dinars un euro cours achat/vente) du dinar étant le 23/12/2021 de 138,8054 dinars un dollar et 157,1277 dinars un euro. Malgré cette dévaluation le blocage étant d’ordre systémique, contrairement à l’illusion monétaire, cela n’a pas permis de dynamiser les exportations où avec les dérivées 97/98% des recettes en devises proviennent de Sonatrach. Ce dérapage du dinar permet d’atténuer le montant de ce déficit budgétaire car si on avait un dollar 100 dinars, il faudrait pondérer à la hausse d’au moins 37% le déficit budgétaire serait pour fin 2022 supérieur à 42 milliards de dollars. L’Algérie selon le FMI fonctionnant entre le budget de fonctionnement et d’équipement, a plus de 137 dollars en 2021 et à plus de 150 pour 2022, malgré toutes les restrictions qui ont paralysé l’appareil de production avec des impacts inflationnistes. Le faible taux de croissance influe sur le taux de chômage, qui selon le FMI, en 2021 serait de 14,1% et 14,7% en 2022 incluant les sureffectifs des administrations, entreprises publiques et l’emploi dans la sphère informelle. Cette dernière contribue à 50-60% au PIB en échappant à toute traçabilité, comptabilité ou fiscalité, canalisant selon le président de la république entre 6000 et 10.000 milliards de dinars, soit entre 44 et 73 milliards de dollars. Pour éviter des remous sociaux, le PLF 2022 prévoit pour les subventions plus de 14 milliards de dollars au cours de 138 dinars un dollar, représentant 19,7% du budget de l’Etat. C’est un dossier très complexe. Sans maîtrise du système d’information et la quantification de la sphère informelle, produit de la bureaucratie qui permet la consolidation de revenus non déclarés, en temps réel , la réforme risque d’avoir des effets pervers.

En conclusion, la puissance des relations internationales en ce XXIe siècle est fonction du poids économique et la Chine en est la démonstration. En réalité, le rapport du gouverneur de la banque d’Algérie montre clairement qu’ en ce mois de décembre 2021, Sonatrach c’est l’Algérie et l’Algérie c’est Sonatrach. Au moment où se dessinent d’importants bouleversements géostratégiques mondiaux, devant éviter le mythe bureaucratique de croire que l’on peut développer le pays à partir de lois, les défis de l’Algérie, pays à fortes potentialités, impliquent de définir les priorités stratégiques afin de mettre en œuvre la bonne gouvernance et les réformes structurelles nécessaires devant concilier la concertation, l’efficacité économique au sein d’une économie ouverte.
(Suite et fin)